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Quelques considérations économiques – 10/12

 

Au nom du principe de la propriété, au nom du droit que je possède de me pourvoir moi-même de sécurité, ou d’en acheter à qui bon me semble, je demande des gouvernements libres. C’est-à-dire, des gouvernements dont je puisse, au gré de ma volonté individuelle, accepter ou refuser les services. Gustave de Molinari.

Au sens propre du terme, l’anarcho-capitalisme est la doctrine selon laquelle une société capitaliste sans État est économiquement efficace et moralement désirable. Pierre Lemieux. 

 

J’ai publié sur ce blog même un article consacré à l’anarcho-capitalisme. Le présent article lui donne une suite, en quelque sorte. Ci-joint, les liens vers cet article (publié en deux parties) :

https://zakhor-online.com/?p=6303

https://zakhor-online.com/?p=6307

Ci-joint, un lien synthétique, riche en références et en liens sur l’anarcho-capitalisme :

http://www.histophilo.com/anarcho-capitalisme.php

Définition générale : L’anarcho-capitalisme est l’alliance du libéralisme et d’une philosophie individualiste du droit basée sur la non-agression – la non-agression, un concept central de l’anarcho-capitalisme. Avec l’anarcho-capitalisme, toutes les interactions entre adultes consentants sont légitimes ; et toutes les atteintes à la propriété d’un tiers non consentant sont illégitimes. A partir de ces données nul n’a le droit d’investir l’État du droit de porter atteinte aux droits naturels (nous avons précisé ce que signifiait cette expression) des individus. En conséquence, un État ne saurait avoir de légitimité qu’auprès de ceux qui l’acceptent individuellement et, bien sûr, de leur plein gré. L’impôt sous toutes ses formes (voir le feu d’artifice fiscal ou feu artifiscal) est illégitime s’il est payé par ceux qui ne l’acceptent pas. L’impôt perd son caractère obligatoire et étatique pour ceux qui l’acceptent librement et pour des raisons qui peuvent varier (et grandement) d’un contribuable volontaire à l’autre. Et allez faire un tour du côté du panarchisme, vous y respirerez l’air du large, loin des odeurs rances des cagibis du socialisme. 

 

 

L’anarcho-capitalisme s’est formé progressivement – et il continue à s’enrichir jour après jour, avec ces personnalités souvent brillantes. La notion d’anarcho-capitalisme remonte au XIXe siècle, avec la publication en 1849 de « De la production de la sécurité » de Gustave de Molinari. Le terme lui-même a été formalisé par Murray N. Rothbard vers 1950 afin de donner plus de cohérence à sa démarche. Il repoussait le socialisme, radicalement, et il devint un anarchiste de la propriété privée, un anarcho-capitaliste – on pourrait évoquer un anarchiste de marché, afin de le distancier plus encore de l’État.

Pour les anarcho-capitalistes, c’est très important, la sphère économique et la sphère politique ne se distinguent pas l’une de l’autre. C’est l’État qui opère cette distinction pour des raisons fiscales – de spoliation. La sphère économique est pour l’État ce qu’il vole et la sphère économique est l’activité qu’il promeut aux dépens de ceux qu’il a volés. La sphère personnelle désigne les activités qui lui échappent et qui, dans un pays comme la France, se réduisent à peu de choses. Pour les anarcho-capitalistes, il faut que cessent ces opérations de vol légalisées ; par ailleurs, il faut réduire à rien la sphère politique. Ainsi la distinction sphère économique / sphère personnelle n’aura plus de raison d’être puisque tout échappera au parasitisme fiscal.

Les anarcho-capitalistes se réclament de la tradition de l’École classique (figure de proue, Frédéric Bastiat) et de l’École autrichienne d’économie (figure de proue, Ludwig von Mises). Dans leur héritage figurent également Gustave de Molinari (successeur de Frédéric Bastiat) et Murray N. Rothbard (successeur de Ludwig von Mises), des libéraux radicaux puisqu’ils ont refusé la moindre parcelle de légitimité à l’État.

