La haine d’Israël et du Juif rapporte gros et assure des rentes à vie. C’est ainsi. Les Palestiniens le savent mieux que quiconque. La haine d’Israël rassemble des individus extraordinairement divers. C’est un jus dans lequel barbotent des foules en constante expansion, un jus d’une couleur et d’une consistance qui me laissent penser qu’il pourrait s’agir d’une fosse d’aisances. Mais je ne m’en tiendrai pas à cette image. Je ne puis m’en tenir à cette image. La haine d’Israël et du Juif est une drogue ou, plus exactement, un éventail de drogues qui va des soft drugs aux hard drugs. La haine d’Israël et du Juif est une soupe populaire que fréquentent également des individus nullement indigents. Le bourgeois y côtoie le prolo. La haine d’Israël et du Juif est du Viagra ; elle donne de petites érections à des masses amorphes. La haine du Juif et d’Israël est vraiment un produit miracle et si bon marché.
Les antisémites forment deux groupes principaux : les extravertis (les chiasseux) et les introvertis (les constipés). Les extravertis arborent leur antisémitisme comme des lettres d’anoblissement, comme un blason. Un proverbe rappelle pourtant que « Quand on grimpe au cocotier, vaut mieux avoir le cul propre » ; mais ils n’en ont que faire puisqu’ils ont inversé les valeurs, ce qui leur permet une formidable arrogance qui en remontre à plus d’un. Les introvertis quant à eux un peu honte et se retiennent jusqu’à un certain point ; mais il faut tout de même que ça sorte. Ils s’efforcent alors d’éviter les bruits, mais ils ne peuvent éviter les odeurs — des sous-entendus… particulièrement puants.
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Il s’agit pour les Palestiniens de rester à tout prix dans le rôle de la victime et de se faire admettre comme telle par la communauté internationale. Le rôle de la victime peut rapporter gros, surtout si l’« oppresseur » est juif… Dans ce cas, on a toutes les chances de tirer le gros lot : une confortable rente à vie. Je ne force pas la note. Un exemple parmi tant d’autres : Après Camp David, les Palestiniens constatèrent, effrayés, qu’Israël avait gagné la bataille politique et que les capitales européennes étaient plutôt favorables à Israël. On commença même à s’interroger sur la sincérité de Yasser Arafat. Ehud Barak était le héros de la paix. Mais constatant qu’il était en train de perdre la bataille politique et médiatique, Yasser Arafat lança l’Intifada afin de modifier les positions d’Israël dans les négociations et, surtout, de gagner la bataille médiatique en replaçant les Palestiniens dans leur rôle d’opprimés. Ainsi annula-t-il les efforts politiques israéliens et passa-t-il de la défensive à l’offensive. Alors qu’il était engagé dans un cul-de-sac, il se retrouva d’un coup sur une autoroute. Précisons que l’Intifada fut déclenchée trois jours seulement après un dîner organisé dans la maison d’Ehud Barak (alors Premier ministre), avec repas préparé par l’épouse de ce dernier. Parmi les invités, Yasser Arafat…
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Ne pas oublier que la France a abandonné Israël en 1967, après la Guerre des Six Jours et pour des raisons connues. Mais toute l’Europe a — et a eu — un comportement ambigu envers Israël, Israël qui de ce fait ne peut qu’éprouver de la méfiance envers le Vieux Continent qui — faut-il le rappeler ? — a été un cimetière pour des millions de Juifs. En 1973, au cours de la guerre du Kippour, les États-Unis ont eu les pires difficultés pour faire atterrir leurs avions en Europe, au cours du pont aérien destiné à soutenir l’effort de guerre israélien. En 1967, Israël avait bénéficié du soutien de la France et non des États-Unis ; et je profite de cette remarque pour apporter une précision. On accuse toujours plus la gauche d’antisémitisme et d’antisionisme — surtout l’extrême-gauche et ses diverses tendances. Certes, il est bon de prendre enfin conscience que ces inclinaisons ne sont pas et n’ont pas été des spécificités de la droite et de l’extrême-droite (lisez « L’Antisémitisme à gauche. Histoire d’un paradoxe, de 1830 à nos jours » de Michel Dreyfus) ; mais au point où en sont les choses, il faut dépasser le clivage gauche / droite et se porter vers l’appareil d’État, la raison d’État, l’intérêt supérieur de la nation et j’en passe. Je pourrais en revenir au général de Gaulle qui jugea froidement — « L’État est le plus froid de tous les monstres froids » disait Nietzsche — que la France avait une carte à jouer dans le monde arabe et qu’en prenant ses distances vis-à-vis d’Israël (et des États-Unis, elle pouvait espérer se ménager un confortable espace géopolitique, géostratégique. Peu importe alors les gouvernements, de droite ou de gauche ; peu importe le parti dont est issu le chef de l’État et son gouvernement. L’antisionisme transcende volontiers toutes les nuances politiques. Il peut relever d’un calcul froid, loin de tout sentiment, de toute passion idéologique. Des responsables politiques peuvent s’élever contre certains propos, contre certaines décisions, mais ils ne représentent généralement qu’eux-mêmes. Le gros de la troupe — l’establishment — ne pense qu’à sa longévité et son confort ; et, à cet effet, aujourd’hui, rien de tel que la dénonciation d’Israël sous des formes tantôt implicites tantôt explicites, tantôt susurrées tantôt agressives.
