« As time passes my theory looks to have been correct. While I may not have or have had every detail nailed down and really how could I, the basic premise is solid. In every way Turkey is being set on the global game table for carving up. Many knives are being sharpened » écrit un certain « Penny ».
Quand je pense qu’il y a peu on se disait prêt à accepter la Turquie dans l’Europe ! L’ancien président du gouvernement espagnol, José Luis Rodríguez Zapatero, surnommé « Bambi », rêva même une alliance avec la Turquie d’Erdogan : ce fut La Alianza de Civilizaciones de las Naciones Unidas (UNAOC). Rappelons que « Bambi » profita de la 59e Assemblée Générale de l’ONU, le 21 septembre 2004, pour lancer l’idée d’une alliance entre l’Occident et le monde musulman dans le but de combattre le terrorisme international par d’autres voies que celle des armes. Erdogan le mégalo panturquiste vit là une formidable occasion tandis que « Bambi » pris dans une gestion catastrophique des affaires intérieures de l’Espagne vit là un moyen de jeter de la poudre aux yeux des Espagnols et du monde. Pauvre grand niais !
Un Peshmerga non loin de la ligne de front aux abords de Hamdaniya, en juillet 2014.
Le monde enchanté dont rêvait « Bambi » s’est dissipé comme un banc de brume. La violence a gagné presque tout le Moyen-Orient. Elle accompagne une formidable mutation, avec fracturation de pays issus du partage colonial. Elle a aussi pour effet de mettre en pièces le masque d’Erdogan. Après avoir voulu jouer dans la cour des grands, ce mégalo est menacé dans son pays même. Souvenez-vous, il s’était rapproché des Frères Musulmans, de l’Égyptien Mohamed Morsi. Mal lui en prit. Souvenez-vous de cette minable tentative de diversion avec la « Flottille Free Gaza » conduite par le Mavi Marmara et soutenue par Ankara. Il est vrai que s’attaquer à Israël est a priori une excellente méthode puisqu’Israël est le seul pays au monde auquel on discute — lorsqu’on ne le lui refuse pas — le droit de se défendre, l’existence même de ce pays étant un scandale pour des masses frustrées et en constante expansion.
Je passe sur les pelles et les râteaux que s’est pris et que se prend ce petit mégalo. A présent, c’est sur son territoire même que la guerre s’insinue, à ses frontières et jusqu’au centre d’Ankara, avec l’attaque du 17 février 2016 peut-être menée par des combattants des Faucons de la Liberté du Kurdistan (TAK, un groupe issu d’une dissidence du PKK) contre les soldats turcs, des terroristes qui depuis trop longtemps mènent des opérations criminelles en territoire kurde.
La Turquie, ce pays de massacreurs, massacreurs d’Arméniens mais aussi de Grecs d’Anatolie et de Grecs Pontiques, doit être châtié. Pour commencer, ce que je souhaite à ce pays : refus radical de son admission dans l’Europe ; marginalisation au sein de l’OTAN (en attendant l’expulsion) avec basculement américain et européen du côté kurde ; formation d’un Grand Kurdistan avec territoires pris sur l’Irak, la Syrie puis la Turquie (soit une vaste portion du Sud-Est du pays) ; expulsion des Turcs de Chypre (une île grecque depuis des temps immémoriaux) et réunification de l’île ; emprise de la Russie (ennemi héréditaire) en Turquie avec affaiblissement conséquent et méthodique d’une armée turque à présent islamisée par l’entremise d’Erdogan. Cette liste n’est pas exhaustive.
Erdogan le sournois a peur. Je lui souhaite l’enfer. Les Kurdes sont en passe de couper un axe vital pour l’approvisionnement de Daesh, l’autoroute d’Alep, ce qui laisse présager une zone kurde ininterrompue non seulement en Irak mais aussi en Syrie, tout le long de la frontière Sud de la Turquie, le cauchemar d’Erdogan. C’est par cet axe que transite la discrète aide turque à Daesh et que le clan Erdogan s’enrichit avec ces terroristes de tout un trafic, à commencer par celui du pétrole — voir le rôle tenu par Erdogan junior. Les Peshmergas ont coupé il y a peu l’axe Al Raqa – Mossoul, les deux capitales du « Califat », un axe stratégique. Le sectionnement de l’axe Turquie – Alep sera à n’en pas douter un coup fatal porté à cette organisation terroriste.
