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Réponse à un intervenant, Monsieur M.

 

J’ai reçu il y a peu un courrier assez embrouillé, suite à l’article publié sur ce blog même sous le titre ‟Pensées diverses concernant Israël”. L’intervenant prend soin d’emblée de se positionner au-dessus des antisémites vulgaires, comme s’il y avait un antisémitisme ‟distingué.” L’antisémitisme est vulgaire de bout en bout. Pour une meilleure lecture, les propos de Monsieur M. (appelons-le ainsi) sont signalés en caractères gras.

 

Etoile de David

Restons dans les symboles. On remarquera que ceux qui portent la kippa sont placés à la pointe de chaque branche ; mais aussi à l’intersection des deux triangles équilatéraux qui constituent l’étoile de David. Ils sont donc 6 + 6. Filles et garçons semblent alterner.
 
 
 

Ce qu’on reproche aux Juifs, c’est d’être opportunistes et présents partout : à l’université, dans les tribunaux, les hôpitaux, les grands centres de recherche, la presse, etc. L’antisémite primaire ne se pose pas la question : Sont-ils là parce qu’ils sont juifs ou bien parce qu’ils méritent d’occuper ces places ?

Je trouve bien curieux de se poser une telle question. Beaucoup trouvent une réponse dans les “Protocoles des Sages de Sion”. J’ajoute que ‟antisémite primaire” est un pléonasme.

Aujourd’hui, on pourrait faire la même remarque en ce qui concerne les “Arabes”. En effet, les “Arabes” sont partout : dans les universités, les tribunaux, les hôpitaux, les grands centres de recherche, les syndicats, la presse, etc. Les “Arabes” se plaignent d’être absents de la société… Ils sont de mauvaise foi car on peut dire qu’ils ont mieux réussi que les Juifs, présents en France depuis des siècles. La seule chose que les “Arabes” pourraient reprocher à la République, c’est d’être en France depuis quarante ans et de ne pas avoir encore eu un président de la République issu de leurs rangs.

Je ne vois pas pourquoi Monsieur M. met entre guillemets le mot Arabe car, enfin, les Arabes sont des Arabes. Peut-être veut-il nous signifier que Arabe doit être compris à l’occasion dans un sens générique (???) Les Juifs irriguent la France et toute l’Europe depuis des siècles et des siècles. Moi qui vis en Espagne depuis bientôt vingt ans, je peux en témoigner, malgré leur absence…

Les Arabes sont de plus en plus nombreux en France ; faut-il le déplorer ? Peu sensible aux déclarations du genre ‟Nous sommes tous frères” et n’ayant aucun pote affilié au club des Touche-pas-à-mon-pote, je me tiens loin des mots d’ordre des groupes de pression et je n’hésite pas à dire que je suis toujours plus partisan d’une immigration sélective. Un quota de Musulmans devrait être sévèrement fixé dans l’ensemble des pays européens, au Nord et au Sud, à l’Est et à l’Ouest, au profit d’autres flux migratoires. Par exemple, je souhaite que l’Espagne mette plus l’accent sur l’immigration originaire de son immense aire linguistique plutôt que sur le Maghreb, le Maroc plus particulièrement. L’islam est comme une boue qui colle à présent à nos semelles. Je commence probablement à vous déplaire Monsieur M. mais, voyez-vous, on ne peut passer sa vie à s’employer à ne pas dire un mot plus haut que l’autre et à tortiller du cul.

Les Arabes sont nombreux en France. Je ne sais s’ils sont partout. Ils sont tout de même très peu présents dans les secteurs qui exigent de l’excellence, et loin de moi l’idée de leur supposer une quelconque infériorité, disons génétique. Les choses ne risquent pas de s’améliorer. Une génération sauvage, sans diplôme, candidate au chômage dans un contexte économique de plus en plus difficile, une génération qui navigue entre agressivité et victimisation en prend toujours plus à son aise, encouragée par des médias étrangement complaisants et par des radicaux sur fond d’affrontement planétaire. Cette génération est essentiellement le produit d’une immigration musulmane, arabe et sub-saharienne. Il est pourtant un domaine où les Arabo-musulmans en particulier et les Musulmans en général surpassent tous les autres, la démographie. On pourrait dire que lorsque le Juif affine les outils de l’analyse démographique, le Musulman fait des enfants. Et je ne vous demande pas d’apprécier ce genre d’humour.

J’en reviens à mes collègues antisémites jaloux. La question que je m’étais posée alors, c’est pourquoi les Juifs réussissent mieux que les non-Juifs et pourquoi semblent-ils… plus intelligents. N’est-ce pas ce qu’on leur reproche, leur intelligence ? Est-ce génétique ou culturel ?

