Ces trois articles sont librement inspirés d’articles rédigés (en anglais) par Eli E. Hertz. J’en apprécie tout particulièrement la rigueur factuelle, loin du bavardage médiatique. Nombre des appréciations que j’ai exprimées dans des articles sur mon blog rejoignent les siennes. Les trois articles qui m’ont inspiré ont été publiés sur Myths and Facts et sont respectivement intitulés : « Palestinians – Peoplehood Based on a Big Lie », « Israel’s Major Wars – The Legal Aspects of Coming into Possession of the Territories » et « Jerusalem ». J’ai allégé certains passages et ajouté des remarques personnelles.
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Les Palestiniens répètent haut et fort qu’ils sont un peuple ancien et autochtone. Mais l’étude historique ne va pas dans leur sens. La plupart des Arabes palestiniens sont des nouveaux-venus qui se sont installés au cours du mandat britannique sur la Palestine. Jusqu’à la guerre des Six Jours, moment où l’on commence à évoquer la création d’un État palestinien, les Arabes de la région se considèrent comme des membres de la « grande nation arabe » ou des « Syriens du Sud ». Non, les Palestiniens ne sont pas des autochtones comme le sont les Indiens d’Amérique ou les Aborigènes d’Australie, par exemple. Le « Staleless Palestinian people » est une fabrication. Nous ne sommes pas dans la vérité historique mais dans la propagande. Présenter les Palestiniens comme des autochtones (dépossédés de leurs terres) permet en toute logique de présenter les Juifs comme des colonisateurs : les Palestiniens sont aux Juifs ce que les Indiens d’Amérique ou les Aborigènes d’Australie sont aux immigrants venus d’Europe, un tour de passe-passe qui en prend à son aise avec la réalité historique.
Rappelons que les Juifs n’ont pas commencé à s’installer en Israël à l’occasion de sa fondation, en 1948, qu’ils étaient présents sur cette terre bien avant, au XIXe siècle et au début du XXe siècle, et je n’évoquerai pas l’Antiquité et la Bible. Cette zone, la Palestine, par ailleurs inculte et malsaine, un désert et des marécages, appartenait à l’Empire ottoman. Le conquérant arabe (au début du VIIe siècle) avait toujours négligé ces terres. Au début du XXe siècle, la population arabe à l’Ouest du Jourdain était d’environ un demi-million d’habitants et à l’est du Jourdain d’environ deux cents mille.
La conquête arabe et l’afflux de tribus nomades avaient ruiné les aménagements agricoles et ses terrasses, favorisant l’érosion ; et des marécages s’étaient formés un peu partout, favorisant la malaria. A ce piètre état des lieux s’ajoutait un régime tyrannique, avec pléthore d’impôts et propriétaires absents. L’essentiel de la population autochtone en vint à émigrer ou à disparaître. Bien peu de Juifs et d’Arabes vivaient dans la région avant l’arrivée des premiers sionistes, dans les années 1880 ; et ceux qui y vivaient devaient supporter de très dures conditions.
La plupart des Arabes installés à l’ouest du Jourdain – the West Bank, soit la Judée et la Samarie plus communément appelées « Cisjordanie » – et à Gaza sont de nouveaux venus originaires des pays arabes voisins au début du XXe siècle, attirés par la relative prospérité économique impulsée par le mouvement sioniste et les Britanniques dans les années 1920 et 1930. Les rapports des voyageurs occidentaux vont tous dans le même sens : il s’agit d’une région désertique et très peu peuplée. Le recensement ottoman de 1882 relève 141 000 Musulmans dans ce qui allait devenir Israël. Ce nombre est probablement erroné. Ils devaient être plutôt 350 000 à 425 000, beaucoup se dissimulant pour ne pas avoir à payer d’impôts. Le recensement britannique de 1922 fait état de 650 000 Musulmans.
Des photographies aériennes prises par des aviateurs allemands au cours de la Première Guerre mondiale montrent un pays sous-développé avec de pauvres hameaux, comme Ashdod ou Haïfa. Rien qu’en 1934, 30 000 Arabes de Syrie franchissent la frontière nord de la Palestine mandataire, attirés par le développement de la région.
Rien n’unit les Palestiniens en dehors de leur détestation du sionisme et leur volonté de l’éradiquer. Ils se montrent incapables de penser un État palestinien et se contentent de vitupérer Israël. Il n’y a pas d’entité palestinienne, il n’y a que de l’antisionisme et l’antisionisme malgré sa virulence ne peut suffire à constituer une conscience nationale. L’opposition à l’immigration juive dans les années 1920-1930 a été activée par le Grand Mufti Hajj Amin al-Husseini alors que naissaient le Liban, la Syrie, la Transjordanie et l’Irak suite à l’effacement de l’Empire ottoman, un ensemble de pays structuré par les Français et les Britanniques sous l’égide des Nations Unies.