Combattants d’élite, les Peshmergas sont confrontés à des terroristes qui pour la plupart sont de piètres combattants. De plus, ils tremblent à l’idée d’être tués par des femmes et, ainsi, de terminer en enfer.
Les Unités de protection du peuple kurde (YPG) comprennent quelques dizaines de milliers de combattants (entre 35 000 et 65 000) avec une forte proportion de femmes, environ 40 % dit-on. Ces combattants sont majoritairement musulmans mais il y a d’assez nombreux chrétiens dans les rangs de ces milices, sans oublier quelques volontaires étrangers. Les terroristes de Daesh seraient environ 80 000, répartis entre la Syrie et l’Irak, dont un quart d’étrangers chez lesquels les désertions seraient de plus en plus nombreuses, surtout chez les Européens habitués à une certaine douceur de vivre.
Ci-joint, un lien intitulé « Syrie : des volontaires américains et britanniques décrivent leur combat aux côtés des Kurdes » :
Le drapeau du Kurdistan. Le rouge symbolise la détermination et l’esprit combatif des Kurdes, ainsi que tous leurs martyrs, si nombreux. Le vert symbolise les montagnes, les collines et les plaines du Kurdistan. Le blanc symbolise la paix et la prospérité. Le soleil évoque les origines zoroastriennes des Kurdes. Ses vingt-et-un rayons symbolisent le nouvel an kurde, vingt-et-un mars, soit l’arrivée du printemps. De très nombreux combattants kurdes sont des combattantes. Notons que le drapeau iranien fait appel aux mêmes couleurs, disposées elles aussi horizontalement mais dans le sens inverse.
Au-delà de leur lutte contre les terroristes, les combattants kurdes œuvrent à la création d’un proto-État au Nord de la Syrie : ROJAVA. Rappelons que le peuple kurde est un peuple sans État, dispersé dans le monde et qui constitue de fortes minorités en Syrie, Irak, Turquie et Iran. C’est un vrai peuple, un peuple descendant des Mèdes et de ce fait proche cousin des Perses. Les Kurdes seraient une quarantaine de millions (leur nombre varie assez sensiblement suivant les sources d’information) dont une quinzaine de millions en Turquie. Rien à voir avec le « peuple palestinien », un peuple inventé, majoritairement un ramassis d’Arabes venus d’un peu partout, enfants chéris des médias, de la quasi-totalité de la classe politique occidentale et enfin des masses suiveuses — un pléonasme. Mais là n’est pas le sujet du présent article.
Que ce proto-État qui se dessine en Irak s’étende en Syrie puis… en Turquie, vestige de l’Empire ottoman, vestige qui doit être encore plus réduit au profit de ce Grand Kurdistan que je porte en rêve !
Le Kurdistan, soit ce territoire peuplé en majorité de Kurdes, un croissant d’une superficie équivalente à celle de la France et qui s’étire entre la Méditerranée et le golfe Persique. Le Tigre et l’Euphrate prennent leur source en territoire kurde et leurs affluents irriguent de nombreuses vallées kurdes.
Les origines des Kurdes sont discutées : sont-ils des Indo-Européens comme les Perses ou bien des peuples asiatiques autochtones, comme les Géorgiens et les Arméniens ? Ce qui est certain : des tribus iranisées ont peuplé le Kurdistan dès le VIIe siècle avant notre ère.
