Une amie m’écrit au sujet de l’article « Quelques considérations géopolitiques » publié sur ce blog le 22 décembre 2015 :
« Olivier, il y a un point que tu ne traites pas. Le danger de l’Iran concernant Israël serait-il une « idée fixe » des responsables politiques israéliens ? Pourquoi Benyamin Netanyahou serait-il allé plusieurs fois aux USA pour parler avec véhémence de ce danger pour son pays ? Comment expliques-tu les craintes d’Israël ? Et as-tu une idée (même toute petite) sur ce qui pourrait débloquer la situation entre ces deux pays ? Car effectivement les Iraniens c’est autre chose que les Bédouins ! »
Ma réponse :
Chère C., je comprends tes interrogations, tes inquiétudes. En fait, tout est à la fois simple et compliqué. Mon intérêt pour l’Iran ne porte en rien préjudice à Israël, pays à l’histoire unique, énigmatique. A ce propos, mon sionisme sera qualifié par beaucoup d’extrême puisque je suis partisan de l’application du Plan de paix Elon, pour le bien de tous, tant des Juifs d’Israël que des « Palestiniens ». A ce sujet, question lexicale, il n’y a pas de « Cisjordanie » ou de « Territoires occupés », il y a la Judée-Samarie ; de même, il n’y a pas de « Palestiniens » au sens courant du terme, à moins qu’on ne considère qu’il désigne les Juifs de la région. Et c’est bien dans ce sens qu’en faisaient spontanément usage les voyageurs avant la création de l’État d’Israël.
Je ne suis pas un pacifiste ; l’homme de paix n’est pas un pacifiste et peut s’il le faut se convertir en homme de guerre… pour la paix. Le pacifisme — cette idéologie — est responsable des pires désastres. N’oublions pas qu’en France nombre de pacifistes (ils étaient généralement diversement de gauche) ont terminé dans le lit des nazis après avoir fait leur lit… Je suis pour un Israël puissant, pourvu d’une armée capable de décourager ceux qui rêvent de le détruire.
Benyamin Netanyahou aime son pays et cherche à le protéger, à le fortifier, ce qui est bien le plus important. Je n’ai pas à le juger. Je ne sais s’il en « rajoute » sur le danger iranien pour cause de politique intérieure et de manœuvres électorales. Je ne suis pas assez fin connaisseur de la politique intérieure du pays et je ne pratique pas l’hébreu. Je préfère donc me taire. Je pourrais te parler pendant des heures et avec une certaine assurance de la politique intérieure espagnole, puisque je vis dans ce pays et lis régulièrement sa presse, mais discourir sur la politique intérieure israélienne comme le font trop d’ignares, non ! Je n’en ai pas les compétences. Je suis parfois tenté de dire que Benyamin Netanyahou en « rajoute » à l’occasion, suivant un schéma bien connu, soit pousser de côté des questions de politique intérieure en désignant impérativement un danger extérieur ; mais je me reprends aussitôt car, vraiment, je le redis, ma connaissance de la politique intérieure israélienne manque de profondeur.
Le dessin de Mana Neyestani (publié dans l’article intitulé « Quelques considérations géopolitiques ») m’a sauté aux yeux tant il traduit ce que j’éprouve, fort d’une expérience certes limitée mais que je ne puis pas pour autant me décider à mettre au placard. Et, je me répète, je ne suis pas un suppôt du régime de Téhéran. Israël doit fortifier sa défense avec une détermination infaillible.
Je vais mettre les points sur les i, fort de mon expérience. Les Arabes n’aiment pas les Juifs et détestent plus ou moins ouvertement Israël. Cette affirmation ne relève pas d’une grossière généralisation, c’est ainsi. Le Juif et Israël taraudent l’Arabe qui n’hésitera pourtant pas à minauder Israël s’il juge qu’il peut lui être utile ; et il reprendra sa diatribe et ses violences sitôt qu’il jugera que le danger (l’Iran en l’occurrence) s’est éloigné. Le sentiment de frustration que porte l’Arabe face au Juif et Israël relève véritablement de la psychanalyse voire de la psychiatrie. Mais à ce degré, l’Arabe doit être son propre psychanalyste, son propre psychiatre. L’Iranien quant à lui ne traîne pas de telles névroses. Les Juifs et Israël disposent d’un espace mental autrement plus vaste avec les Iraniens qu’avec les Arabes et je suis certain qu’ils le pressentent malgré leurs inquiétudes. Léon Pinsker juge que l’antisémitisme est une maladie stricto sensu ; je partage pleinement ce jugement.
