Je suis inquiet pour l’Espagne, pays où j’ai vécu presque trente ans et que j’aime. De fait, ce pays est l’une de mes patries puisque je m’y sens bien, tout simplement. Je suis très inquiet pour ce pays qui affronte une vaste et profonde crise économique, sociale et politique qu’active une crise sanitaire. L’Espagne, pays bourré d’énergies, est « en vrac », une situation qui certes n’est en rien irrémédiable. L’actuelle coalition au gouvernement aggrave ses problèmes – et que l’on ne m’accuse pas (suivant une vieille stratégie de la gauche espagnole) d’être un nostalgique du franquisme parce que je me défie de l’équipe actuellement au pouvoir ; j’ai toujours considéré Franco comme un bandit, ce qui ne me rend pas nécessairement sympathiques tous ses ennemis, loin s’en faut. Et c’est dans le camp que Franco a phagocyté au cours des années de guerre civile que se trouvent ses dénonciateurs les plus aigus, les plus intelligents. L’Espagne d’aujourd’hui est gouvernée par une bande sinistre et anti-démocratique dans laquelle se trouve Pablo Iglesias, un contempteur d’Israël qu’il juge être un pays illégal. Oui, la gauche espagnole, socialistes inclus, est aujourd’hui massivement antisémite et antisioniste ! Pilar Rahola, grande défenseur d’Israël, milita à l’extrême-gauche catalane (à l’E.R.C., Esquerra Republicana de Catalunya) avant d’en claquer la porte lorsqu’elle prit la mesure du volume d’ordures que ce parti déversait sur Israël. Hernán Felman (Vice Chairman of KKL-JNF) a présenté cette femme de la manière suivante : “Pilar is the most important non-Jewish voice in Spanish in support of Israel”.
Rafael Luis Bardají López (né en 1959 à Badajoz) en compagnie de Steve Banon.
Mais j’en viens en manière de réconfort à Rafael Luis Bardají López, un néo-conservateur. En Espagne, le sionisme est exclusivement défendu par des femmes et des hommes dits « de droite », en commençant par José María Aznar et Libertad Digital, un vaste think tank conservateur, probablement le plus intelligent des sites espagnols par la profondeur et la liberté de ses analyses. Dans la presse écrite, il est instructif d’observer que les deux plus importants quotidiens espagnols, soit El País (centre-gauche, PSOE, alter ego du quotidien Le Monde) et El Mundo (centre-droite, PP), ont une sensibilité différente au sujet d’Israël et du sionisme. El País se perd en sous-entendus anti-israéliens dès qu’il le peut tandis que El Mundo prend généralement la défense de ce pays. Mais le quotidien espagnol le plus franchement pro-israélien est l’ABC, fondé à Madrid en 1903 par le marquis Torcuato Luca de Tena y Álvarez Ossorio, journal de l’aristocratie et de la bourgeoisie, de tendance conservatrice et monarchiste, le quotidien au style le plus fin et qui a su attirer nombre de plumes prestigieuses. Le nouveau parti d’extrême-droite, Vox, dirigé par le Basque Santiago Abascal, est ouvertement sioniste car il considère qu’Israël fait partie intégrante de l’Occident. On peut trouver à redire au sionisme de Vox (fondé en 2013) qui par moments me semble manquer de profondeur ; mais qu’importe, il n’est pas fréquent qu’un parti se déclare ouvertement sioniste. Vox est devenu en très peu de temps le troisième parti d’Espagne. Il va être question de son idéologue, Rafael Luis Bardají López.
José María Aznar (né en 1953 à Madrid)
Je présente la traduction de l’espagnol au français d’un article de ce grand ami d’Israël, Rafael Luis Bardají López, article intitulé : « Qué significa Israel para mí », publié sur le site ClubLD Libertad Digital n°. 47. Rafael Luis Bardají López est un spécialiste de la pensée neocon (neoconservatism) de l’équipe de George W. Bush. En 2010, en compagnie d’Enrique Gonzalo Navarro Gil, de Pablo Casado Blanco (devenu président du PP en 2018) et de Carlos Bustelo García del Real (ancien ministre de l’Industrie et de l’Énergie), il fonde Friends of Israel Initiative (F.O.I.I.). En mars 2018, il quitte le PP pour Vox.
