C’est dans la bande de Gaza qu’a lieu la première Intifada, le 9 décembre 1987, et que naissent et grandissent le Hamas et le Jihad islamique.
Dans le plan de partage de l’O.N.U. (29 novembre 1947), la zone de Gaza doit intégrer l’État palestinien ; mais l’Égypte s’empare de cette zone sans se préoccuper des éventuelles revendications spécifiquement palestiniennes. La Transjordanie fait de même avec la Cisjordanie. La moitié des habitants de cette zone annexée par l’Égypte est constituée de réfugiés de la guerre israélo-arabe de 1948-1949. Au cours de l’occupation égyptienne (qui prend fin à l’issue de la guerre des Six Jours), les habitants de Gaza ne sont pas autorisés à quitter cette zone pour se rendre en Égypte proprement dite, l’Égypte qui ne fait qu’utiliser la bande de Gaza pour harceler dans des actions de commandos les abords israéliens.
Au cours de la guerre des Six Jours, Israël s’empare de la bande de Gaza et de tout le Sinaï. Suite aux accords de Camp David (septembre 1978), Israël restitue l’intégralité du Sinaï à l’exception de la bande de Gaza car… l’Égypte n’en veut à aucun prix. Menahem Begin, homme pourtant averti, commet l’erreur de ne pas rendre la bande de Gaza à ceux qui en avaient été les propriétaires. Erreur géopolitique dont nous subissons encore les conséquences. Depuis la fin de l’année 1987, avec la première Intifada, la bande de Gaza est l’un des cauchemars d’Israël et rien n’indique qu’il prenne fin dans un proche avenir. Le coût humain, économique et diplomatique est considérable pour Israël.
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Septembre noir, petit rappel historique. Des milices d’organisations palestiniennes radicales (dont le Front populaire de libération de la Palestine, F.P.L.P., de Georges Habache) installées en Jordanie depuis la guerre des Six Jours contestent toujours plus violemment le pouvoir du roi Hussein qui a été victime de tentatives d’assassinat. Au cours de l’été 1970, le roi Hussein et le président Nasser acceptent une proposition américaine de reconnaissance d’Israël sur ses frontières du 4 juin 1967, soit les frontières à la veille du déclanchement de la guerre des Six Jours. L’Organisation de libération de la Palestine (O.L.P.) s’y oppose et ses éléments les plus radicaux décident d’en finir avec la monarchie hachémite. Considérant la gravité des événements, avec notamment le détournement d’avions de ligne occidentaux, le roi Hussein ordonne d’en finir avec ces organisations palestiniennes radicales. Le 19 septembre, l’armée syrienne se met en mouvement pour soutenir ces dernières. Golda Meir, alors chef du gouvernement, est bien décidée à protéger la monarchie hachémite et elle menace la Syrie d’un engagement massif et direct d’Israël. L’armée syrienne stoppe immédiatement son avancée et ces milices palestiniennes ne doivent plus compter que sur elles-mêmes. Les combats entre les Bédouins du roi Hussein et les Palestiniens cessent le 27 septembre au soir. Des milliers de Palestiniens ont été tués, combattants mais aussi civils des camps de réfugiés. Des dizaines de milliers de Palestiniens sont par ailleurs chassés vers le Liban via la Syrie mais aussi Israël. Des leaders palestiniens feront l’objet de mesures d’expulsion jusqu’à l’été 1971.
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Au cours des semaines qui précèdent la guerre des Six Jours, avec les déclarations répétées et meurtrières des pays arabes invitant à en finir avec Israël, les Juifs du monde entier s’unissent et sont largement soutenus par des non-Juifs partout dans le monde. Depuis sa création, jamais l’État d’Israël n’avait rencontré un tel soutien – et jusqu’à ce jour il n’en a jamais rencontré de comparable. Tous les témoignages que j’ai pu recueillir à ce sujet vont dans ce sens. Même témoignage dans le livre de Jacob Tsur, “L’Épopée du sionisme”, un petit livre que j’ai devant moi dans sa version portugaise, une édition brésilienne. Jacob Tsur (1906-1990) a été notamment ambassadeur d’Israël en France (de 1953 à 1959) et dans divers pays d’Amérique du Sud.
