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Éléments pour une réponse à Shahpour Sadler,  exilé royaliste perse

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En header, le général Bahram Aryana qui, entre autres grandes idées, eut celle de vouloir remplacer l’alphabet arabe par l’alphabet latin, une manière radicale de congédier l’Arabe. Ci-joint, une notice biographique sur ce grand monsieur. Que sa mémoire soit honorée :

http://www.iranchamber.com/personalities/bariana/bahram_ariana.php

Et un lien avec de nombreuses rubriques : 

http://www.aryana2500.fr/index.html

 

Tout d’abord, permettez-moi de vous saluer et doublement : vous êtes iranien et royaliste. Si vous me lisez, vous saurez que je salue volontiers S.A.I. le prince Reza Cyrus Palhavi, la culture iranienne et le peuple iranien, l’Iran millénaire tout simplement, sans oublier les femmes d’Iran. Je salue également la mémoire du général Bahram Aryana (1906-1986) et celle du philosophe Cyrus Aryamanesh, assassiné le 27 mai 1996. Et pardonnez-moi cette ébauche de lettre un peu désordonnée. L’Iran me rend très bavard et parfois confus, j’en conviens.

Vous m’accusez de ne pas prendre de distance envers mon sujet, soit le livre de Ryszard Kapuściński, « Le Shah ». L’écriture de ce blog suit plusieurs axes ; l’un de ces axes est la recension, soit des comptes-rendus de lectures avec effacement total (ou presque) de celui qui y travaille — moi — au profit exclusif de l’ouvrage présenté. Mon article sur « Le Shah » de Ryszard Kapuściński suit cet axe. Il est vrai que, dans ce cas, je me permets quelques remarques personnelles, j’y reviendrai. Vous écrivez : « Nulle réévaluation critique ou distanciation de votre part » ; c’est précisément en l’occurrence le principe de travail que je me suis posé ; et je l’ai appliqué avec les écrits d’hommes aussi divers que Rudolf Höss, commandant du camp d’Auschwitz ou Rabbi Adin Steinsaltz pour ne citer qu’eux. La recension permet à celui qui s’y livre la plus attentive des lectures et, par ailleurs, elle sait offrir à ceux qui manquent de temps la possibilité de lire un compte-rendu scrupuleux d’un livre souvent dense. C’est un exercice délicat, parfois éprouvant et toujours stimulant.

 

Artur DomoslawskiLa couverture de « Kapuściński Non-Fiction » et son auteur, Artur Domosławski (né en 1967)

 

« Ryszard Kapuściński, l’un des maîtres du journalisme littéraire » ai-je écrit ; je sous-entends que ce qu’il rapporte doit être envisagé sur un mode particulier. Ryszard Kapuściński ne fait pas du journalisme d’investigation. J’admire son style, la puissance visuelle de son écriture (que je ne lis malheureusement pas dans l’original, le polonais) et je suis sensible à sa méthode de travail par petites touches, avec flash-back à la manière d’un cinéaste, avec digressions appuyées par des documents divers (dont de nombreuses photographies). La structure de son présent livre m’intéresse dans la mesure où, bien avant de le connaître, j’avais travaillé à un livre à la structure similaire. Mais je tiens à vous rassurer : en tant qu’historien, je n’accorde pas au livre de Ryszard Kapuściński une place de premier choix, et je fais usage de l’euphémisme. La subjectivité a ses beautés, ses splendeurs même, elle a aussi ses limites. Je sais admirer tout en gardant la tête froide. Et je ne renie pas mes engagements : j’ai écrit souhaiter voir S.A.I. le prince Reza Cyrus Palhavi monter sur le trône d’Iran ; je ne vais donc pas me répandre en diffamations sur son père même si je m’autorise la critique — aucun homme n’étant Dieu — et l’accepte avec plaisir et même gratitude si elle m’aide à progresser. Je le répète, je me suis efforcé de rendre compte d’un livre qui m’intéresse essentiellement par sa structure, sa méthode d’élaboration, bref, par son aspect littéraire. 

A la manière d’un artiste ou d’un romancier, Ryszard Kapuściński cherchait sa vérité par le style — son style. Il pratiquait le journalisme littéraire et reste l’un des maîtres du genre ; tout au moins est-ce ainsi que je le juge. En qu’historien, je me garde de citer Ryszard Kapuściński, vous pouvez me croire.

J’ai lu le livre d’Artur Domosławski (la version anglaise, « Kapuściński Non-Fiction », un titre traduit par l’éditeur français « Kapuściński, le vrai et le plus que vrai », un titre plutôt emphatique). C’est un livre véritablement passionnant. Et rien ne m’autorise à douter du sérieux de cette enquête. Que Ryszard Kapuściński ait été un agent du pouvoir communiste ne m’étonne guère. Pourquoi ? J’ai fait mes études supérieures dans un milieu particulièrement cosmopolite ; parmi les nationalités présentes, des étudiants du Bloc socialiste, dont des Bulgares, en particulier une amie et tout un groupe qui lui était attaché. La Bulgarie était alors gouvernée par Todor Jivkov, le plus pro-soviétique des dirigeants. J’ai appris après la désagrégation de l’Empire soviétique (1989) que plusieurs de ces amis d’études avaient travaillé plus ou moins pour le pouvoir et qu’ils avaient obtenu ce si précieux visa moyennant quelques arrangements… Sans vouloir me présenter comme doué d’une lucidité particulière, je l’avais soupçonné — sans toutefois disposer de preuves formelles. Je voyageais alors dans cette Europe dès que j’en avais la possibilité. J’ai pu y sentir les mécanismes de l’oppression, d’autant mieux que je voyageais seul, sac au dos, loin de tout encadrement. Lorsque j’ai appris par Artur Domosławski que Ryszard Kapuściński avait collaboré avec le régime de son pays, je n’ai été nullement surpris et n’ai pas jeté pour autant l’anathème sur ses écrits. Chacun se débrouille avec ses bagages. Ryszard Kapuściński a probablement agi plus par opportunisme que par conviction, soucieux avant tout de protéger sa liberté de mouvement, dans son cas une liberté vitale. Mon père qui avait le communisme en horreur m’a confessé qu’il aurait peut-être été amené lui aussi à des arrangements s’il avait vécu sous un tel régime. J’ai respecté son honnêteté, sa modestie et sa lucidité.