De la chute de Ninive en 612 av. J.-C. à 1514, date à laquelle les Empires turc et persan se partagent la région, les tribus kurdes passent sous de nombreuses dominations étrangères, la dernière avec les Ottomans. Les heurts entre tribus sont fréquents et ce n’est qu’au XIXe siècle qu’un authentique mouvement nationaliste kurde commence à se structurer. Dès 1804, les révoltes contre les Ottomans se succèdent. A Mossoul, les Kurdes accueillent les Britanniques en libérateurs. Le traité de Sèvres (10 août 1920) répond aux vœux des nationalistes kurdes qui voient se profiler un État autonome ; mais considérant l’opposition d’Atatürk, ce traité ne sera jamais appliqué. Par ailleurs, suite à « la Grande Catastrophe » (Μικρασιατική Καταστροφή), soit l’issue malheureuse de la guerre gréco-turque de 1919-1922, au cours de laquelle les Grecs furent pourtant sur le point d’enfoncer les Turcs et de s’ouvrir la voie vers Ankara, le traité de Lausanne (24 juillet 1923) laisse à la Turquie la majeure partie du Kurdistan moyennant le respect des libertés culturelles, religieuses et politiques de toutes les minorités. Une bien triste farce ! La Grande-Bretagne comme la France savent que ces libertés seront poussées de côté sans tarder. Un an après la signature de ce malheureux traité, le gouvernement turc interdit l’usage de la langue kurde et déporte une bonne partie de l’intelligentsia kurde et des chefs de tribus.
Ce que j’espère depuis mon enfance semble se profiler : la disparition de la Turquie ou, tout au moins, son affaiblissement radical et sa mise sous tutelle après partition du pays. C’est ainsi que ce matin, j’ai lu non sans plaisir un article au titre éloquent mis en ligne par Sputnik (le service d’information multi-média lancé officiellement par la Russie en novembre 2014 ) : « L’OTAN à la Turquie : ne comptez pas sur nous en cas de conflit avec la Turquie ». La Turquie lâchée par les Américains et menacée par l’arsenal russe… Et que ce pays n’aille pas faire le joli cœur auprès d’Israël comme il l’a déjà fait pour cause d’isolement. C’est dans ce pays que sont concoctées les plus abjectes fables antisémites, plus grand-guignolesques que tout ce qui se concocte en la matière dans le monde arabe.
La grande révolte de février 1925 dont le but était la création d’un État kurde fut impitoyablement réprimée. Au printemps de 1927, un congrès clandestin se tint sur le mont Ararat. Il y fut décidé de reprendre la lutte armée jusqu’à l’expulsion des Turcs du Kurdistan. Les Kurdes sont bien un peuple authentique et unique et non des « Turcs montagnards » comme le déclara Atatürk en 1932.
La volonté du peuple kurde d’accéder à l’autonomie puis à l’indépendance, avec cette tension générale vers le Grand Kurdistan, ne cesse de s’affirmer. La désagrégation des États arabes irakien et syrien donne corps à cet espoir. Et que va-t-il en être de la Turquie, pays qui compte, et de loin, la plus importante communauté kurde ? Mon espoir est que la Turquie soit affaiblie, expulsée de la cour des grands dans laquelle elle s’est risquée à jouer, avec un manque d’intelligence patent. Espoir suprême : que ce pays soit dépecé (carved up) avec une bonne portion attribuée aux Kurdes, ce qui par ailleurs ouvrirait la voie à la libération d’autres minorités opprimées.
Certes, le Kurdistan que préconisait le traité de Sèvres ne regroupait pas l’ensemble des régions habitées par les Kurdes de l’Empire ottoman ; il n’empêche qu’il en faisait une entité nationale reconnue. Le redressement de la Turquie, la malheureuse issue de la guerre gréco-turque mais aussi les appétits de puissances étrangères (en particulier de la Grande-Bretagne et de la France sur le pétrole du Kurdistan méridional) furent des obstacles majeurs à la création d’un État kurde. Les Kurdes qui avaient été disséminés entre deux Empires se retrouvèrent divisés entre quatre États, sans oublier la Transcaucasie soviétique.
Toutes les revendications kurdes ont été niées, étouffées, et souvent dans le sang. Seules conséquences positives de cette lutte : des droits nationaux garantis dans la Constitution provisoire de 1958 puis la loi du 11 mars 1974 créant une région autonome. Mais on connaît la suite et les atrocités perpétrées contre le peuple kurde par Saddam Hussein, un véritable génocide mené entre février et septembre 1988, avec quelque 200 000 victimes. On se souvient du bombardement de Halabja à l’arme chimique, le 16 mars 1988.
