If taxes and government spending are both slashed, then the salutary result will be to lower the parasitic burden of government taxes and spending upon the productive activities of the private sector. Murray N. Rothbard
Et si nous confinions les pouvoirs publics et laissions les acteurs économiques, à commencer par les entreprises (et peu importe leur taille), se débrouiller et faire tourner l’économie, sans la moindre contrainte étatique, en France surtout où l’État étouffe tout ce qui n’est pas lui et s’étouffe lui-même sous l’effet de son propre poids. Les finances de la France ne lui ont pas permis de gérer correctement ou, disons, plus correctement, cette pandémie. Les pays qui l’ont le mieux gérée sont les pays aux finances relativement saines, soit des pays qui ne portent pas dans leur havresac un poids insupportable de dettes qui les fait trébucher à chaque pas. On n’a pas assez insisté sur ce fait. L’État français n’a pas ménagé ses efforts et peut-être même en a-t-il trop fait. L’interventionnisme politique est le signe d’un échec même si les pouvoirs publics répètent qu’ils nous ont évité le pire. Mais nous a-t-on laissé le choix ? Non ! Cette dette colossale, et avant même la pandémie, est le fait de l’État, d’un État qui n’a cessé de multiplier les impôts et les réglementations, des réglementations et des impôts qu’il faudrait dans leur quasi-totalité envoyer à la décharge publique. Ceux qui entreprennent ne devraient pas être tracassés.
Je crois plus au laisser-faire qu’à l’étatisme ; mais l’État est devenu comme une drogue et bien peu imaginent s’en passer ou, tout au moins, le voir occuper l’arrière-plan plutôt que le devant de la scène. Et je redoute qu’avec cette crise il ne bouscule tous les autres acteurs non seulement pour garder le premier rôle mais tenir tous les rôles. L’État multiplie les largesses alors que les caisses sont vides en dépit d’une fiscalité omniprésente. Mais qu’est-ce que la dette sinon des impôts à venir, un stock d’impôts qui n’a pas encore été levé mais qui le sera, d’une manière ou d’une autre. La dette est le stockage année après année des déficits budgétaires, des déficits qu’on dissolvait dans l’inflation avec les conséquences néfastes pour l’épargne et, en conséquence, pour le budget de l’État. Le dernier budget en équilibre de la France remonte à 1974 ; depuis, le déséquilibre n’a cessé de s’accentuer. Quand va-t-on se mettre à réduire sérieusement les dépenses publiques ? Réduire sérieusement, soit entreprendre des changements de structure de l’édifice État et non pas simplement ravaler sa façade pour faire illusion. Car il est temps d’alléger cette construction qui n’a cessé de recevoir à tout-va des aménagements supplémentaires, un surpoids qui menace sa structure même. L’État s’enivre d’emprunts et d’autant plus que les taux (d’intérêt) sont « historiquement bas » comme on le répète à l’envi. Et il nous invite à nous enivrer en sa compagnie ; plus exactement, il nous oblige à nous enivrer en sa compagnie. J’observe depuis des années ce phénomène, je m’en inquiète ; j’en parle à des spécialistes depuis des décennies. La dette va nous péter à la gueule, à moins que nous ne finissions tout bonnement asphyxiés sous son poids qui finit par se confondre avec celui de l’État. Je ne force pas la note.
Avec cette crise, les montants et les pourcentages qui nous sont communiqués, l’inquiétude commence pourtant à s’installer, je vais donc me sentir moins seul. Emmanuel Macron qui ne cesse de boire ses propres paroles et qui se saoule de sa propre élocution ne cesse de réclamer la mutualisation de la dette. Il me fait honte. Il m’a fait honte dès le début de son quinquennat, lorsqu’il donnait des leçons à certains pays d’Europe qu’il déclarait menacés par le populisme (voir la Pologne ou la Hongrie) ; et à présent, il demande la mutualisation de la dette pour barrer la route au(x) populisme(s). Il n’a plus que ces mots à la bouche, mutualisation et populisme(s). Il agite ces mots fourre-tout (comme le sont devenus tant d’autres mots pour cause d’usage inconsidéré), soit des mots informes. Angela Merkel a gentiment repoussé la demande de ce partenaire quelque peu collant, et j’en suis fort aise. Il est temps de se reprendre.
Je redoute que cette marée taxations-subventions/taxations-subventions ne reprenne de plus belle. Il faut moins de taxations et moins de subventions, ce qui suppose, j’y reviens, une restructuration totale de l’édifice État et non un simple ravalement.