Je me permets de donner voix à mes intuitions et redire que je ne crois pas à une guerre entre Israël et l’Iran, ni même à une attaque préventive israélienne — à laquelle s’opposent un nombre non négligeable de hauts responsables israéliens. On s’en tiendra à de « mystérieux » assassinats, à de « mystérieux » accidents, à une guerre de l’ombre, de relativement basse intensité donc.
Dois-je te dire que j’apprécie l’action du graphiste israélien Ronny Edry que je place au-dessus du gogo, du pacifiste de base, du pote-à-tout-le-monde ? Mais écoutez-le :
https://www.youtube.com/watch?v=6Lp-NMaU0r8
Je ne suis en rien un spécialiste de la question iranienne. Je me contente de prendre note de certaines impressions. Je sais que les relations entre Israël et l’Iran ne sont pas marquées du sceau de la destruction et de la mort. Il faut aussi et d’abord donner voix aux peuples — ce que fait Ronny Edry — et ne pas s’en tenir aux dirigeants qui passent autrement plus vite que les peuples.
J’insiste. Les Israéliens n’ont vraiment rien à faire du côté des Arabes même si certains de leurs dirigeants leur font les yeux doux — pour cause de danger iranien et plus généralement chiite. Il n’en reste pas moins que le rêve ultime de l’Arabe est la réduction des Juifs à la dhimmitude (voire leur égorgement) et l’anéantissement d’Israël. Rien de tel avec les Iraniens. On me mettra en garde, on me dira que ces derniers sont particulièrement rusés et que leur pouvoir de dissimulation est parfait. Il est vrai qu’ils sont meilleurs joueurs d’échecs que les Arabes, plus fins diplomates, plus versés dans l’étude et la connaissance. Il me semble qu’ils ont au moins un peu à voir les Juifs…
Je suis certain qu’il va se passer de grandes choses entre l’Iran et Israël. Il ne s’agit pas de baisser la garde, de se faire pacifiste béat (je t’ai dit ce que je pensais des pacifistes et du pacifisme), il s’agit de ne pas se fermer aux intuitions nourries par l’histoire, loin du tintamarre médiatique qui encage des esprits après les avoir éreintés. Non, l’avenir de l’Iran et d’Israël n’est pas la guerre et l’apocalypse nucléaire ! Patience ! Il va se passer de grandes choses ! Les relations entre l’Iran et Israël désignent un espace considérable, infiniment supérieur à celui que propose la stabulation et la rumination arabes.
Ma réponse reprend des idées énoncées dans des articles publiés sur ce blog même dont l’article en lien ci-dessous dans lequel je cède en quelque sorte la parole à Antoine Sfeir, auteur de « L’islam contre l’islam » sous-titré « L’interminable guerre des sunnites et des chiites » et dont je te conseille la lecture :
http://zakhor-online.com/?paged=3
Concernant une possible attaque contre l’Iran, je te mets en lien un article extrait d’un site, « Le Saker francophone », et signé George Friedman dont les conclusions peuvent être discutées. En fait, il s’agit plus d’hypothèses que de conclusions, c’est pourquoi il me paraît si intéressant. Il ne se perd pas dans les détails techniques (où personne ne s’y retrouve hormis les spécialistes) sans pour autant les négliger. J’en apprécie la tonalité. Ci-joint l’article ; et si tu es anglophone, l’original publié dans « Stratfor Global Intelligence » :
http://lesakerfrancophone.net/israel-pourquoi-lattaque-sur-le-nucleaire-iranien-na-pas-eu-lieu/
https://www.stratfor.com/weekly/israel-case-against-attacking-iran
Olivier Ypsilantis