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Quelques réflexions 1/3


■ Il y a une erreur (un à-peu-près) qui distord les regards sur Israël. Cette erreur (cet à-peu-près) est, me semble-t-il, plus volontiers le fait de l’ignorance que de la mauvaise foi. L’État d’Israël n’est pas né de la Shoah… car rien ne saurait naître de la Shoah. L’État d’Israël n’est pas un cadeau donné aux Juifs en compensation… car rien ne saurait compenser la Shoah. Georges Bensoussan dénonce le lien de causalité entre Shoah et État d’Israël : «Si l’État d’Israël est fondé en 1948, c’est une conséquence directe de la Shoah ; et on évoque la mauvaise conscience du monde occidental, en 1945. Il me semble que ce raisonnement est totalement à revoir car, si vérité historique il y a, c’est plutôt l’inverse. La Shoah a cassé profondément le sionisme ; elle l’a cassé moralement, politiquement, démographiquement. Moralement, elle l’a cassé car le Yishouv (la communauté juive de Palestine) a été incapable de porter secours aux Juifs d’Europe. Comment l’aurait-il pu ? Aujourd’hui, la culpabilisation induite par le livre de Tom Segev est presque risible : ces 600.000 Juifs qui craignaient pour leur propre vie face aux armées de Rommel qui se trouvaient tout près du Caire, que pouvaient-ils faire pour aller aider les communautés en Europe?» Le lien de causalité entre la Shoah et l’État d’Israël doit donc être envisagé avec la plus grande prudence ; il doit être non pas éradiqué mais nuancé, singulièrement nuancé.

 

 

▪ L’engagement du Grand Mufti de Jérusalem (le principal leader palestinien d’alors) a été autant que possible poussé de côté par cynisme. Il n’en fut pas moins un partisan de la «Solution finale à la question juive» (Endlösung der Judenfrage). En 1940, il sollicita l’Axe afin qu’il règle la question juive en Palestine. En 1943, il demanda que les Juifs soient envoyés en Pologne afin qu’on se protège d’eux… Ce personnage promu Grand Mufti par les Anglais (qui pensaient ainsi le tenir en laisse) encouragea toujours plus les violences en leur donnant un caractère de guerre sainte, et ce dès les années 1920 : pogroms à Hébron (le 23 août 1929), à Safed (la ville bleue des kabbalistes) et j’en passe. Il ne s’agissait pas de délimiter un futur État palestinien mais de s’opposer par la terreur à toute entité juive en Palestine.

▪ Les Palestiniens ont structuré avant l’heure, dès 1945/1948, la thèse révisionniste/ négationniste. Ainsi, dès 1946, ils laissèrent entendre que la Shoah n’était qu’une ruse de la propagande. Ils comprirent sans tarder les avantages qu’ils pouvaient retirer de la compétition victimaire dont ils avaient posé les règles. La culture musulmane qui n’a jamais présenté le Juif (ou le Chrétien) que comme un falsificateur (falsificateur de la parole de Dieu, pour commencer) allait fournir une énergie infinie à cette entreprise mentale. [Agressivité/Victimisation] est le binôme mental qui active les Palestiniensune mécanique solide et rustique, solide parce que rustique. Il faut y prendre garde, d’autant plus que nombre de paumés en mal de cause, paumés de diverses obédiences, lui servent de caisse de résonance.

▪ Avec ce projet  unilatéral d’État palestinien, il est beaucoup question de Mahmoud Abbas (alias Abou Mazen), auteur d’une «thèse de doctorat» — et mettons des guillemets à ce salmigondis fait de présupposés, à ce pur produit de propagande. Le point fort de cette thèse est que les sionistes ont collaboré avec les nazis dans le but de liquider les Juifs opposés au sionisme et d’obtenir en retour le droit pour les autres Juifs d’émigrer en Palestine.