Dans ce livre donc, Jacob Tsur rapporte cet enthousiasme pour défendre Israël, avec ces milliers de jeunes prêts à s’engager, ces vastes manifestations pro-israéliennes dans des capitales européennes et à New York, ces donateurs riches ou modestes. Les événements de juin 1967 accélèrent la prise de conscience des Juifs d’U.R.S.S., ce qui multiplie les refuzniks. 1967, le moment le plus glorieux de la geste militaire israélienne. Mais cette victoire contre une puissante coalition arabe va provoquer sans tarder une forte hostilité voire une haine envers Israël. Au lendemain de sa victoire, Israël fait savoir à l’Égypte et à la Syrie qu’il est prêt à ouvrir des négociations avec les pays arabes sans conditions préliminaires. Israël fait savoir à ces mêmes pays qu’il est prêt à évacuer les territoires conquis du Sinaï et du Golan sitôt qu’un traité de paix sera signé avec les pays belligérants, traité supposant la démilitarisation de ces territoires. Mais les pays arabes ne l’entendent pas ainsi. Au cours de la conférence inter-arabe de Khartoum, la décision est prise de ne pas reconnaître Israël, de refuser les négociations et la paix. L’Union soviétique qui cherche à conforter sa position dans la région saisit l’occasion et se positionne ouvertement du côté des ennemis d’Israël et rompt ses relations diplomatiques avec ce pays. Tous les satellites de l’Union soviétique font de même, à l’exception de la Roumanie. Une campagne antisioniste est organisée au sein des Nations Unies et dans des capitales ; elle prend dans certains cas (comme en Pologne) un caractère franchement antisémite. Le délégué pour l’Union soviétique à l’O.N.U. (dans son discours du 12 juillet 1987) n’hésite pas à déclarer que le sionisme est l’héritier du nazisme et que ses méthodes évoquent celles de Hitler. Le puissant appareil de propagande soviétique tourne à plein régime, relayé par les partis communistes du monde entier. Cette attaque contre le sionisme et Israël réactive un antisémitisme resté en sommeil depuis la chute du nazisme. Les pays arabes utilisent leurs immenses richesses venues des pétrodollars pour soutenir la propagande soviétique. L’extrême-gauche longtemps hostile au régime soviétique va rejoindre la chorale antisioniste. Cette extrême-gauche était occupée à dénoncer la guerre menée par les Américains au Vietnam ; cette guerre touchant à sa fin, ils enfourchent une nouvelle cause, la cause palestinienne. Les Palestiniens vont être présentés comme les seuls réfugiés au monde et les plus brutalisés de l’Histoire. Les Palestiniens déclarent ouvertement vouloir en finir avec Israël et tant qu’État. Retenant la leçon reçue au cours de la guerre des Six Jours, ils s’abstiennent de prôner la destruction des Juifs et vont jusqu’à proposer d’organiser leur rapatriement dans leurs pays d’origine, à commencer par les pays arabes… Ces rapatriements concerneraient selon les uns tous les Juifs et leurs descendants arrivés après 1917 ; d’autres, plus modérés, proposent que ces rapatriements concernent les Juifs arrivés après 1948.
Les pays arabes refusent tout traité de paix et se préparent pour le prochain round. L’Union soviétique les arme en quantité et avec son meilleur matériel.
6 octobre 1973, guerre du Kippour. Israël est surpris simultanément par l’Égypte et la Syrie. La menace est particulièrement sérieuse du côté des Syriens, sur les hauteurs du Golan. Israël parvient néanmoins à rétablir la situation. Lorsque le Conseil de sécurité de l’O.N.U. impose un cessez-le-feu, les forces israéliennes sont passées à l’ouest du canal de Suez, à une centaine de kilomètres du Caire, et elles encerclent toute la IIIème armée égyptienne. Au nord, les forces israéliennes se trouvent à une trentaine de kilomètres de Damas. Les conséquences de la guerre du Kippour sont moins favorables à Israël que ne l’avaient été celles des guerres précédentes. Et les pays arabes vont s’adonner au chantage pétrolier. Le premier choc pétrolier est une conséquence directe de la guerre du Kippour. Il va avoir un impact considérable sur le monde, notamment occidental. Par ailleurs, des pays d’Afrique et d’Asie qui avaient bénéficié d’une aide technique et scientifique de la part d’Israël suite à leur accession à l’indépendance et qui lui étaient reconnaissants se voient menacés d’un embargo pétrolier. Dans certains cas, une partie des pétrodollars sert à financer des mouvements rebelles aux gouvernements de ces pays ou bien à persuader (notamment en Afrique) ces gouvernements de rompre toute relation diplomatique avec Israël moyennant des aides financières considérables. Le tiers-monde se met à lancer des offensives contre Israël dans tous les organismes des Nations Unies et lors des conférences internationales, des offensives qui contribueront à isoler Israël, notamment par le biais de l’U.N.E.S.C.O.
Ainsi, un conflit local entre des nations devient-il international, mondial, avec glissement progressif de l’antisémitisme vers l’antisionisme, le sionisme étant de plus en plus considéré comme étant le fait des “Sages de Sion”. Des mythes antisémites séculaires sont recyclés et portés par toute une ingénuité progressiste. La propagande arabo-soviétique va s’employer à placer le sionisme en compagnie de l’impérialisme, du colonialisme, du racisme entre autres maux. Les pétrodollars ont bien encouragé un nouvel antisémitisme.
Olivier Ypsilantis