Je récapitule : les arrangements de Ryszard Kapuściński avec le régime polonais d’alors (post-stalinien, précisons-le tout de même) ne doivent pas être utilisés pour amoindrir la qualité littéraire — artistique — de l’ensemble de son œuvre, une œuvre qui utilise l’histoire comme matière première ou, plus exactement, comme toile de fond.

Je laisse le mot de la fin à Artur Domosławski : « Je préfère placer ses œuvres les plus célèbres, comme « Le Négus » et « Le Shah », sur l’étagère de la littérature » et : « Il ne faut pas l’accuser de mensonges ou de distorsions. Il s’agit de textes dont la matière est réunie de façon journalistique, car Ryszard Kapuściński était fantastiquement informé, mais dont la fabrication repose plus sur un souci d’expérimentation, et non de précision factuelle. » Oui, c’est cela : Ryszard Kapuściński était plus soucieux d’expérimentation que de précision factuelle, et c’est en ce sens qu’il faut comprendre mon expression : « chercheur de vérité », sa vérité — appuyée et véhiculée par une puissante subjectivité.

Vous faites allusion à Fouquier-Tinville, un individu qui, dans mon jugement, rejoint Roland Freisler, le président du Volksgerichtshof. Tout de même, épargnez-moi cette horreur ! J’ai lu il y a peu un livre qui m’a traversé comme une flèche de feu, « Les deux Révolutions françaises » de Guglielmo Ferrero. En quatrième de couverture, on peut lire ce qui suit : « Il n’y a pas eu une, mais deux Révolutions françaises. La première, directement inspirée des Lumières, aura été de type démocratique et libéral. La seconde, plus politique, se révèle désormais à la racine des régimes totalitaires ». J’avais écrit un article dans ce sens bien avant d’avoir lu ce livre (dont je vous recommande la lecture si vous ne l’avez lu) : la (deuxième) Révolution française est bien à la racine des régimes totalitaires. Dans mon esprit, cette étude a laissé loin derrière elle « Reflections on the Revolution in France » d’Edmund Burke.

Je m’intéresse depuis quelque temps aux royalistes perses, parmi lesquels Cyrus Aryamanesh, théoricien du royalisme archéo-perse, un homme pour lequel j’éprouve une profonde sympathie.  Ci-joint, une notice biographique sur ce philosophe que vous connaissez sans doute :

http://www.aryamanesh.org

Je me permets toutefois une réserve. Dans la présentation du lien ci-dessus, il est question d’ayatollah sémitophiles. Je suis européen, très modestement engagé et de diverses manières dans la défense d’sraël. Le mot sémitophiles me dérange en la circonstance pour des raisons que vous comprendrez aisément. Il implique par ailleurs une notion raciale qui me déplaît. Seule m’importe la culture. Pour dire les choses d’une manière imagée, seule m’importe la couleur du cerveau, tandis que celle de la peau m’indiffère, comme m’indiffèrent dans ce cas les gènes. Vous savez que je souhaite de tout cœur l’alliance raisonnée de l’Iran et d’Israël, deux pays qui bien qu’extraordinairement différents ont beaucoup à voir l’un avec l’autre. Vous savez par ailleurs ce que je pense du monde arabo-musulman, un monde culturellement inférieur dont la réduction doit être hâtée par divers procédés. Il est vrai que de ce monde surgissent parfois des individus de grande valeur qui le dénoncent avec une acuité toute particulière ; et ces individus méritent d’être écoutés et respectés.

Ci-joint, un lien I.C.A.S.T. (International Committee Against State Terrorism) avec de nombreuses rubriques. Où l’on retrouve la haute figure de Cyrus Aryamanesh, l’assassiné, l’un des meilleurs disciples de l’école philosophico-doctrinale du général Bahram Aryana :

http://www.terror1979.org/index.html

Ci-joint, quelques liens rendent compte du livre d’Artur Domosławski, « Kapuściński Non-Fiction » :

http://www.theguardian.com/books/2012/aug/02/ryszard-kapuscinski-biography-domoslawski-review

http://www.dissentmagazine.org/article/journalism-and-revolution

http://www.telegraph.co.uk/culture/books/bookreviews/9494622/Ryszard-Kapuscinski-The-Biography-by-Artur-Domoslawski-review.html

http://culture.pl/en/work/ryszard-kapuscinski-a-life-artur-domoslawski

http://www.cerisepress.com/04/11/ryszard-kapuscinski-a-life-by-artur-domoslawski/view-all

 

Olivier Ypsilantis

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