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RAREMENT LU UNE ANALYSE AUSSI PERCUTANTE

MessagePublié: Octobre 10th, 2016, 10:50 am
par Nina
TRUMP ! TRUMP ! TRUMP !

Tout le monde y va de sa haine sur l'horrible Trump ! Robert de Niro veut lui coller un pain dans la tronche et a honte de ce "trouduc américain" qui embarrasse tout le pays.

Or, je cherche...

Je cherche d'abord d'où lui vient cette popularité incroyable et comment il a réussi malgré tout à arriver tout en haut de la marche pour contrer la démocrate Hillary Clinton.

Bordel de merde...Comment fait-il avec toutes ses bourdes ? Tous les jours ? On va même lui chercher des trucs vieux de 10 ans où il joue les graveleux dégeulasses !

Le parti démocrate distille...ventile...distribue au compte-gouttes toutes les merdouilles de Donald afin d'aller jusqu'au bout de la victoire.

Même son parti le lâche ! Normal...Tous ceux qui veulent rester au pouvoir : députés et sénateurs ont plutôt intérêt à ne pas sentir le soufre s'ils veulent être réélus.

Donald semble imperturbable. Pire encore, ses fans se fendent la gueule et ne le lâchent pas.

ANALYSE DE LAURE MANDEVILLE POUR LE FIGARO

La grande difficulté, avec Donald Trump, c’est qu’on est à la fois face à une caricature et face à un phénomène bien plus complexe.

Une caricature d’abord, car tout chez lui, semble magnifié. L’appétit de pouvoir, l’ego, la grossièreté des manières, les obsessions, les tweets épidermiques, l’étalage voyant de son succès sur toutes les tours qu’il a construites et qui portent son nom.

Donald Trump joue en réalité à merveille de son côté caricatural, il simplifie les choses, provoque, indigne, et cela marche parce que notre monde du 21e siècle se gargarise de ces simplifications outrancières, à l’heure de l’information immédiate et fragmentée. La machine médiatique est comme un ventre qui a toujours besoin de nouveaux scandales et Donald, le commercial, le sait mieux que personne, parce qu’il a créé et animé une émission de téléréalité pendant des années.

Il sait que la politique américaine actuelle est un grand cirque, où celui qui crie le plus fort a souvent raison parce que c’est lui qui «fait le buzz».

En même temps, ne voir que la caricature qu’il projette serait rater le phénomène Trump et l’histoire stupéfiante de son succès électoral.

Derrière l’image télévisuelle simplificatrice, se cache un homme intelligent, rusé et avisé, qui a géré un empire de milliards de dollars et employé des dizaines de milliers de personnes. Ce n’est pas rien !

Selon plusieurs proches du milliardaire que j’ai interrogés, Trump réfléchit de plus à une candidature présidentielle depuis des années, et il a su capter, au-delà de l’air du temps, la colère profonde qui traversait l’Amérique, puis l’exprimer et la chevaucher.
Grâce à ses instincts politiques exceptionnels, il a vu ce que personne d’autre – à part peut-être le démocrate Bernie Sanders – n’avait su voir: le gigantesque ras le bol d’un pays en quête de protection contre les effets déstabilisants de la globalisation, de l’immigration massive et du terrorisme islamique; sa peur du déclin aussi.

En ce sens, Donald Trump s’est dressé contre le modèle dominant plébiscité par les élites et a changé la nature du débat de la présidentielle. Il a remis à l’ordre du jour l’idée de protection du pays, en prétendant au rôle de shérif aux larges épaules face aux dangers d’un monde instable et dangereux.

Cela révèle au minimum une personnalité sacrément indépendante, un côté indomptable qui explique sans doute l’admiration de ses partisans…Ils ont l’impression que cet homme explosif ne se laissera impressionner par rien ni personne.

Beaucoup des gens qui le connaissent affirment d’ailleurs que Donald Trump a plusieurs visages : le personnage public, flashy, égotiste, excessif, qui ne veut jamais avouer ses faiblesses parce qu’il doit «vendre» sa marchandise, perpétuer le mythe, et un personnage privé plus nuancé, plus modéré et plus pragmatique, qui sait écouter les autres et ne choisit pas toujours l’option la plus extrême…

Toute la difficulté et tout le mystère, pour l’observateur est de s’y retrouver entre ces différents Trump. C’est loin d’être facile, surtout dans le contexte de quasi hystérie qui règne dans l’élite médiatique et politique américaine, tout entière liguée contre lui. Il est parfois très difficile de discerner ce qui relève de l’analyse pertinente ou de la posture de combat anti-Trump. (…) à de rares exceptions près, les commentateurs n’ont pas vu venir le phénomène Trump, parce qu’il était «en dehors des clous», impensable selon leurs propres «grilles de lecture».