Le « jour de libération fiscale » est le jour où le salarié cesse de travailler pour l’État en tant que contribuable. Ce jour représente la suspension temporaire de l’esclavage fiscal, un esclavage qui en France occupe plus qu’ailleurs. Et je ne fais pas usage du mot esclavage à la légère. Un esclave est quelqu’un qui travaille sous la contrainte au profit de ses maîtres qui dans le meilleur des cas lui fournissent de quoi vivre pour qu’il continue à travailler pour eux. Les partisans de l’esclavage fiscal rétorqueront que l’impôt est légitime car on doit payer pour tous les bienfaits que l’État sait prodiguer à ses citoyens. Mais ils oublient que l’impôt est imposé, qu’il est le fait exclusif de la contrainte ; et qu’il soit légal ne signifie en rien qu’il soit légitime et, dirais-je, moral. L’État a le monopole de la contrainte légale, il ne faudrait donc pas en rajouter. De plus, en la matière, confondre légal et légitime revient à placer le signe = entre l’un et l’autre, ce qui est un comble ! Ce monopole permet à l’État de réduire et maintenir les citoyens en esclavage. Ces citoyens peuvent être comparés aux Hilotes, cette population de Laconie et de Messénie assujettie à Sparte et qui la faisaient vivre. Avant de vivre pour lui, le citoyen fait vivre l’État. Il est comme un galérien sur son banc de nage. Les contribuables sont la chiourme, la galère et les gardes-chiourmes sont l’État.
C’est donc cette position de monopole qui permet à l’État d’imposer l’impôt par la contrainte légale. De ce point de vue, il y a donc une différence radicale entre l’impôt (présenté comme le prix des biens publics) et les prix du marché qui, eux, sont déterminés par la libre volonté des citoyens. L’échange libre suppose pour les uns et les autres l’accroissement de leur bien-être. Il n’en va pas de même pour l’impôt et les dépenses publiques sur lesquels l’immense majorité des contribuables n’a aucun droit de regard. L’impôt n’est donc pas démocratiquement voté. Il est voté par des représentants, des membres de l’appareil d’État (des gardes-chiourmes) qui bénéficiant de pouvoirs discrétionnaires prennent des décisions à l’insu des citoyens-assujettis (à l’impôt). Par ailleurs, nombre de citoyens sont exemptés de l’impôt sur le revenu, ce qui permet à l’État d’éviter une révolte fiscale généralisée des esclaves fiscaux. La solution, en France tout au moins : réduire son travail, ses revenus donc, et son épargne, ses investissements – ou bien partir. Il me semble qu’il y a une étroite corrélation, en France tout au moins (le cas de l’Espagne est différent), entre le taux de chômage élevé, une croissance relativement faible, et une fiscalité que j’ose désigner comme confiscatoire. La France pourrait devenir un grand pays si elle ne forçait pas à l’exil de très nombreux talents et capitaux. J’en suis convaincu. Une grande réforme fiscale boosterait ce pays. Cette réforme qui est une exigence économique et qui favoriserait tout le monde répondrait par ailleurs à une exigence morale : elle mettrait fin à l’esclavage fiscal.
Je reste convaincu que la croissance de l’appareil d’État (que finance le crédit, la dette donc) est en proportion des maux dont souffre la France. L’emprise de l’État sur l’économie nationale est un sujet dont on débat depuis longtemps et dont on débattra encore longtemps.
Bien que sympathisant anarcho-capitaliste, j’étudie les socialismes et ne les considère pas comme autant de démons ; et dans la galerie de mes admirations, les socialistes ne manquent pas. Je ne me sens pas idéologue. J’ai des inclinaisons qui n’hésitent pas à s’auto-corriger. Mon chemin est sinueux. Depuis mon plus jeune âge je me suis souvent retrouvé, et discrètement, dans des chemins de traverse, des chemins peu empruntés. Je ne prétends pas pour autant à l’originalité, mais c’est ainsi, je me retrouve généralement seul ou en comité très réduit, ce qui me convient.