Vous avez des collègues antisémites. C’est banal. Évitez toutefois de dire ‟antisémites jaloux”, c’est encore un pléonasme. Il est dommage que vous ne soyez pas plus sensible au sens des mots ! Un antisémite est toujours jaloux, pardonnez mon insistance. Les antisémites ‟distingués” sont les plus pathétiques car ils ont tout de même un peu honte de leur antisémitisme — de leur jalousie— qu’ils s’efforcent de dissimuler de diverses manières. Ils me font penser à ces personnes qu’évoque Jules Renard dans son ‟Journal” et qui toussent pour couvrir le bruit de leurs pets. Elles couvrent le bruit, reste l’odeur…

J’en suis donc arrivé à penser que si les Juifs sont plus ‟intelligents” que nous, c’est à cause de nous ou grâce à nous. Pendant des siècles, les Juifs ont vécu en diaspora. Ils étaient privés de “citoyenneté” et d’État. Ils étaient des sujets tolérés et vivaient chichement des petits métiers qu’ils avaient le droit d’exercer. A petits métiers, petites vies de misère (remarquez que les non-Juifs vivaient également des vies misérables). Mais le Juif, une fois son travail terminé, c’est en tout cas comme ça que j’imagine mon histoire, prenait sa Torah et la commentait, la commentait, la commentait…

Comment débrouiller votre fouillis ? Vous en rajoutez, ce n’est pas possible ! Mais pour cette fois, je vais jouer le jeu. Le passé de diaspora (un passé toujours présent, malgré la re-fondation de l’État d’Israël) a probablement contribué à façonner l’extraordinaire originalité juive. Il ne l’a pas constituée mais il l’a probablement amplifiée. Sur ce point, nous pouvons nous entendre. On peut même se poser la question suivante, sans jamais chercher à remettre en question ce qui constitue le socle de la vie juive : que serait aujourd’hui le peuple juif s’il n’avait jamais vécu en diaspora ? Il n’y a pas de réponse totale à une question aussi massive mais on peut s’interroger afin d’initier une vaste rêverie, pour le simple plaisir de la rêverie. Le philosophe Alain a une réflexion (citée dans un précédent article) qui me paraît de plus en plus pertinente : “Selon mon opinion, la puissance de réussir, si commune chez les Juifs, vient d’une opinion métaphysique selon laquelle on n’est pas au monde pour s’amuser.” Vous pouvez la développer si vous le désirez.

Votre portrait du passé juif est simpliste. Petits métiers et petites vies de misère ? Certes, vous avez raison de ne pas associer frénétiquement ‟Juif” et ‟argent”, comme le font ces antisémites dont les réflexes pavloviens tiennent lieu de pensée et qui imaginent que tout Juif cache de l’or. Vous n’ignorez pas que les fosses des Einsatzgruppen ont été souvent fouillées par des chercheurs d’or, en Ukraine particulièrement. A ce propos, je vous conseille la lecture de ‟Porteur de mémoires : sur les traces de la Shoah par balles” du père Patrick Desbois. Mais il ne faudrait pas non plus voir le Juif en diaspora comme un petit miséreux et rien qu’un petit miséreux. Ne tombez pas dans le cliché ! Dans un premier temps, je vous conseillerais d’étudier l’histoire de la prestigieuse communauté séfarade. Vous trouverez une mine d’informations auprès de Maurice-Ruben Hayoun, un homme particulièrement intéressant puisque son regard enveloppe avec une même pertinence le monde ashkénaze et le monde séfarade.

Le peuple juif a survécu grâce au livre fondateur du judaïsme, la Torah. Le Juif est intimement associé au livre, vous avez raison. Le judaïsme rabbinique, héritier des Pharisiens, a porté le judaïsme bien vivant jusqu’à nous ; et, à ce propos, il me semble que ce n’est pas un hasard si ces derniers ont été particulièrement visés par les foudres de l’Église. Je ne suis qu’un tout petit connaisseur de la Torah, ce livre au cœur du judaïsme, mais je puis vous assurer que ce que j’y entrevois est d’une vertigineuse richesse. Le mot Torah recouvre une immensité.

Pendant deux mille ans, et plus, le Juif n’a eu qu’un seul livre. Le connaissant par cœur, pour donner du sel à sa lecture, il lui cherchait des sens nouveaux, le dit et le non-dit ! Récitant et commentant la Torah, au lieu de se faire du muscle à la guerre ou dans les champs, il a développé son cerveau à force de disputations rabbiniques. Ce n’est quand même pas par hasard que la psychanalyse est née dans une tête juive.

‟Pendant deux mille ans, et plus, le Juif n’a eu qu’un seul livre”, écrivez-vous avec un air probablement satisfait. Tout d’abord, permettez-moi de vous redire qu’un livre tel que la Torah (de fait un ensemble de livres qui occupent chacun plusieurs mètres linéaires) est si vaste qu’une vie humaine ne saurait en épuiser la lecture. Nous n’avons pas affaire au ‟Petit Livre rouge” du président Mao Tsetoung ou au ‟Livre vert” du colonel Kadhafi, ni même au Coran, un livre relativement frustre à l’usage des masses. Mais je crois que nous sommes d’accord sur ce point. Par contre, étudiez un peu mieux la vie juive en diaspora et vous aurez vite fait de comprendre que si la Torah était au cœur de la vie du peuple juif en diaspora, de nombreux Juifs ont compulsé bien d’autres livres. Vous avez probablement entendu parler de l’École de traducteurs de Tolède. Et je pourrais multiplier les exemples.

