LA GUERRE ENTRE JUIFS

LA GUERRE ENTRE JUIFS

Messagepar Nina » Janvier 15th, 2013, 1:07 pm

Beaucoup évoquent avec peine cette guerre des juifs, entre juifs.

Beaucoup s'émeuvent que les critiques acerbes mettant en danger l'existence même d'Israel, proviennent précisément de juifs israéliens.

Peu à peu, comme lorsqu'on revient d'un cauchemar long et douloureux, des voix s'élèvent contre cet état de fait et une voie nouvelle s'ouvre enfin au débat que tous en Israel ou en diaspora, nous souhaitons ardemment.

Le point ci-dessous évoqué par Pierre Itshak Lurçat (pour UPJF.org) est assez clair et mérite d'être lu par le plus grand nombre.

Combattre la ‘palestinisation’ des universités israéliennes, un enjeu crucial.

Dans cette nouvelle rubrique, nous porterons un regard différent sur l’actualité israélienne, à partir des chroniques publiées dans les journaux parus le shabbat sous la plume des meilleurs observateurs de l’actualité. Cette semaine, alors que les journaux sont emplis de sondages et de pronostics, à deux semaines des élections, Dror Eidar et Ben Dror Yémini reviennent sur un aspect différent, mais essentiel du combat politique et idéologique : celui qui se déroule au sein des universités en Israël.

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UNIVERSITE D'ARIEL EN SAMARIE

« Des milliers d’étudiants israéliens sont dégoûtés par la ‘palestinisation’ des sciences sociales et refusent la réécriture de l’histoire du sionisme et la dissimulation des découvertes archéologiques considérables… » écrit Dror Eidar ce shabbat dans Israel Hayom. Ce qu’il appelle palestinisation des sciences sociales est un phénomène sans doute peu connu des amis d’Israël dans le monde, qui tentent souvent de combattre la dé-légitimation de l’Etat juif, sans savoir que beaucoup des principaux acteurs de cette dé-légitimation agissent à l’intérieur même de l’université et du monde académique israélien…

Si l’on veut un exemple récent de ce phénomène, il nous est fourni par Dror Ben Yemini dans les colonnes de Makor Rishon ce shabbat, à propos du film de propagande « Jénine Jénine », qui a été récemment projeté aux étudiants du collège Beit Berl par la professeur Mikhal Hakham, connue pour ses opinions d’extrême-gauche (elle soutient le Hamas et le boycott universitaire d’Israël !).

C’est dans ce contexte que Dror Eidar salue la décision du ministre de l’Education, Gidéon Sar, de faire du centre universitaire d’Ariel en Samarie une université à part entière, décision qui peut selon lui jouer un rôle important dans le rééquilibrage de la vie intellectuelle en Israël, trop souvent polluée par les représentants de la tendance antisioniste…

« On aurait du mal à exagérer l’importance de la proclamation officielle de l’université d’Ariel, cette semaine », écrit Dror Eidar. « Pour la première fois depuis de nombreuses années une nouvelle université est fondée, la huitième, et elle l’est par un gouvernement conservateur, dans la capitale de la Samarie.

Du point de vue historique, ce geste est plus important que toutes les constructions réalisées par le gouvernement sortant en Judée-Samarie. Cela constitue une déclaration d’indépendance du gouvernement Likoud face à l’establishment des anciennes élites, précisément sur un sujet le plus sensible : la contestation de l’hégémonie culturelle et académique de la gauche israélienne, au moyen de la création d’une alternative universitaire et culturelle ».

L’importance du combat culturel à l’intérieur d’Israël

Dror Eidar pointe du doigt un aspect essentiel de la vie politique en Israël, dont l’importance a souvent été négligée par la droite, depuis le début de l’implantation sioniste en Eretz-Israël il y a plus d’un siècle : celui du combat culturel et idéologique. Pour comprendre les tenants et les aboutissants de cet affrontement, il faut relire le livre important de Yoram Hazony, "L’Etat juif. Sionisme, post-sionisme et destins d’Israël" dont j’avais ainsi rendu compte au moment de sa parution en France :

L’auteur, qui dirige le Centre Shalem à Jérusalem, tente de répondre à la question suivante : « comment l’idéal de l’Etat juif qui, quarante ans auparavant, était un axiome politique et moral pour presque tous les Juifs du monde… a pu être si rapidement ruiné au sein du leadership culturel de l’Etat juif lui-même ? » Ou en d’autres termes, comment les élites israéliennes ont-elles trahi l’idéal sioniste ? La réponse à cette question cruciale, Hazony la trouve notamment au sein de l’intelligentsia et de l’université israélienne, qui ont toujours abrité de nombreux intellectuels hostiles au sionisme politique, avant même la création de l’Etat juif.

C’est en effet un petit groupe de professeurs juifs allemands, réunis autour de Martin Buber, qui ont fondé en 1925 l’université hébraïque de Jérusalem, laquelle a formé plusieurs générations d’intellectuels et de politiciens israéliens. Pour comprendre l’importance de cette institution dans la vie politique israélienne, on se contentera de citer les chiffres suivants : 25% des membres de la Knesset ont étudié à l’université hébraïque, ainsi que douze des quinze juges actuels à la Cour suprême, et quatre anciens Premiers ministres… On aurait du mal à trouver une université aussi influente en France ou ailleurs.

Pour Buber et ses amis du Brith Shalom, l’idéal d’une entente judéo-arabe passait avant la réalisation des aspirations nationales juives en terre d’Israël. C’est pourquoi ils s’opposèrent au programme sioniste et prônèrent, anticipant sur les intellectuels post-sionistes actuels, la création d’un Etat binational. Un facteur clé du succès du Brith Shalom et du courant post-sioniste réside, selon Hazony, dans le peu d’intérêt porté au combat intellectuel par les tendances dominantes du sionisme, de droite comme de gauche. Alors que le sionisme travailliste mettait l’accent sur le développement agricole et les implantations juives, les partisans du sionisme « révisionniste » de Menahem Begin se consacraient à la lutte armée contre l’Angleterre (et contre les Arabes). Mais ni l’un ni l’autre n’ont su évaluer l’importance essentielle du combat d’idées, laissant le champ libre aux partisans de l’Etat binational.

Il n’est pas anodin que le centre Shalem vienne lui aussi de recevoir une consécration officielle, avec l’autorisation de fonder un collège universitaire. Deux bonnes nouvelles pour le monde académique et pour l’avenir d’Israël !

Pierre Itshak Lurçat

Yoram Hazony, L’Etat juif. Sionisme, postsionisme et destins d’Israël, Editions de l’Eclat, 2007, 478 pages, 30 euros, traduit par Claire Darmon.
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