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Si tu as des doutes sur l’hostilité envers Israël — mais aussi envers les Juifs en tant que tels —, coiffe-toi d’une kippa ou montre en médaille l’Étoile de David ; et promène-toi dans les rues de Paris ; tu seras vite instruit. C’est simple, non ? J’insiste ! Si tu penses que je force la note, toi qui me lis, ose simplement la kippa dans Paris ou plus discrètement l’Étoile de David à ton cou. Tu prendras tes jambes à ton cou.
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Il y a des Juifs que je n’aime pas, vraiment pas, des Juifs qui dénoncent Israël et en rajoutent et qui deviennent ainsi pires que les pires des goys. Israël peut être critiqué — et les Juifs ne s’en privent pas —, mais cette critique doit rester respectueuse, aimante, désireuse d’apporter sa pierre à l’édifice Israël. Ces Juifs (heureusement peu nombreux) sont effroyablement néfastes. On ne le dira jamais assez : les Juifs qui haïssent Israël (et je me garde de citer des noms) font plus de mal au pays que cent millions de goys qui le haïssent, que plusieurs armées arabes sur l’offensive, que les éructations des ayatollahs. Mais il n’est pas nécessaire que j’insiste.
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Ne jamais oublier Jabotinsky, le fondateur de la droite israélienne. Plus je l’étudie plus je suis frappé par sa lucidité. Il ne se chantait pas des berceuses. Dès 1924, cet homme honni de la gauche (qui ne s’est jamais donné la peine de l’étudier) affirme que le patriotisme des Palestiniens est fondé sur une foi égale à celle des Juifs de Palestine. En conséquence, et en toute logique, il conclut qu’il n’est pas possible d’acheter les Palestiniens en se contentant de leur verser des subventions économiques et d’améliorer leurs conditions de vie. C’est aussi pourquoi Jabotinsky reste actuel, qu’il est même de plus en plus actuel. L’irrationnel en histoire l’emporte sur le rationnel. Pour les Palestiniens, la lutte mythologique (la mythologie musulmane couplée à la mythologie palestinienne) l’emporte sur toute considération économique. Cette remarque pourrait être appliquée sans distorsion à d’autres cas.
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Intéressante remarque de Pierre-André Taguieff dans « Le nouveau national-populisme ». Le populisme « de droite » grossit les menaces réelles et ajoute des menaces imaginaires — même si elles prennent appui sur des données observables. A l’inverse, le populisme « de gauche » minimise les menaces réelles, lorsqu’il ne les nie pas, et les remplace par des menaces plus ou moins imaginaires tout en assenant ses diagnostics : « capitalisme prédateur », « racisme », « fascisme » et j’en passe, sans oublier ce mot manié depuis quelque temps à tout va, « pétainisme » — probablement pour cause d’usure de « fascisme ». Cette gauche populiste (qui n’est pas nécessairement extrême) contourne les questions délicates en pratiquant la fuite en avant. C’est ce qu’a fait Zapatero, chef de Gouvernement, avec la Ley de Memoria Histórica. C’est ce qu’a fait Hollande, chef d’État, avec la Famille pour tous. Bref, dans tous les cas, il s’agit que pousser de côté les questions économiques, sociales et financières, de les cacher derrière des « problèmes sociétaux » à même d’activer les passions. Hollande a plutôt bien réussi, dans un premier temps, avant que l’Europe ne sonne la fin de la récréation et ne force le pépère à quitter au moins une de ses charentaises. Cortina de humo, rideau de fumée. Le pouvoir active ses pots fumigènes — les mesures démagogiques — lorsqu’il est en difficulté.
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Léon Pinsker, trop oublié. Son petit livre, « Auto-émancipation ! Avertissement d’un Juif russe à ses frères » est pourtant le premier manifeste politique du sionisme. Voir le titre de la postface de Georges Bensoussan à ce livre.
La langue comme expression la plus authentique de « l’âme collective » d’une nation. Voir Johann Gottfried Herder. Étudier l’œuvre de Moses Hess (1812-1875), un socialiste ami de Karl Marx qui à aucun moment ne renie sa judéité. Moses Hess, un déçu de l’universalisme, prône le recentrage géographique sur la terre des ancêtres afin de sauver le judaïsme. Lire « Rome et Jérusalem. La dernière question des nationalités » (1862) où l’auteur pose les premiers jalons théoriques de l’État juif.
Le mot sionisme est né en 1890 ; son père, Nathan Birnbaum. Le mouvement autonomiste politico-culturel de l’historien Simon Doubnov. Lire « Psychanalyse de l’antisémitisme » de Roland Loewenstein. L’une de ses thèses : l’antijudaïsme a partie liée avec la crainte des fantômes. Cette nation juive morte et malgré tout vivante…
Difficile de combattre l’antijudaïsme, l’antisémitisme et même l’antisionisme par la raison puisque ces trois choses qui entretiennent des rapports complexes relèvent le plus souvent de la démonologie et de la superstition. Georges Bensoussan : « Parce qu’il a entrevu le cauchemar à venir, Léon Pinsker est le véritable ancêtre du pessimisme historique caractéristique du sionisme. »
Ces Juifs auxquels il manque l’estime de soi (en tant que juifs) et qui répondent aux accusations plus ou moins affirmées lancées contre Israël en en rajoutant. Pire, ces Juifs qui en espérant s’acheter un certificat de respectabilité précèdent les accusateurs d’Israël et savent se montrer pire que les pires des goys.
Olivier Ypsilantis