La traduction donc :
Je ne suis pas juif mais aussi loin que je me souvienne ma vie a été liée d’une manière ou d’une autre au destin d’Israël. Par exemple, j’avais environ cinq ans lorsque mon père m’emmena à la Coupe d’Europe de basketball où les adversaires étaient ni plus ni moins le Real Madrid et le Maccabi de Tel Aviv. Je ne me souviens plus du vainqueur ; mais je me souviens que quelque temps après, à l’école, on me demanda d’énumérer les pays d’Europe. Ayant vu jouer le Maccabi et ayant écouté la chanson israélienne au Concours Eurovision, je commençai : « Espagne, Israël… » ; mais à ma grande surprise on m’interrompit et on me renvoya à ma place en me traitant d’âne (burro). Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait car, enfin, si Israël jouait à la Coupe d’Europe et chantait au Concours Eurovision, ce pays ne pouvait qu’être européen. C’est pour cette raison, entre autres nombreuses raisons – nous partageons les mêmes valeurs –, que je ne comprends toujours pas pourquoi on refuse aujourd’hui encore d’accepter Israël comme un pays occidental à part entière. Comme le dit José María Aznar, Israël est un pays enclavé au Moyen-Orient mais pas un pays moyen-oriental – « enclavado en Oriente Medio, pero no medio-oriental ».
Santiago Abascal (né en 1976 à Bilbao), chef du parti politique Vox et député.
Par ailleurs, et après plusieurs conflits (j’ai notamment effectué un travail sur la guerre du Kippour qui annonçait mon orientation professionnelle), j’ai pu vérifier directement la différence de qualité de vie et de perspectives entre ce petit pays et ses voisins arabes. Passionné de photographie sous-marine, je connais bien la zone d’Eilat, au sud d’Israël, et je pourrais rapporter une multitude d’anecdotes destinées à rendre compte de ce qu’a signifié le retrait israélien du Sinaï, soit le laisser-aller administratif et l’effondrement social apportés par les Égyptiens. A partir de 1982, j’ai dû quitter les marins israéliens pour des marins russes et ukrainiens prêtés au Caire. Le pire était l’état des agglomérations et des espaces naturels, un état pitoyable avec un pays qui promouvait pareillement le tourisme à devises et l’islam. Celui qui se rend aujourd’hui à Sharm el Sheikh verra non seulement la plus grande mosquée de toute l’Égypte mais devra supporter d’entendre le gouverneur de la province déclarer que les attaques de requins (dont les touristes sont parfois victimes) sont planifiées par le Mossad et les Juifs. En dépit du traité de paix signé avec le sang de Sadate, l’islam, aussi modéré se présente-t-il, continue d’alimenter la haine envers Israël.
Ma relation à Israël changea définitivement le jour où je fis la connaissance de Benyamin Netanyahu, « Bibi », durant son premier mandat en tant que Premier ministre. Sa personnalité me frappa comme m’avait frappé cette photographie le montrant au bord de la mer, avec sa famille, entouré de gardes du corps, une image qui rendait compte de la constante menace qui pèse sur Israël depuis sa fondation. Cette photographie reste dans ma mémoire car elle rend compte de ce que signifie vivre dans une constante menace existentielle mais aussi parce qu’elle symbolise la force de tout un peuple qui vit entouré d’hostilité, un peuple qui défend ses frontières et qui espère la paix.
Pablo Casado (né en 1981 à Palencia), chef du parti politique PP et député.
Ce n’est pas « Bibi » mais son père, Benzion Netanyahu, qui m’a ouvert les yeux sur les forces du mal, le fondamentalisme islamique et le terrorisme nationaliste palestinien. De son fils, j’ai le souvenir d’un homme décidé à lutter et vaincre. Et je recommande la lecture de quelques-uns de ses livres dont “How democracies can defeat domestic and international terrorists y Terrorism: How the West can win”, indispensables pour comprendre le monde d’aujourd’hui et la distance qui sépare une Europe décadente, une Amérique en retrait et un Israël décidé à se défendre et à avoir le dessus.
Ma relation avec Israël est allée en s’approfondissant car j’étais conscient des divergences de plus en plus marquées entre les valeurs élémentaires et vitales des Européens et des Israéliens : apaisement / résistance, pacifisme / défense, reddition / auto-affirmation. Les valeurs qui ont formé l’Occident sont présentes en Israël, précisément, ce petit pays qui comme le village d’Astérix et Obélix ne renonce pas à son indépendance et identité. Cette divergence je l’ai observée avec le massacre des athlètes israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972, avec la guerre du Kippour en 1973, avec la destruction du réacteur nucléaire d’Osirak en 1981.
Le problème pour Israël est que ses ennemis ont bien retenu la leçon : ne pas s’en prendre frontalement aux soldats de l’IDF. Les avions et les tanks des guerres de 1948, 1956, 1967 y 1973 ont cédé la place aux terroristes, aux attentats-suicides, aux intifadas. On combat sur tous les fronts possibles, le légal, l’institutionnel, le culturel, l’économique, le commercial… On s’emploie par tous les moyens à délégitimer l’État juif et à l’échelle mondiale.
