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Griffonné le 9 avril 2016 (Pour des « Je me souviens »)

 

Les bouches du métropolitain parisien de Hector Guimard. Je me souviens avec précision de certains de leurs éléments mais (curieusement) j’ai la plus grande difficulté à en nommer une seule par le nom de la station.

« Le Spectacle du Monde » chez Tante G., des piles considérables dans un placard de son salon. C’est par ce mensuel que j’ai découvert nombre d’artistes et d’écrivains lorsque j’étais enfant et adolescent, notamment Ernst Jünger et Ernst von Salomon, des écrivains et des artistes (très) peu — ou pas — évoqués par la presse bien-pensante — la presse de gauche

Aux murs. Chez ma grand-mère paternelle, une reproduction gravée d’un tableau de Paul Delaroche, « Les Enfants d’Édouard ». Chez mon oncle, des épées et des sabres disposés en éventails. Chez ma belle-mère, une lithographie reproduisant la bataille d’Épiscopia remportée par un parent contre la flotte turque d’Orchan, au large de Rhodes. Chez (?), des cadres avec, alignées, des séries John Player Cigarette Cards. Je me souviens tout particulièrement de : Uniforms of the Territorial Army, Kings & Queens of England. Il y en avait bien d’autres.

 

Player’s Cigarette Cards

 

Les téléphones (noirs) en bakélite. Ils sont si précis dans ma mémoire que je pourrais les décrire avec un luxe de détails sur une page entière. Il ne serait bien sûr question que de certains modèles, car ils ont été si nombreux.

Dans le grenier de la grand maison du Béarn, des malles en bois peinturlurées en camouflé, avec grade, nom et unité du grand-oncle, lieutenant-colonel aux spahis. Le casque Adrian avec RF inscrit dans un croissant de lune. Et, dans le cabinet de toilette, la chaise percée de sa femme.

Les monographies Skira, collection Le goût de notre temps, avec emboîtage en carton. Elles me disent d’emblée ma mère.

Parmi les emblèmes du père. Ses pipes. (La manière qu’il avait d’écraser le tabac dans leur fourneau avec une boîte d’allumettes.) Les cartouches Gévelot. « Valeurs actuelles » et « Le Figaro » dont les numéros s’empilaient dans un coin de son bureau, sur le radiateur. Je me souviens qu’il achetait des babouches dans un magasin de Paris (« A la Ville de Mogador » ?), des babouches d’un jaune plutôt vif (comme les pattes de Donald Duck) et en forme de fer à repasser. Je le revois donc, le soir, dans son bureau, en costume-cravate avec ces drôles de « chaussons ».

Les poudres Houbigant de ma grand-mère et l’odeur qui longtemps après sa mort flotta dans son cabinet de toilette.

Le Super Constellation de Dinky Supertoys et sa triple dérive. Dinky Supertoys aussi avec le tracteur Willème (orange) et sa semi-remorque fardier transportant quelques morceaux de branchettes mais qui à l’échelle suggéraient d’imposants troncs d’arbres ; le tracteur Unic saharien (sable) équipé de la même semi-remorque fardier mais transportant des tubes d’exploration pétrolière qui s’emboîtaient les uns dans les autres ; le camion Brockway avec pont flottant (des parties pneumatiques gonflables et des éléments de rampe à assembler). Je pourrais continuer longuement ainsi car les voitures (les vraies et les jouets) sont parmi les éléments les plus emblématiques d’une époque : elles la disent d’un coup, elles agissent aussi sûrement que la madeleine de Proust. Lorsque je dis voitures,  je pense aussi camions et camionnettes, motocyclettes ; bref, tous ce qui a roulé. Ce qui a roulé agit encore plus fortement sur le souvenir que la mode vestimentaire qui si souvent fait appel au rétro.

 

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Le souvenir d’une lecture me revient d’un coup, « A 1950s Childhood – From Tin Baths to Bread and Dripping » de Paul Feeney, né en 1948. Je reprends ce livre qui est un chef-d’œuvre du genre pour en extraire quelques souvenirs antérieurs aux miens mais qui à l’occasion me reconduisent aux miens. Ce livre est divisé en onze chapitres que je vais nommer un à un pour en extraire une séquence du souvenir dans la langue d’origine (ne rien perdre de la saveur) et la faire suivre d’un « Je me souviens » personnel plus ou moins directement inspiré par la séquence retenue.

 

Chapitre 1 – A Decade of Innocence.

Railway stations were cold, smelly and unwelcoming places, but there always seemed to be porters roaming around and it was possible to get help with lifting luggage on and off trains, particularly if you were travelling first class! 

Je me souviens des petits porteurs de Fromentine. Ils proposaient leurs services sur l’embarcadère-débarcadère, un simple ponton fait de madriers solides comme des traverses de chemin de fer.

 

Chapitre 2 – Home Life.

The milkman also wore a uniform, including a collar and tie and a peaked-cap. The milk was delivered from either a horse-drawn milk cart or a hand-pulled milk float, also known as a pedestrian-controlled float. Each morning, the milk magically arrived on our doorstep before you had even poked your head out from the bedclothes.