Vous savez aussi bien que moi pourquoi les Juifs ont été longtemps si peu présents dans le monde des armes et de l’agriculture. Je ne vais pas vous donnez des cours d’histoire élémentaire. Je me permets toutefois de vous signaler que Rachi de Troyes, l’un des plus prestigieux commentateurs de la Bible et du Talmud, était probablement vigneron. Quant aux armes, étudiez un peu mieux l’histoire des diasporas et vous serez surpris. Vous m’accorderez qu’avec la re-fondation de l’État d’Israël, les Juifs ont constitué les meilleures unités combattantes du monde, sur terre, sur mer et dans les airs. Et souvenez-vous des Maccabées qui mirent à genoux la puissante dynastie des Séleucides. Faudra-t-il que je vous évoque les quelques centaines de combattants du ghetto de Varsovie qui résistèrent pendant un mois aux deux mille soldats du général Jürgen Stroop, appuyés par l’artillerie et les blindés ? Les nazis pensaient en finir en trois jours.

En France, pendant ce temps, alors que le Juif allait passer le temps d’une guerre pour comprendre le sens d’un mot et analyser une phrase, nous, on allait joyeusement guerroyer. La guerre finie, on rentrait au pays pour accrocher dans nos églises les drapeaux ennemis au cours de grandes cérémonies religieuses où retentissaient d’éclatants Te Deum devant le peuple en liesse. C’était magnifique ! Pendant ce temps, les Juifs commentaient la Torah… En conclusion, je dirais que les Juifs nous doivent leur intelligence.

A quelles époques faites-vous donc allusion ? Aux époques médiévales je suppose. La religion dominante confinait les Juifs qui auraient su manier les armes aussi bien que les Chrétiens s’ils l’avaient pu. Quand enfin ils l’ont pu, quand ils ont été eux aussi enrôlés dans les armées de la République, vous conviendrez qu’ils ont été, soldats et officiers, dignes de leurs frères d’armes. Lisez les noms inscrits sur les monuments aux morts de la Grande Guerre ou sur les registres de la grande chancellerie de la Légion d’honneur. Souvenez-vous du capitaine Marc Bloch, du lieutenant Nissim de Camondo et de tant d’autres, moins connus.

Votre histoire de Te Deum fait revenir des souvenirs particulièrement émouvants, la journée du 25 août 1994, à Paris qui célébrait le 50ème anniversaire de sa Libération. Je me souviens tout particulièrement de la cérémonie en la cathédrale Notre-Dame, grand messe célébrée par le cardinal Aron Jean-Marie Lustiger, avec discours de Monsieur Maurice Schumann, Te Deum (qui avait retenti lorsque le général de Gaulle était entré dans cette même cathédrale, le 25 août 1944) et sonnerie aux morts. Les Anciens de la 2ème D.B. étaient nombreux dans l’assemblée. Ils portaient leurs décorations et le béret (ou le calot) de leur régiment. Sur leurs badges, de nombreux patronymes juifs.

Vous écrivez en conclusion que les Juifs nous doivent leur intelligence. Ils ne vous diront pas le contraire, ils n’ont jamais dit le contraire. Ils ne flottent pas dans une bulle détachée de tout. Tous doivent à tous, Juifs ou non-Juifs, c’est ce que la Torah ne cesse d’enseigner, c’est ce que les plus grands nous enseignent. Avez-vous lu Emmanuel Levinas et Edmond Jabès ? Permettez-moi d’ajouter que cette richesse ‟qu’ils nous doivent”, ils nous l’offrent, et considérablement augmentée.

Mais j’y pense… c’est en partie à vous que je dois cet article, Monsieur M. ! Je vous dois donc des remerciements. Et vous me pardonnerez, je l’espère, ce ton parfois hautain.

2 thoughts on “Réponse à un intervenant, Monsieur M.”

  1. Il a bien de la chance cet antisémite distingué de recevoir une réponse aussi percutante que celle-ci! J’avoue que je n’aurai même pas donné suite. Ces gens la me font vomir.
    Vous êtes quelqu’un d’optimiste, c’est bien ainsi car il y a peut être une chance que ce monsieur suive l’injonction du Talmud “Sors et apprends,” Sors de tes préjugés et de ta suffisance et ouvre-toi au monde” ! Peut-être une chance…

  2. Quelle réponse ! Il ne la méritait pas mais nous, oui.
    J’ajouterais que, puisque vous vivez en Espagne, vous avez dû vous pencher sur l’excellence des soldats juifs de la période dites “des trois religions”. Je n’ai pas votre mémoire mais il me semble avoir lu ça dans Poliakov.

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