Le chaos dans lequel est plongé une partie du monde arabe — un chaos qui menace à présent la sinistre Turquie dont le double jeu touche à sa fin — est chargé de forces positives pour le monde, avec l’émergence d’un État kurde, en attendant le Grand Kurdistan. L’ouverture de l’Iran au monde va permettre la démocratisation de ce grand pays ; je fais ce pari, fort de certaines intuitions. L’intuition est essentielle en politique, en géopolitique. Je fais donc ce pari, je m’y risque mais avec la tête froide. Just wait and see. Vive les Kurdes ! Vive les Alévis ! Vive les Yézidis ! Vive les Arméniens ! Vive le peuple iranien ! Vive Israël !
Des espoirs que je formule depuis des années sur ce blog prennent forme : l’abaissement du monde arabe, à commencer par le cauchemar saoudien, l’abaissement de la Turquie, la structuration d’un État kurde, la fin de l’isolement de l’Iran (j’ai exposé les raisons qui m’incitent à espérer en ce pays). Au-delà des actes terroristes perpétrés contre Israël, je sais que l’avenir de ce pays que j’aime tout particulièrement est bien moins désespéré qu’on ne le croit.
En lien, « A tribute to the brave kurdish women sending ISIS straight to hell » :
http://www.undergroundwebworld.org/Reports/kurdishwomenfile/kurdsfightisis.html
Et un intéressant axe de réflexion intitulé « La Turquie est en passe d’être marginalisée en Syrie » :
Un Peshmerga aide des Yazidis. Kirkouk, 8 avril 2016
Olivier Ypsilantis
J’aime ton enthousiasme, mitnadev, et partage tes espoirs.
La folie d’Erdogan semble le précipiter, comme un coureur emballé sur une pente trop forte. Mais ces moments-là sont les plus redoutables.
N’oublie pas que la Turquie possède la deuxième armée la plus importante de l’OTAN. Notons aussi que personne, hormis Poutine, n’a trouvé à redire aux immondes tractations d’Erdogan avec les raclures de l’État islamique.
Quant à l’Europe, elle continue à cracher au bassinet sans dénoncer le chantage turc.
Bref, il va falloir de la patience.
Je partage totalement votre espoir y compris avec l’Iran dont je distingue bien la population du clergé chiite qui a pris le pouvoir et le garde depuis plus de 35 ans par la dictature (et qu’on ne me parle pas des “élections”…).
Il a longtemps que la Turquie héritière de l’empire ottoman (qui n’a eu de cesse dans son histoire d’agresser l’Europe) aurait dû être abattu et dépecé, réduite aux montagnes d’Anatolie. Mais l’Europe et la Grande Bretagne en tête ont toujours voulu la maintenir pour contrecarrer la Russie, déjà lors de la guerre de Crimée, puis en 1918, puis finalement en la faisant entrer dans l’OTAN.
Quant à l’État kurde, c’est la seule façon d’en finir avec la violence arabo-islamique dans cette région berceau des plus grandes civilisations de l’Humanité et qui dure depuis 1436 ans.
Cher André,
Je n’ai pas voulu forcer la note, mais c’est précisément ce que je souhaite : que les Turcs soient repoussés dans les montagnes de l’intérieur et que les côtes d’Anatolie (qui ont été grecques durant des millénaires) reviennent à la Grèce, à commencer par Smyrne. Ce ne sont que des rêves, bien sûr ; mais écrire ses rêves est une manière de leur donner forme… Quant au Grand Kurdistan, je le porte lui aussi dans mes rêves ; mais ce rêve deviendra réalité. Toute mon amitié. Et une fois encore : Vive Israël !
J’aime bien vos espoir Olivier,
Amicalement
Tu donnes le moral Olivier !
Je sais que ma question est un peu malicieuse 😆 et je pense que tu l’attends d’un commentateur. (malicieuse dans la mesure où je crois connaître un peu la raison de cet oubli : mais comme j’aime lire tes explications, je la pose !)
Pourquoi n’as-tu pas inclus la partie kurde actuellement sous domination iranienne dans le futur Grand Kurdistan ?
Même si les Kurdes iraniens filent doux actuellement (ont-ils le choix d’ailleurs ?) ne crois-tu pas que la question se posera lors de la création du pays.
Christiane,
Ta question n’est en rien malicieuse. Je me la pose souvent et m’efforce d’y répondre. Je vais écrire un petit article afin de t’exposer mes raisons.