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Voyage en Eretz Israël. Février-mars 2012

 

Lorsque j’ai séjourné à Jérusalem, en ce début d’année 2012, je n’ai pas éprouvé l’envie de me rendre sur les lieux saints, qu’ils soient juifs, chrétiens ou musulmans. Je me suis toutefois rendu sur la tombe du roi David, avec mon fils qui porte ce nom. Et j’ai observé les femmes et les hommes en prière devant le Mur des Lamentations.

 

Jérusalem. Juifs religieux en tenue de pluie. Mars 2012. 

 

 

J’ai visité Jérusalem dans des brumes épaisses le matin et sous des averses le soir. J’ai marché du côté de la gare routière et de la gare ferroviaire, une vieille habitude de voyageur — peu de lieux permettent de mieux étudier une population, avec ce va et vient, avec ces incessants départs et arrivées. Et je me suis souvenu de ces heures passées dans la gare de Belgrade alors capitale de la Yougoslavie. Je n’avais jamais observé une telle diversité en Europe, dans un même pays. Mais je reviens à Jérusalem.

 

Des brumes humides recouvrent la ville. J’observe les passagers dans l’autobus qui me conduit de Jérusalem-centre à Yad Vashem, un trajet assez long avec ces embouteillages dus à des travaux de voirie. Je ne m’impatiente pas, j’observe. On consulte laptops, iPhones et iPads ; on lit aussi, des livres brochés et même un livre relié. Parmi les lecteurs, un Juif avec kippa et une jeune femme au type slave. De nombreux visages plutôt ronds aux pommettes saillantes, aux yeux clairs légèrement étirés et au teint très pâle me laissent deviner des Slaves. Ces visages me font basculer dans le souvenir, dans d’autres voyages, en U.R.S.S., en Europe orientale et de l’autre côté du Rideau de fer.

 

Je les observe. Avec ce ciel bas, je me revois en Europe centrale et orientale, dans cette Europe que j’ai parcourue en tous sens et sac au dos, lorsque j’étais étudiant. Je les observe. Il y a dans la foule israélienne comme un sentiment d’égalité, un sentiment auquel contribuent probablement, et pour une large part, ces années de service militaire qui concernent pareillement les femmes et les hommes.

 

Jérusalem. Les pains d’Israël ! Mars 2012. J’ai marché vers le tombeau de David en dégustant l’un de ces pains dorés présentés dans un coin de l’étal. Je ne suis pas prêt d’en oublier le moelleux. 

 

Tout en les observant devant leurs laptops et leurs iPads, je pense à l’excellence de la high tech israélienne et au grand nombre de ses star-up, à cette intelligence et à cette énergie qui permettent à ce pays grand comme deux départements français d’exister encore. Disons-le, Israël face au monde arabo-musulman, face à des masses hostiles toujours augmentées, c’est un peu Alexandre le Grand à la bataille de Gaugamèles, une bataille au cours de laquelle une forte infériorité numérique fut compensée par de l’audace, par des trouvailles tactiques qui déconcertèrent l’ennemi, comme ces ‟souricières” qui eurent promptement raison de l’arme suprême de Darius III, les chars à faux.

 

J’aime ce pays rude et tendre, spartiate et délicat. Je n’oublierai pas mes visites au Palmach Museum et au Lehi Museum. Je n’oublierai pas cet intérêt pour mon intérêt. Il est vrai que la sympathie envers Israël n’est pas chose courante, surtout lorsqu’elle s’attache à son armée. Et j’en suis venu à me demander si ma sympathie, une sympathie radicale je l’avoue, n’est pas en partie activée par mon dégoût pour ces masses vociférantes, par la vulgarité que je pressens dans l’antisionisme, cette inclinaison de troupeau, cette passion grégaire. De fait, j’ai souvent noté de la vulgarité chez les ennemis d’Israël ; et j’en reviens à cette sentence qui s’est imposée à moi et à laquelle je me suis promis de donner un développement : Le sionisme est un aristocratisme.

 

Dans aucun pays je n’ai constaté une telle fusion entre civils et militaires. La force de Tsahal ne tient pas seulement à l’excellence de ses soldats et de son armement, elle tient aussi et d’abord à ce rapport entre générations, entre membres d’un peuple millénaire et dispersé de retour dans sa patrie. Et ces femmes et ces hommes de Tsahal sont les enfants de tout un peuple qui lutte pour sa survie.  En Israël, on ne cherche pas à anéantir le voisin mais à vivre ; et pour les Juifs et Israël, vivre reste plus difficile que pour les autres.

 

Ben Gurion International Airport. Le hall d’arrivée du Terminal 3. 

 

J’ai passé une nuit dans le Ben Gurion International Airport, l’aéroport le plus surveillé du monde m’a-t-on dit. Je n’y ai pourtant vu aucun soldat, aucun policier, aucun uniforme. Pas de plan Vigipirate avec patrouilles en tenue de combat et fusil d’assaut bien visible. J’aimerais connaître de l’intérieur tout ce qui fait l’efficacité d’une surveillance si discrète. Lorsque je suis venu en Israël pour la première fois, des policiers m’ont longuement interrogé, un interrogatoire qui me permit de préciser ma sympathie pour Israël, un pays alors accusé des pires crimes suite aux massacres de Sabra et Chatila. Cette fois, mon entrée en Israël s’est faite en moins de dix minutes, probablement grâce au perfectionnement des moyens informatiques.

 

J’ai donc passé une nuit dans le Ben Gurion International Airport. L’activité n’a pas cessé, un phénomène que je n’ai observé dans aucun aéroport où il m’est arrivé de passer une nuit. Presque tous ont le portable à l’oreille. Les pas sont rapides, volontiers précipités. Cette nuit m’a beaucoup appris sur le pays et ses rythmes. Ce n’est pas vraiment Israël “terre sainte” (pour reprendre l’expression consacrée des Chrétiens) qui m’intéresse. Les lieux touristiques me lassent et j’ai plus appris en parcourant les quartiers populaires de Tel Aviv que les quartiers consacrés de Jérusalem.

 

A l’extraordinaire ancienneté d’Israël répond l’extraordinaire modernité d’Israël, une modernité qui s’enracine dans une ancienneté et s’en élève. J’ai éprouvé cette ancienneté dès mon arrivée en Israël, ce pays de technologies de pointe, je l’ai éprouvée dans l’aéroport en empruntant cette rampe qui conduit aux postes de contrôle. J’ai alors pensé au temple de Salomon, avec ce parement en pierre.

 

L’embarquement. Les installations destinées au contrôle des bagages me semblent autrement plus imposantes que partout ailleurs. Des jeunes femmes nous contrôlent, souriantes et aimables. Leurs questions sont rapides, nombreuses et précises. Elles défendent leur pays ; et il faut venir en Israël pour comprendre ce que signifie vraiment défendre son pays, un pays nullement crispé sur des prérogatives et enfermé sur lui-même mais riche d’une diversité peu commune et d’un message universel. Israël enrichit le monde comme les Juifs de l’exil l’ont enrichi et l’enrichissent encore.

 

 

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