A propos de Ludwig von Mises, j’ai publié sur ce blog un article intitulé « Ludwig von Mises et le polylogisme des marxistes » :

https://zakhor-online.com/?p=16142

L’anarcho-capitalisme s’appuie sur le capitalisme et le volontarisme. Capitalisme car il revendique une vie où chaque homme est propriétaire à part entière de lui-même, du produit de son travail, de ce qu’il a obtenu de la coopération volontaire d’un autre homme, par l’échange ou le don. Tout homme est comptable de ses actes, tenu par ses engagements, responsable de ses pertes (et entièrement propriétaire de ses profits), débiteur des torts qu’il a causés à un tiers non consentant. Le capital appartient à celui qui l’a créé. La mise en commun du capital, la répartition des tâches et des responsabilités ainsi que l’échange de services sont des moyens d’augmenter la production personnelle de chacun des participants, une participation volontariste car basée sur une décision libre. Le caractère volontaire de cette coopération en garantit sa légitimité et son caractère bénéfique pour tous sans exception.

Autres spécificités des anarcho-capitalistes, leur individualisme ontologique par lequel ils se rapprochent des libéraux, dont les minarchistes. Les anarcho-capitalistes se rapprochent des anarchistes-socialistes dans leur critique de l’État mais ils rejettent catégoriquement le collectivisme libertaire, l’une des tendances de l’anarchisme qui, selon eux, conduit à recréer l’État sous d’autres appellations.

Le capitalisme de l’anarcho-capitalisme est un système d’échange entre individus ayant passé un accord ou entre organisations volontaires, une entreprise étant envisagée comme un ensemble de contrats. L’anarcho-capitalisme ne refuse pas les communautés socialistes, avec propriété collective, aussi longtemps que leurs membres s’y sont intégrés sur la base du volontarisme, en toute liberté donc. L’État n’a aucune justification et l’ensemble de ses fonctions doit être confié au secteur privé.   

L’anarchisme des anarcho-capitalistes diffère de celui des anarcho-communistes (ou anarcho-syndicalistes) qui prônent l’abolition totale de la propriété privée, ce qui pour les anarcho-capitalistes est inconcevable.   

 

L’actuelle crise que nous traversons est d’abord sanitaire, le Covid-19 ; mais elle a d’autres origines qui se tiennent derrière cette crise et l’activent en quelque sorte. Tout d’abord le choix de l’endettement. La dette mondiale est devenue gigantesque, elle vient de se creuser brutalement avec cette crise sanitaire, en Europe particulièrement où les taux d’endettement de certains pays, dont la France, dépassent à présent les 100 % du P.I.B., d’où les efforts d’Emmanuel Macron pour mutualiser la dette et, ainsi, faire front au(x) populisme(s) (Laughing out loud ou LOL). Cet endettement permanent et ces dettes himalayesques causeront aux États peu rigoureux (refusant une profonde réforme structurelle avec cure d’amaigrissement) des difficultés à se refinancer, à émettre de la dette dont les taux d’intérêt deviendront prohibitifs. Pour l’heure ces taux flirtent avec le 0 % et les vannes sont ouvertes pour inonder les marchés de liquidités, avec les effets pervers que j’ai signalés dans un précédent article. Mais jusqu’à quand ces bidouillages fonctionneront-ils ? Pas indéfiniment. Face à mon inquiétude, un ami financier me disait que le monde se japonisait. Troisième puissance économique mondiale (voir son P.I.B.), le Japon a une dette qui tend vers les 250 %. Il est vrai qu’elle est essentiellement détenue par les Japonais eux-mêmes, ce qui les protège des attaques du marché mais tout de même…

Les taux d’intérêt « historiquement bas », à taux zéro voire négatifs, permettent aux appareils d’États de se financer à des coûts supportables mais, principal effet pervers (il y en a d’autres), cet argent facile favorise la formation de bulles, ce qu’a fort bien montré Marc Touati dont je recommande les vidéos mises en ligne. Marc Touati a écrit des livres à caractère didactique, rigoureux et d’une lecture agréable même pour un non spécialiste ; parmi ses livres : « Le dictionnaire terrifiant de la dette » et « Un monde de bulles » Ci-joint, son site :

http://www.acdefi.com/

On se refile la patate chaude (autre expression entrée dans le monde de la finance), mais à l’intérieur de cette patate il y a un engin piégé qui fait tictac-tictac, à moins qu’il ne s’agisse d’une grenade dégoupillée, ce qui revient au même… Et ne croyez pas que je force l’image. Je porte cette inquiétude depuis des années et, en toute modestie, je me suis rarement inquiété pour rien sans pour autant me prendre pour un devin.  