Trop scandaleux et trop extrême, pensaient-ils. Il a fait exploser tant de codes en attaquant ses adversaires au dessous de la ceinture et s’emparant de sujets largement tabous, qu’ils ont cru que «le grossier personnage» ne durerait pas ! Ils se sont dit que quelqu’un qui se contredisait autant ou disait autant de contre vérités, finirait par en subir les conséquences.

Bref, ils ont vu en lui soit un clown soit un fasciste – sans réaliser que toutes les inexactitudes ou dérapages de Trump lui seraient pardonnés comme autant de péchés véniels, parce qu’il ose dire haut et fort ce que son électorat considère comme une vérité fondamentale: à savoir que l’Amérique doit faire respecter ses frontières parce qu’un pays sans frontières n’est plus un pays.

Plus profondément, je pense que les élites des deux côtes ont raté le phénomène Trump (et le phénomène Sanders), parce qu’elles sont de plus en plus coupées du peuple et de ses préoccupations, qu’elles vivent entre elles, se cooptent entre elles, s’enrichissent entre elles, et défendent une version «du progrès» très post-moderne, détachée des préoccupations de nombreux Américains. (très juste !)

Soyons clairs, si Trump est à bien des égards exaspérant et inquiétant, il y a néanmoins quelque chose de pourri et d’endogame dans le royaume de Washington.

Le peuple se sent hors jeu. (…) Ce statut de milliardaire du peuple est crédible parce qu’il ne s’est jamais senti membre de l’élite bien née, dont il aime se moquer en la taxant «d’élite du sperme chanceux».

Cette dernière ne l’a d’ailleurs jamais vraiment accepté, lui le parvenu du Queens, venu de la banlieue, qui aime tout ce qui brille.
Il ne faut pas oublier en revanche que Donald a grandi sur les chantiers de construction, où il accompagnait son père déjà tout petit, ce qui l’a mis au contact des classes populaires. Il parle exactement comme eux!

Quand je me promenais à travers l’Amérique à la rencontre de ses électeurs, c’est toujours ce dont ils s’étonnaient. Ils disaient: «Donald parle comme nous, pense comme nous, est comme nous».

Le fait qu’il soit riche, n’est pas un obstacle parce qu’on est en Amérique, pas en France. Les Américains aiment la richesse et le succès. (…) L’un des atouts de Trump, pour ses partisans, c’est qu’il est politiquement incorrect dans un pays qui l’est devenu à l’excès.

Sur l’islam radical (qu’Obama ne voulait même pas nommer comme une menace!), sur les maux de l’immigration illégale et maints autres sujets.

Ses fans se disent notamment exaspérés par le tour pris par certains débats, comme celui sur les toilettes «neutres» que l’administration actuelle veut établir au nom du droit des «personnes au genre fluide» à «ne pas être offensés».

Ils apprécient que Donald veuille rétablir l’expression de Joyeux Noël, de plus en plus bannie au profit de l’expression Joyeuses fêtes, au motif qu’il ne faut pas risquer de blesser certaines minorités religieuses non chrétiennes…

Ils se demandent pourquoi les salles de classe des universités, lieu où la liberté d’expression est supposée sacro-sainte, sont désormais surveillées par une «police de la pensée» étudiante orwellienne, prête à demander des comptes aux professeurs chaque fois qu’un élève s’estime «offensé» dans son identité…

Les fans de Trump sont exaspérés d’avoir vu le nom du club de football américain «Red Skins» soudainement banni du vocabulaire de plusieurs journaux, dont le Washington Post, (et remplacé par le mot R…avec trois points de suspension), au motif que certaines tribus indiennes jugeaient l’appellation raciste et insultante. (Le débat, qui avait mobilisé le Congrès, et l’administration Obama, a finalement été enterré après de longs mois, quand une enquête a révélé que l’écrasante majorité des tribus indiennes aimait finalement ce nom…).

Dans ce contexte, Trump a été jugé «rafraîchissant» par ses soutiens, presque libérateur. (…)

Pour moi, le phénomène Trump est la rencontre d’un homme hors normes et d’un mouvement de rébellion populaire profond, qui dépasse de loin sa propre personne. C’est une lame de fond, anti globalisation et anti immigration illégale, qui traverse en réalité tout l’Occident. Trump surfe sur la même vague que les politiques britanniques qui ont soutenu le Brexit, ou que Marine Le Pen en France.

La différence, c’est que Trump est une version américaine du phénomène, avec tout ce que cela implique de pragmatisme et d’attachement au capitalisme. (…) Trump n’est pas un idéologue.