Je me souviens de l’uniforme des facteurs, avec casquette à visière. Je me souviens que le facteur refusa de porter le courrier chez un voisin. Il avait eu son fond de culotte arraché par les dents du chien-loup. « Il ne supporte pas les uniformes » se lamentait son propriétaire.

 

Chapitre 3 – The Streets and Bomb Ruins.

The coins and notes that we all used in the 1950s have been referred to as ‟old money” since decimalisation took place in 1971.

Je ne me souviens pas du passage des anciens francs aux nouveaux francs, lorsque cent francs devinrent un franc, lorsque dix mille francs devinrent cent francs et ainsi de suite. Mais je me souviens fort bien des beaux billets de cent francs, des Corneille, avec portrait inscrit dans un médaillon digne d’un plafond Grand Siècle.

 

Le billet de Cent francs

 

Chapitre 4 – Games, Hobbies and Pastimes.

The Beano and The Dandy were the two best-known and most popular ‟must-read” comics for both girls and boys — all those fabulous comic-strip characters, like Dennis the Menace, The Bash Street Kids, and Desperate Dan — just to mention a few.

Mes souvenirs de BD se sont constitués dans un placard (sorte de pièce dans une pièce) d’une grande maison. Il contenait le meilleur de la BD d’alors, des albums entreposés là par un cousin plus âgé. Je les lisais à l’insu de ma mère, aussi douce qu’autoritaire, qui jugeait ces lectures comme une perte de temps.

 

Chapitre 5 – Entertainment, Music and Fashion.

All the kids loved Doris Day after seeing her star in Calamity Jane, with all those wonderful songs that you just couldn’t get out of your head. She made the film Love Me or Leave Me in 1955, and became the first actress to get star billing over James Cagney in thirty years, and he got her the part!

Calamity Jane ! J’ai longtemps entendu ce nom sans savoir qui il désignait. La première actrice dont je suis tombé plus ou moins amoureux est Marlène Jobert, me semble-t-il, ses yeux verts, ses cheveux auburn, son petit air préraphaélite, ses taches de rousseur peut-être.

 

Chapitre 6 – Radio and Television.

The Pinky and Perky Show (1957) BBC TV. A pair of puppet pigs that wore different clothes but were indistinguishable on 1950s black and white televisions. Pinky and Perky spoke and sang in high-pitched squeaky voices, created from speeded-up recordings, and they performed comedy sketches. They became very popular in the 1960s.

Je ne regardais qu’exceptionnellement la télévision puisque nous ne l’avions pas chez nous par décision maternelle. Je me souviens que mon héros était Zorro (Thierry la Fronde me semblait déjà un peu mièvre), sur la première chaîne de l’ORTF. Je retrouverai Zorro bien des années plus tard, magnifiquement interprété par Antonio Banderas.

 

Chapitre 7 – School Life.

Corporal punishment was much more prevalent in secondary schools, but again, predominantly for boys, although you did hear stories of girls being slapped with a slipper or caned.

Je n’ai pas vraiment connu le corporal (physical) punishment. Il est vrai que les professeurs et surveillants nous tiraient volontiers les oreilles et les cheveux, certains avec force, et qu’ils nous infligeaient des punitions diverses et variées ; mais pas de caning, de flogging et autres douceurs anglaises…

 

Chapitre 8 – School Holidays.

There weren’t many cars or other motor vehicles around in the ’50s, and a lot of back-streets were completely free of them, making them ideal playgrounds.

J’ai grandi à Paris et dans ses environs et je ne me souviens pas vraiment de la relative absence des véhicules à moteur. Je m’en souviens, et bien, dans l’U.R.S.S. des années 1970 et dans les pays dits « de l’Est » des années 1980 : routes de Pologne et de Roumanie, rues de Berlin-Est, de Prague et de Budapest. J’ai une certaine nostalgie de cette circulation parcimonieuse.

 

Prague, Vaclavské náměstí, année 1980. La principale artère de la capitale de la Tchécoslovaquie avec circulation parcimonieuse.

 

Chapitre 9 – Christmas.

The tradition of sending Christmas cards is still very strong today, but in the 1950s few homes had telephones installed and so the only way to pass on Christmas greetings to family and friends was by way of Christmas cards, postcards or letters.

Je me souviens de mon émerveillement d’enfant devant des Christmas cards que mes parents recevaient d’amis anglais. Je les détaillais — et les détaille encore — avec délice.

 

Chapitre 10 – Memorable 1950s Events.

On Tuesday 2 June 1953, an estimated 3 million people lined the streets of London to see the procession of their newly crowned queen.

J’ai un souvenir très précis de la mort de Jean XXIII, un souvenir qui compte parmi mes premiers souvenirs — probablement mon premier souvenir « officiel ».

 

Chapitre 11 – Whatever Happened To?

In the 1950s, we were all used to seeing Bobbies walking the beat, but there are far fewer sightings of them nowadays. 

Je me souviens (bien que vaguement) de la police parisienne avec son képi cylindrique et son baudrier auquel étaient accrochés un bâton et un pistolet.

Olivier Ypsilantis

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