 

 

Des bulles partout, Marc Touati a raison. On est comme ces enfants qui s’amusent à faire des bulles avec du savon, l’un de leurs jeux préférés et auquel les adultes reviennent volontiers avec toujours le même émerveillement devant leur formation puis leur envol jusqu’à… pof. Et on recommence. Des sociétés jouent à faire des bulles, toujours plus de bulles, d’autant plus que c’est facile – la solution de facilité. Des bulles partout, les obligations d’État (emprunts d’État), les actions, l’immobilier, l’art, etc., c’est le Everything Bubble. Il est vrai que l’histoire est riche en bulles mais, à présent, elles se multiplient et éclatent à un rythme toujours plus rapide.

On se souvient de cette fièvre spéculative sur les tulipes, une histoire comme sortie d’un rêve, on se souvient de cette première bulle spéculative et de ce premier krach financier documentés, avec un sommet atteint en février 1637. On se souvient d’autres bulles et de leur éclatement. Mais à présent elles enferment tous les secteurs de la vie économique et financière de sociétés considérables et toujours plus interconnectées. On ne peut qu’être saisi d’inquiétude.

Il faudrait prendre un ris puis un autre et, ainsi, réduire la voilure. Mais rien. On navigue toutes voiles dehors – et avec le spinnaker ! – alors que le vent se lève et que l’océan se creuse. Je redoute qu’une voile ne se déchire, pire, que les haubans lâchent et que le voilier ne démâte. Je me rends compte à présent que mon inquiétude face à cet endettement généralisé, à commencer par l’endettement public, est autrement plus grande que celle que j’avais éprouvé par gros temps sur un voilier. On choquait les voiles, on en venait même à ferler la grand-voile, ne gardant que le foc, et le plus petit, un tourmentin, pour maintenir le cap, et on se laissait porter en surfant sur les vagues avec la barre franche. Toutes ces mesures nous calmaient.  A présent j’ai le sentiment d’être à bord d’un navire qui ne réduit pas sa voilure alors que le vent forcit. Et sur quelle île me réfugier ? J’en viens même à éprouver des peurs primordiales comme le maelström (semblable à celui que décrit Allan Edgar Poe dans une nouvelle à laquelle j’ai fait allusion) ou le kraken. Le maelström de la dette, le kraken de la dette…  

 

Mais je reviens sur la terre ferme. Un homme dont j’apprécie les analyses, Jim Grant, notait (son analyse rejoint la mienne qui n’est en rien celle d’un spécialiste) que c’est le crédit facile et le niveau d’endettement (en grande partie lié à ce crédit) qui ont accentué le choc. La crise sanitaire que nous connaissons s’est aggravée du fait d’endettements faramineux – et en retour, elle les augmente. L’Allemagne s’en sort mieux essentiellement parce que la proportion dette publique/P.I.B. tourne autour des 60 % tandis que celle des pays les plus affectés flirte avec les 100 % (la France) ou les a amplement dépassés (l’Italie).

 

 

Je conseille les articles de Jim Grant présentés sur le site Grant’s interest rate observer (Grant’s is an independant, value-oriented and contrary-minded journal of the financial markets). Ce site ouvre sa présentation sur ces mots : « Our editorial mission is to see the present more clearly and to squint into the future more imaginatively. Twenty-four times a year, we strive to uncover good ideas and to expose bad ones » :

https://www.grantspub.com/

Ci-joint un extrait d’un entretien au cours duquel Jim Grant étudie cette question : « Covid-19 Unmasked an Essential Weekness in Finance » :

Mr. Grant, you’ve been observing interest rates and financial markets for almost five decades. What’s your take on the turmoil investors have experienced over the past few weeks?

Such extreme movements – both up and down – in so compressed a period of time have never happened before. But altogether, they are as unprecedented as is the response of our central bankers. So what strikes me most, is the state of things before the pandemic arrived.

 

What do you mean by that?

To be sure, the virus has caused a great deal of chaos, fear and disruption. Yet, it seems to me that the pandemic was not the fundamental cause of some of the financial disturbances we see. Rather, Covid-19 unmasked an essential weakness in American finance which is owed to the past ten years of artificially cheap credit. Of course, no financial system, no matter how conservatively financed, could weather this kind of a shock. But this blow has been especially traumatic in a system in which equity valuations and the quantity of debt, particularly low-grade debt in relation to earnings power, are at or near all-time highs.