La majorité des Arabes de Palestine, et durant des décennies, n’a pas eu en tête de fonder un État palestinien. Le cadre de référence restait (et reste encore) pour la plupart d’entre eux le clan ou la tribu, la religion, le village d’origine. Ils se voyaient comme des « Syriens du Sud » ; et on sait que sous l’Empire ottoman, la Syrie représentait une région bien plus vaste que l’actuelle Syrie, avec ses frontières définies par les Français et les Britanniques en 1920.
Le Grand Mufti Hajj Amin al-Husseini passa doucement du panarabisme à une entité palestinienne clairement définie. Cet homme est à l’origine des violences de 1929 puis de 1936-1939. Il activa les craintes arabes en déclarant de diverses manières que les Juifs finiraient par spolier voire dominer les Arabes si rien n’était fait. Il a pavé la voie vers le refus de tout dialogue – Yasser Arafat (sous des airs à l’occasion plus aimables) n’a pas agi autrement, enfermant ceux qu’il représentait dans une rumination sans fin avec exécration voire diabolisation du Juif. Ces hommes ont conduit les Palestiniens dans une impasse. Ils ne furent que l’instrument de leurs propres ambitions.
La cause « palestinienne » ou, plus exactement, des Arabes de Palestine, devint le point de ralliement du nationalisme arabe dans tout le Moyen-Orient. Les pays arabes, de création récente (les années qui font immédiatement suite à la Première Guerre mondiale avec le morcellement de l’Empire ottoman), avaient été découpés à grands coups. Ces États manquaient d’une logique interne capable de cimenter les communautés qui y vivaient. Le nationalisme arabe avait besoin d’un fortifiant et d’un liant. Leur opposition au sionisme, soit cette volonté des Juifs de fonder un État majoritairement juif, sera ce fortifiant et ce liant.
Le palestinisme (palestinianism) qui s’affirme dès les années 1920 est né d’un refus du nationalisme juif, avec tentatives (souvent violentes) de décourager tous les efforts juifs pour s’affirmer politiquement, y compris en partageant le pouvoir avec les Arabes de Palestine. Au fond, la détermination juive fascinait et irritait les Arabes qui ne voulaient s’affirmer qu’en disant « non, non et non » et sur divers modes, des plus violents (attentats et pogroms) aux plus subtils (manœuvres diplomatiques dont Yasser Arafat a su user et abuser après avoir pratiqué le terrorisme). On sait par exemple que sous le Mandat britannique (1923-1948) les Arabes de la région refusèrent de créer une « Arab Agency » afin d’œuvrer à leur propre développement comme le faisaient les Juifs de la région avec la « Jewish Agency ».
Si nous prenons un peu de recul, il est plus juste de remplacer « Palestiniens » ou « Arabes de Palestine » par « Musulmans », car l’agrégat se fait non pas au nom du nationalisme palestinien – et pour cause – mais de l’islam. On fait corps contre les non-Musulmans : les Croisés, les Britanniques, les Juifs, puis plus récemment contre les Judéo-croisés, un néologisme qui est entré dans le lexique du djihad. Lorsque le pouvoir politique est revenu aux Musulmans, l’ardent patriotisme des Arabes de Palestine s’est aussitôt dissipé comme un banc de brume sous l’effet du vent.
Aucun gouvernement représentatif arabe n’a été établi en Palestine parce que les autres États arabes avaient besoin que perdure la « question palestinienne » pour fédérer un monde divisé et, par ailleurs, masquer les problèmes intérieurs de chaque pays arabe. Lorsque les Arabes attaquent Israël le lendemain même de la déclaration d’indépendance ce n’est pas pour libérer leurs « frères » mais pour arracher un territoire et l’annexer à leurs pays respectifs tout en espérant affirmer leur pouvoir à l’intérieur de leurs pays respectifs. On sait qu’une déclaration de guerre a généralement pour effet de souder le pays autour de ses dirigeants, quels qu’ils soient, et ce n’est pas une spécificité arabe. Il est vrai que l’affaire peu mal tourner comme ce fut le cas pour le général Leopoldo Galtieri avec l’affaire des Falklands et les colonels grecs avec l’affaire de Chypre.
L’indépendance de la Palestine n’a jamais établi un consensus dans le monde arabe. Il s’agissait et il s’agit encore de maintenir la « question palestinienne » et, ainsi, d’aviver le ressentiment contre Israël, et pas seulement dans le monde arabe. Les partisans d’une identité palestinienne bien définie n’ont jamais mobilisé les foules arabes lorsque la Cisjordanie ou Gaza se sont retrouvés sous la domination respective des Jordaniens et des Égyptiens. Mais après la guerre des Six Jours (1967), et comme par enchantement, la question de l’identité palestinienne a été remise sur le tapis et furieusement réactivée. Le palestinisme manque donc singulièrement de substance. La société arabe de Cisjordanie et de Gaza est parcourue de profonds clivages notamment liés à des rivalités de type clanique ou tribal. Ce qui unit les Palestiniens est exclusivement une haine soigneusement entretenue d’Israël et de la nation juive.