Il a longtemps été démocrate avant d’être républicain et il transgresse les frontières politiques classiques des partis. Favorable à une forme de protectionnisme et une remise en cause des accords de commerce qui sont défavorables à son pays, il est à gauche sur les questions de libre échange, mais aussi sur la protection sociale des plus pauvres, qu’il veut renforcer, et sur les questions de société, sur lesquelles il affiche une vision libérale de New Yorkais, certainement pas un credo conservateur clair. De ce point de vue là, il est post reaganien.

Mais Donald Trump est clairement à droite sur la question de l’immigration illégale et des frontières, et celle des impôts. Au fond, c’est à la fois un marchand et un nationaliste, qui se voit comme un pragmatique, dont le but sera de faire «des bons deals» pour son pays.

Il n’est pas là pour changer le monde, contrairement à Obama. (ndlr : j'adore ce passage...)

Ce qu’il veut, c’est remettre l’Amérique au premier plan, la protéger. Son instinct de politique étrangère est clairement du côté des réalistes et des prudents, car Trump juge que les Etats-Unis se sont laissé entraîner dans des aventures qui les ont affaiblis et n’ont pas réglé les crises. Il ne veut plus d’une Amérique jouant les gendarmes du monde. Mais vu sa tendance aux volte face et vu ce qu’il dit sur le rôle que devrait jouer l’Amérique pour venir à bout de la menace de l’islam radical, comme elle l’a fait avec le nazisme et le communisme, Donald Trump pourrait fort bien changer d’avis, et revenir à un credo plus interventionniste avec le temps.

Ses instincts sont au repli, mais il reste largement imprévisible. (…) De nombreuses questions se posent sur son caractère, ses foucades, son narcissisme et sa capacité à se contrôler, si importante chez le président de la première puissance du monde!

Je ne suis pas pour autant convaincue par l’image de «Hitler», fasciste et raciste, qui lui a été accolée par la presse américaine. Hitler avait écrit Mein Kamp. Donald Trump, lui, a écrit «L ‘art du deal» et avait envisagé juste après la publication de ce premier livre, de se présenter à la présidence en prenant sur son ticket la vedette de télévision afro-américaine démocrate Oprah Winfrey, un élément qui ne colle pas avec l’image d’un raciste anti femmes!

Ses enfants et nombre de ses collaborateurs affirment qu’il ne discrimine pas les gens en fonction de leur sexe ou de la couleur de leur peau, mais en fonction de leurs mérites, et que c’est pour cette même raison qu’il est capable de s’en prendre aux représentants du sexe faible ou des minorités avec une grande brutalité verbale, ne voyant pas la nécessité de prendre des gants.

Les questions les plus lourdes concernant Trump, sont selon moi plutôt liées à la manière dont il réagirait, s’il ne parvenait pas à tenir ses promesses, une fois à la Maison-Blanche. Tout président américain est confronté à la complexité de l’exercice du pouvoir dans un système démocratique extrêmement contraignant. Cet homme d’affaires habitué à diriger un empire immobilier pyramidal, dont il est le seul maître à bord, tenterait-il de contourner le système pour arriver à ses fins et prouver au peuple qu’il est bien le meilleur, en agissant dans une zone grise, avec l’aide des personnages sulfureux qui l’ont accompagné dans ses affaires ?

Et comment se comporterait-il avec ses adversaires politiques ou les représentants de la presse, vu la brutalité et l’acharnement dont il fait preuve envers ceux qui se mettent sur sa route ?

Hériterait-on d’un Berlusconi ou d’un Nixon puissance 1000 ?

Autre interrogation, vu la fascination qu’exerce sur lui le régime autoritaire de Vladimir Poutine: serait-il prêt à sacrifier le droit international et l’indépendance de certains alliés européens, pour trouver un accord avec le patron du Kremlin sur les sujets lui tenant à cœur, notamment en Syrie ?

Bref, pourrait-il accepter une forme de Yalta bis, et remettre en cause le rôle de l’Amérique dans la défense de l’ordre libéral et démocratique de l’Occident et du monde depuis 1945 ?

Autant de questions cruciales auxquelles Donald Trump a pour l’instant répondu avec plus de désinvolture que de clarté.

Laure Mandeville - le Figaro


Le moins que l'on puisse dire, c'est que Laure Mandeville a écrit un article percutant mais surtout bien balancé sur la complexité Trump.

Il n'y a rien à faire avec le "pour" ou "contre" mais d'une analyse que je trouve brillante du personnage Trump.

Mon propre ressenti sur Don Trump est du même ordre et je crois volontiers Laure Mandeville et ce qu'elle a entendu des fans du milliardaire.

Oui, il y a rupture entre le "haut" et le "bas", entre le peuple et l'élite qui tient absolument tout aux USA jusqu'aux bons points qu'elle distribue au bien-pensants et aux mauvais pensants comme Trump et ceux qui le suivent.

Il fallait partager cette analyse. Voilà qui est fait.