■ L’activation de la cause palestinienne, chez nous en Europe, a de nombreuses racines qui plongent dans la psychologie des profondeurs et traversent des strates riches en vestiges archéologiques. Fouillez et vous découvrirez entre autres choses que l’Europe s’efforce de guérir du «devoir de mémoire» en utilisant toutes sortes de subterfuges. L’affaire al-Durah (un montage, on le sait) trouve là son explication : l’image de l’enfant palestinien «assassiné par les Juifs» rééquilibre — efface même — celle des enfants juifs assassinés dans le cadre de la Solution finale. La Shoah n’appartient pas au passé, elle nous précède. Peu le savent.

■ Le Juif faible attire éventuellement la compassion. Le Juif fort (l’Israélien) perturbe bien des schémas mentaux. Pourquoi ? Cherchez, cher lecteur, cherchez ! Vous trouverez, si vous ne vous êtes pas laissé étourdir par le tintamarre médiatique — mais c’est merdiatique qu’il me faudrait écrire.

■ Mahmoud Abbas, l’architecte des accords d’Oslo, a exprimé l’espoir qu’Israël soit détruit au profit de «la Palestine démocratique». Il le dit moins à présent, adoptant une stratégie plus discrète. Nous n’en avons pas fini avec les accords d’Oslo. On en avait pourtant presque fini avec Yasser Arafat dont l’appareil militaire avait été détruit au cours de la guerre du Liban, en 1982. François Mitterrand (cet autre maître en duplicité) avait jugé bon d’envoyer ses soldats afin de protéger le dirigeant palestinien puis de le convoyer, lui et ce qu’il restait de ses partisans, vers la Tunisie. Shmuel Trigano écrit : «Oslo est allé chercher Arafat dans son repli tunisois pour lui remettre des territoires de la plus haute importance stratégique et symbolique, autoriser cinq mille terroristes à s’y installer sous le signe illusoire d’une hypothétique police palestinienne, sous la direction de l’OLP, responsable de dizaines d’années d’actes de terreur anti-juifs et inventeur des formes contemporaines du terrorisme médiatique, leur donner enfin des armes de Tsahal pour s’armer. Et cela sans aucune contrepartie concrète de l’OLP si ce n’est de vagues promesses ou des discours trompeurs, au point qu’Israël s’est vu réduit à quémander du bon vouloir d’un dictateur une reconnaissance de son existence et de sa légitimité.»

■ Dans son article «L’antisionisme, un antisémitisme ‘‘politiquement correct’’», Georges-Elia Sarfati note qu’à aucun moment les médias occidentaux, notamment français, n’ont publié l’intégralité de la Charte de l’OLP ; toujours en vigueur, elle constitue pourtant la référence cardinale de toutes les chartes définies par les autres mouvances du nationalisme palestinien, y compris les plus radicales. Georges-Elia Sarfati donne une analyse exhaustive de cette Charte dans un livre que je recommande, une fois encore, «L’antisionisme, Israël/Palestine aux miroirs d’Occident».

■ «Actuellement, on peut dire que la greffe occidentale a très mal pris chez les peuples arabes ; et la seule chose qui ait bien pris, c’est l’antisémitisme et, plus précisément, les ‘‘Protocoles des sages de Sion’’» confie Léon Poliakov dans un entretien avec Élizabeth Weber. C’est ce que je ne cesse de dire lorsque j’écris que les Arabes «viennent faire leurs courses chez nous», chez nous où l’antisémitisme a mobilisé nombre de «penseurs» et de «théoriciens», depuis fort longtemps.