(à suivre)
Olivier Ypsilantis
Cher Olivier,
Vous écrivez:
La plupart des Arabes installés à l’ouest du Jourdain – the West Bank, soit la Judée et la Samarie plus communément appelées « Cisjordanie » – et à Gaza sont de nouveaux venus originaires des pays arabes voisins au début du XXe siècle, attirés par la relative prospérité économique impulsée par le mouvement sioniste et les Britanniques dans les années 1920 et 1930.
Déjà, à la fin du 19 ème siècle, le mouvement sioniste inquiétait les Turcs. Et donc pour contrer son influence, le gouvernement turc (qui voyait aussi son empire se déliter), avait alors promulgué une loi en 1872, favorisant l’arrivée de musulmans dans le Pashalik de Palestine, en les dispensant d’impôts et de service militaire pendant 10 ans.
C’est ainsi que non seulement les Arabes affluèrent des contrées voisines mais aussi de nombreux musulmans du Caucase, de Bosnie, et d’Afrique du Nord.
Bien amicalement,
Chère Hannah,
Je vous remercie pour cette précision bienvenue qui amplifie l’article. De fait, je connaissais cette histoire mais, curieusement, elle ne m’est pas venue à l’esprit lorsque je l’ai écrit.
Chère Hannah, cher Olivier
Cela explique pourquoi beaucoup de “Palestiniens” sont blonds de type “caucasien”…
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En fait, je crois que si on voulait dire à quel état appartient la Palestine, elle appartient à la Syrie historique, au dela de l’appartenance de cette dernière à l’empire ottoman. Donc vous avez raison de dire qu’il n’y a pas de peuple palestininen comme peuple autochtone. Il y a une province de Palestine dans la nation syrienne historique. Et les habitants de cette province sont des Syriens. Si l’on ne veut pas s’intéresser aux nationalités historiques, on pourra alors dire que les Palestiniens sont tout simplement des Arabes, et la Palestine appartient au monde arabe, pas juif. Le fait que la province de Palestine ait été pauvre, insalubre, et que souvent ses habitants aient eu envie de la quitter, est irrelevant quant à l’ethnicité de ce peuple et du territoire qui était le sien. Si une maison est delabrée et que la famille qui en est propriétaire envisage de la quitter pour s’installer ailleurs plus à son aise, cela ne donne aucun droit à une autre famille de s’y installer en en évinçant les occupants légitimes, même si l’autre famille serait mieux capable d’assainir la maison et de la rendre habitable. Disons que si on avait décidé de créer un foyer juif en Auvergne, alors l’Auvergne était désertée par les Auvergnats, on pourrait peut-être contester que le peuple auvergnat soit un “peuple” autochtone en soi. Mais il n’en demeurerait pas moins que l’Auvergne est une province française et que la France, pays qui a fait des guerres cruelles pour récupérer l’Alsace-Moselle, n’accepterait jamais de céder une portion de son territoire, même déserté par ses habitants, à un peuple non français. C’est évident. Il en va de même de la Palestine. Par conséquent la seule façon dont on puisse tenter de justifier l’occupation d’un territoire sur lequel vit déjà un peuple depuis des siècles, que ce peuple ait une identité propre ou qu’il soit un fragment d’un autre peuple plus large, ne pourrait être, s’agissant de la Palestine ou Israël, que la référence à la bible hébraïque. Mais cet argument n’est évidemment pas opposable aux non Juifs. Cela va de soi. En conclusion, sauf pour les Juifs sionistes et religieux, cet argunent est irrecevable. En conclusion, les Juifs n’occupent la Palestine que par droit de conquête et par aucun autre droit. Le droit de conquête donne un titre, ce n’est pas nul. Par exemple la Russie occupe Königsberg, territoire allemand, et la Subérue, territoire chinois, elle a occupé longtemps les pays baltes, par droit de conquête. Et cela est, a été, reconnu en droit des gens. La Turquie a occupé la Gèce pendant des siècles par droit de conquête, on ne l’apprendra pas à un monsieur qui s’appelle Ypsilantis. Alors je ne comprend pas pourquoi le droit de conquête ne suffirait pas comme justification de l’existence de l’Etat d’Israël, en droit des gens s’entend. Pour les rabbins, libre à eux de voir les choses autrement, mais seulement dans leurs yeschivas, bien entendu.