 

How did artificially cheap credit weaken the system?

Not only were speculative promotions like Tesla or Virgin Galactic sent into the stratosphere. Very low interest rates and easy access to leverage also sustained the unnatural lives of profitless companies that would otherwise not have been in business. In Europe, there are a lot of zombie companies, and we have many of them in the US, too. For instance, more than a third of the companies in the Russell 2000 index are not showing a profit under accepted accounting principles. Or, what accounts for Uber remaining in business all these years without being profitable? What accounts for the spectacular rise and equally spectacular fall of WeWork? What these companies all have in common is access to capital made much cheaper than it otherwise would have been thanks to the non-stop exertion of Central Banks which gave us zombies and unicorns on both sides of the Atlantic.

 

Then again, without accommodative monetary policy we would likely have experienced a recession already earlier on.

There is an analogy between Central Banks suppressing the symptoms of excess leverage and misallocation in capital and the rise of America’s opioid problem. Some years ago, doctors in the US decided that patients don’t need to be in pain, even though pain is counted as one of the vital signs of human health, along with temperature, respiration, pulse and other things. But if you were admitted to an emergency room or if you had other health troubles, you were immediately asked to characterize your pain on a level of 0 to 10. Sure, you can see the good in the decision by doctors to suppress pain. But you can also see how it led to the oversubscription of very dangerously habit-forming drugs.

 

And where’s the link to monetary policy?

When the stock market pulls back 15 or 20%, we don’t like that pain. It is most uncomfortable, especially in a leveraged economy. So central bankers are lowering rates and letting us know that they would be there to address these difficulties. Investors, of course, absorb this information and decide that investing was actually rather safe because central bankers had their backs. So essentially, central bankers have become Dr. Feelgood. I don’t mean to impugn their motives. They are consciously attempting to keep things on even keel and to maintain employment. However, they are seemingly averse to consider unintended remote consequences of their immediate acts and that is a dangerous thing for people who are investing money.

 

However, one could argue that today’s super low interest rates are due to demographic changes, the rise in global savings and other factors.

Sure, but that doesn’t explain the great disorder in bond markets and the sudden rise in many yields over the past several weeks before Central Banks acted so aggressively. To get back to the point: It seems that the complacency of investors owning securities priced to yield less than the running rate of inflation might be the product of two titanic forces of our time: a) aggressive, unprecedented monetary intervention and b) the prospects of equally aggressive and perhaps equally unprecedented fiscal intervention.

 

Over the past few weeks, the Federal Reserve has dramatically expanded its balance sheet and launched various other emergency measures to prevent a meltdown of the financial system. Wasn’t that the right thing to do?

I believe that the central bankers we are celebrating as the heroic firemen to fight this current financial 6-alarm fire, are actually also the arsonists; unintentionally, to be sure. But through their actions, they have helped to create a structure that is very leveraged and very vulnerable to external shocks. We’ve certainly had that external shock now, and we’re here with still greater interventions and still bigger kitchen sink policy actions.

 

You’ve written several fascinating books on financial history. Was there any episode in the past when Central Banks went to similar extremes?

In the 19th century, there were many bank runs and panics. In England, the panic of 1825 was arguably the most violent of these turmoils. The Bank of England met it like a lion: It lent aggressively and unconventionally, and even extended credit against the collateral of merchandise which was most unorthodox. A few years later, Jeremiah Harman, a long serving director of the Bank of England, testified how he and his colleagues rose to meet the occasion. Here’s what he said about how the Bank of England lent its assistance at that time: «We lent it by every possible means, and in modes that we never had adopted before. And, seeing the dreadful state in which the public were, we rendered every assistance in our power; and we were not upon some occasions over nice.»

 

How does this relate to today’s policy actions?

The Fed certainly is not over nice: But more importantly, it was not over nice during the time of prosperity. That is what’s different: The Fed instituted many unorthodox policies in the past ten years when the country was not in recession. Also, the U.S. Treasury – I guess we should call it the Department of the Debt – was running a trillion-dollar budget deficit before the virus arrived. So to any observer from a generation ago, public policy was in what would have looked like crisis mode during a time of prosperity. Now, we are most unprosperous, and, of course, we are laying it on much bigger than we ever have before. So radical monetary policy begets not a return ultimately to normal market functioning, but rather begets still more radical monetary policy. One does wonder where it all leads.

 

Olivier Ypsilantis

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