Friends of Israel Initiative (F.O.I.I.) dont je vous invite à consulter le site :
http://www.friendsofisraelinitiative.org/
Ces dernières années, je me suis efforcé de lutter autant que possible contre cette tendance à accuser Israël de tous les maux de la terre en ignorant volontairement tout ce qu’Israël apporte de positif. Je suis plus que fier que des personnes comme José María Aznar mettent sur pied un projet tel que Friends of Israel Initiative auquel participent également le prix Nobel de la Paix David Trimble, l’ex-président de la République du Pérou Alejandro Toledo, le philosophe italien Marcello Pera et l’ambassadeur américain aux Nations Unies John R. Bolton. Friends of Israel Initiative a pour objectif de montrer qu’Israël est un pays comme les autres, une démocratie, avec ses défauts et ses qualités, une partie du monde occidental, par son histoire, ses valeurs, ses intérêts et que, de ce fait, il est injuste et stupide de présenter Israël comme une terre de violence et d’injustice.
Si nous jetons un coup d’œil du Maroc au Pakistan, le seul îlot de prospérité et de stabilité est Israël. Suite au démembrement de l’Empire ottoman, on a décidé de créer vingt-trois pays : vingt-et-un pays musulmans, un chrétien et un juif, ce que les Arabes ne voulurent jamais accepter. Aujourd’hui, à cause des avancées du Hezbollah, le Liban n’est plus un pays chrétien. Qu’Israël ne cesse pas d’être juif en dépit de la force de ses ennemis est non seulement vital pour les Israéliens mais aussi pour l’ensemble du monde civilisé. « Si Israël tombe, nous tomberons tous » (Si Israel cae, todos caemos), écrivait José María Aznar il y a quelques mois à Londres. Il avait raison. Si Israël tombe, l’Occident disparaîtra. Et c’est pour cette raison, nous renforcer, que nous devons être avec Israël. On peut critiquer telle ou telle politique, tel ou tel parti, tel ou tel leader, ce que nous faisons tous et c’est bien ainsi. Mais personne ne devrait remettre en question le droit à l’existence de l’unique pays créé par mandat des Nations Unies : Israël. Quand nous remettons en question Israël, nous nous remettons en question car nous donnons des ailes à ceux qui veulent mettre fin à notre mode de vie. Pour moi Israël est un phare qui nous sert de guide, un réduit où nous réfugier, une terre d’espérance. Et quand on me demande pourquoi je fais ce que je fais et dis ce que je dis, je n’ai qu’une réponse : je veux que mon fils puisse dire qu’Israël fait partie intégrante de l’Occident, que c’est un pays occidental, sans qu’on lui mette une mauvaise note à l’école. Ni más ni menos.
José María Aznar en compagnie de Benyamin Netanyahu
Friends of Israel Initiative se présente ainsi :
Under the leadership of former Spanish Prime Minister José María Aznar, a high level group met in Paris in the middle of 2010 to launch a new project in defence of Israel’s right to exist.
This “Friends of Israel Initiative” has been joined by such notable figures as Nobel Peace Prize Laureate David Trimble, Italian philosopher Marcello Pera, former United States Ambassador to the United Nations John Bolton, British historian Andrew Roberts, and others. Their key aim is to counter the growing efforts to delegitimize the State of Israel and its right to live in peace within safe and defensible borders.
This Initiative arises out of a sense of deep concern about the unprecedented campaign of delegitimation against Israel waged by the enemies of the Jewish State and, perversely, supported by numerous international institutions.
This Initiative differs from previous such ventures primarily in that it is being led by people who are not Jewish and whose motivations are based on the firm conviction that Israel is part of the Western world.
Indeed, the sponsors of this initiative are convinced that Israel is of fundamental importance to the future of the West. Although the peace process is important, the members of the Friends of Israel Initiative are even more concerned about the onslaught of radical Islamism as well as the specter of a nuclear Iran, both of which threaten the entire world.
The Friends of Israel Initiative is committed to act consistently and diligently in its effort to disseminate its members’ vision of Israel as a democratic, open, and advanced nation like any other, and that it should be perceived and treated as such.
Israel is a sovereign democracy which like all the others is, of course, capable of making mistakes. Nonetheless, this should not be used as an excuse to question Israel’s right to exist, its legitimacy, or its basic rights as an independent state.
Israel is an inextricable part of the West. We stand or fall together.
Olivier Ypsilantis