■ Quelques semaines avant le 22 juillet 2011, je m’étais entretenu avec un voisin marocain sur l’état d’une Europe ébranlée par une crise économique et sociale dont nous commençons tout juste à goûter les délices, une Europe soumise à une crise structurelle annonciatrice des pires dangers. Je lui avais dit, grosso modo, que dans peu de temps une attaque pourrait viser des Musulmans et qu’elle serait probablement le fait d’un individu isolé ou d’un groupe réduit et sans ramification. Le 22 juillet 2011, cette conversation m’est revenue en apprenant les deux attaques conduites par Anders Breivik. Certes, elles ne visaient pas explicitement des Musulmans mais un Parti (au pouvoir) et des sympathisants de ce Parti dont les dadas sont la cause palestinienne, le blocus de Gaza et le multiculturalisme. J’ai cru comprendre que nombre d’entre eux se rêvaient héros à bord d’une «flottille de la Liberté». Ces attaques n’ont pas fait de victimes musulmanes mais elles visaient implicitement les Musulmans. Elles ont été conduites par un individu isolé qui avait eu des contacts avec un petit groupe idéologique, un individu dont les qualités d’organisation et de sang-froid laissent pantois. Il y aura un avant et un après 22 juillet 2011 comme il y a un avant et un après 11 septembre 2001. D’autres individus isolés, préparés idéologiquement, méthodiques et non soumis à l’émotion (elle impose son désordre) vont sans doute suivre l’exemple d’Anders Breivik. Mais cette fois, ce sera contre un groupe de Musulmans. Et pourquoi pas contre une mosquée ?

■ A méditer. Pierre-André Taguieff dans une entrevue avec Victor Malka : «Je fais l’hypothèse que la judéophobie antique aurait pu prendre la figure d’une xénophobie parmi d’autres si elle n’avait pas été intégrée et reformulée dans la doctrine chrétienne qui lui a donné une assise théologique et, sous cette forme élaborée, lui a permis de se diffuser universellement.»

■ A méditer également : «Si les Palestiniens déposaient les armes, il n’y aurait plus de conflit. Si les Israéliens déposaient les armes, il n’y aurait plus d’Israël.»

■ Ci-joint, un lien que je juge fondamental : «Donner une chance à la paix» sur YouTube : http://www.youtube.com/watch?v=jiI9wnoBSKc

■ Hier, les Juifs étaient qualifiés d’Orientaux et de «sans patrie» par les nationalismes occidentaux. Aujourd’hui, ils sont qualifiés d’Occidentaux auxquels on reproche d’avoir fondé une nation, Israël. Les Juifs étaient attaqués au nom du nationalisme ; ils sont désormais attaqués au nom de l’internationalisme (ou de l’alter-mondialisme). Ils étaient attaqués au nom du racisme ; ils sont attaqués au nom de l’antiracisme. Ils étaient attaqués au nom du christianisme ; ils sont attaqués au nom de l’islam.

■ En lien, un article de Raphaël Draï : «Veut-on la mort de l’État d’Israël ?», un article dont j’ai eu connaissance par Menahem Macina (www.Defriefing.org) :

http://www.debriefing.org/30803.html

■ Le 20 janvier 1969, Maxime Alexandre note dans son «Journal 1951-1975» : «Le télégramme du représentant actuel du catholicisme au Président libanais, après un raid de représailles israélien, me reste sur l’estomac. Ne parlons pas de la réaction du Grand Totem ! Paul VI se montre aussi antisémite que Pie XII. D’ailleurs, seuls les génies et les saints sont exempts d’antisémitisme.»

■ Emmanuel Levinas dans un entretien avec Élizabeth Weber : «Il y a aussi un autre cheminement dans ma pensée : s’apercevoir que l’humanité de l’homme ne se réduit pas à la liberté qui se manifeste dans le politique, mais signifie bonté, la possibilité de ce que l’écrivain Vassili Grossman appelle «la petite bonté» dans ce livre que je trouve fondamental, «Vie et Destin». C’est une bonté qui n’arrive pas à vaincre le mal, mais que le mal n’arrive pas à faire oublier, à vaincre non plus. C’est là, si on peut dire, que mène la réflexion sur le national-socialisme.»

(à suivre)  

 

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