Mais j’en reviens au poids de l’État. J’ai l’intime conviction ou, plus exactement, l’intuition que le poids de l’État porte préjudice à l’économie et qu’en conséquence réduire son poids reviendrait à la favoriser et pour le bien de tous. Au hasard d’une promenade Internet, j’ai trouvé cet article de Charles Gave qui à partir de l’exemple éloquent du Canada sous le gouvernement de Jean Chrétien et son ministre des Finances Paul Martin apporte un élément de réponse à un certain questionnement :
https://www.contrepoints.org/2012/12/23/109070-etat-obese-et-croissance-economique
Il y a en France, en France plus que partout ailleurs, une tendance plutôt féroce à vouloir vivre de l’impôt. Autrement dit des groupes sociaux-culturels variés, et ne parlons pas des membres de l’appareil d’État, vivent et espèrent vivre encore longtemps de la manne fiscale. Il y a peu, j’ai lu « Philosophie de l’impôt » de Philippe Nemo (né en 1949), un philosophe libéral, un animal plutôt rare en France et peut-être en voie d’extinction. Ce livre écrit par un libéral affirmé, radical même, serait détruit en autodafé si les temps le permettaient ; mais il a été discrètement mis au placard par le grand silence qui a accompagné sa parution, ce qui est une manière d’autodafé. Les titres de ses œuvres suffisent à me mettre l’eau à la bouche.
C’est chez les libéraux que je décèle le plus d’intelligence économique, sociale, politique et tout simplement humaine. Le socialisme finit toujours par sentir la caserne avec ses tracasseries. Philippe Nemo (que je ne connais que par ce livre, je le redis) a été fortement influencé par Friedrich Hayek, théoricien social et penseur politique dont je n’ai rien lu, à ma grande honte, et que je ne connais que par des articles à son sujet. Mais je me baignerai dans les écrits de ces grands penseurs de l’École autrichienne d’économie, dont Friedrich Hayek, dans leurs eaux fraîches et limpides qui stimulent les esprits et les corps navrés par les moiteurs des socialismes.
Un excellent ouvrage qui offre une vue panoramique sur l’École autrichienne d’économie : « L’École autrichienne d’économie » de Renaud Fillieule que l’éditeur (Presses Universitaires du Septentrion) présente de la sorte :
« Cet ouvrage offre une présentation synthétique des concepts et des théories de l’une des principales écoles de pensée hétérodoxes en économie, l’École autrichienne. Fondée à la fin du XIXe siècle lors de la révolution néo-classique et développée par certains des plus grands théoriciens du XXe siècle, elle connaît aujourd’hui un regain d’intérêt de par son explication monétaire de la crise des subprimes et sa critique des politiques gouvernementales qui sont appliquées pour la combattre. L’École autrichienne constitue un paradigme à part entière, qui aborde avec ses propres concepts et dans un cadre théorique spécifique tous les grands thèmes de l’analyse économique, depuis la notion de valeur jusqu’aux effets des interventions de l’État, en passant par la formation des prix de marché, la nature du processus concurrentiel, les lois de la production, les phénomènes monétaires et les cycles d’affaires. Les théoriciens de l’École autrichienne présentent aussi l’une des défenses les plus cohérentes et les plus solides du libéralisme économique. Le contenu de cet ouvrage intéressera principalement les étudiants en économie, et plus généralement en sciences sociales, qui cherchent une présentation approfondie, rigoureuse et néanmoins non mathématisée des fondements de l’analyse économique. »
Et j’en reviens au livre de Philippe Nemo, « Philosophie de l’impôt ». On y trouvera notamment une explication quant aux prélèvements obligatoires en France, un record mondial. On découvrira comment l’État a réussi à engourdir voire anesthésier le contribuable afin de se livrer à la « nouvelle cleptomanie d’État », développée depuis 1945. L’État ne fait pas seulement les poches des « riches » – mais, une fois encore, cette question : où commence le riche ? Car le riche n’est pas un absolu mais un absolument relatif : est riche celui qui est plus riche (ou moins pauvre) que moi. Pour redistribuer, l’État fait aussi les poches des « pauvres ». Même questionnement que pour le riche : où commence le pauvre ? Nous sommes dans l’absolument relatif : est pauvre celui qui est moins riche (ou plus pauvre) que moi. L’État fait donc les poches de tous, notamment par la TVA et les prélèvements sociaux – ses plus importantes sources de revenus. Philippe Nemo (on pourrait sans peine constituer un recueil d’aphorismes et de maximes à partir de ses écrits, une remarque que j’ai faite à propos de Frédéric Bastiat) : « L’imposition ostensible des riches sert à détourner l’attention des pauvres pendant qu’on leur fait les poches. »
Olivier Ypsilantis