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En lisant « Going to the Wars » de Max Hastings

‟In most Western societies today, the army is a side street, even a cul-de-sac. In Israel, it is a reality that pervades every aspect of work, thought, talk. One of Yoni’s friends said to me, « In this country, if you want to see creative brilliance, look for it in the army. Thirty years of fighting for survival have focused the finest imaginative minds in the country in Zahal »” (Max Hastings, ‟Going to the Wars”)

 

Max HastingsSir Max Hastings (né en 1945), dans sa maison du Berkshire.

 

Je viens de lire ‟Going to the Wars” (Pan Books – 2001), les souvenirs de ce journaliste qui a couvert tant de conflits.

Le chapitre XII a pour titre ‟Yoni”. Yoni, un nom qui m’a d’emblée évoqué Entebbe et le frère de Benyamin Netanyahu. Yoni… Le 27 juin 1976, le vol Air France 139 Tel Aviv – Paris est détourné sur Entebbe avec à son bord deux cent quarante-six passagers et dix membres d’équipage. Les exigences des terroristes sont extravagantes et le monde retient son souffle. Dans la nuit du 3 au 4 juillet, des C-130 de l’IDF déversent ‟a stormy party” : des commandos d’élite, la réplique de la Mercedes et de la Land Rover du dictateur ougandais ainsi que des hommes grimés dans le but de semer la confusion chez les terroristes et les soldats ougandais.

 

Yoni, Hero of Entebbe

Le livre de Max Hastings. Il n’est pas le meilleur mais le premier dédié à ce héros d’Israël.  

 

‟Terror was not invincible. Outrage could be fought and conquered. But only the Israelis, the world acknowledged, could have displayed the boldness and brillance to launch and execute such an operation, half a continent from home”, écrit Max Hastings qui est à New York pour le American Bicentennial Day. Il prend note de l’euphorie générale, en particulier de celle de Walter Cronkite de CBS.

Six mois après le raid sur Entebbe, l’éditeur George Weidenfeld, l’un des plus fervents supporters anglais d’Israël, demande à le rencontrer pour en savoir davantage ; mais Max Hastings lui dit ne pas en savoir plus que ce que tout le monde sait. George Weidenfeld lui apprend alors que les Israéliens déplorent un tué, le colonel Yonatan Netanyahu, l’un de leurs meilleurs soldats, et qu’ils aimeraient écrire un livre sur cet officier et l’unité d’élite à laquelle il appartenait, le Shayeret Matkal. Ils voudraient que ce livre soit écrit par un non-Juif, ce qui le rendrait plus crédible. Les Israéliens avaient été favorablement impressionnés par ce que Max Hastings avait écrit sur la guerre du Kippour. Je signale à ce propos que les chapitres VI et VII de ‟Going to the Wars” s’y rapportent.

Max Hastings est séduit d’emblée par cette proposition, d’autant que son interlocuteur lui assure l’appui du Premier ministre Shimon Peres. Max Hastings exulte, il admire Tsahal et va pouvoir l’étudier de plus près.

Quelques jours plus tard, il rencontre Benzion, le père de Yoni, au coffee shop du Royal Garden Hotel de Kensington à Londres. Sur les conseils de George Weidenfeld, Benzion Netanyahu a lu ‟Montrose: The King’s Champion”. Il s’empresse de dire que son fils n’était pas seulement un soldat mais aussi un intellectuel ; d’ailleurs, il aurait préféré que son fils quitte l’armée et poursuive des études à Harvard. Et Benzion engage Max Hastings à lire tout ce que son fils a écrit. Max Hastings est enthousiaste : ‟I wanted only to convince this emotional old man that I could do justice to his son”.

Printemps 1977. Max Hastings le baroudeur a signé un contrat avec un éditeur pour travailler à un livre sur les bombardements alliés au-dessus du Reich (voir ‟Bomber Command”) et il décide de vendre sa maison de Londres pour s’installer dans la campagne irlandaise (County Kilkenny). Il commence à rassembler des matériaux concernant Yoni et se rend aux États-Unis pour y rencontrer la famille Netanyahu. Il passe plusieurs jours à Boston avec le frère cadet, Benyamin, alors étudiant au MIT et qui a lui aussi servi au Shayeret Matkal.

Chez les parents de Yoni. Homme modeste toujours prêt à l’auto-dérision (self-mockery), un exercice très anglais, Max Hastings écrit : ‟Cela, his mother, was somewhat appalled by my ignorance of jewish life. « He does not know what a bar mitzvah is, this boy ! » she cried”, tandis que le père qui a d’autres chats à fouetter bombarde son hôte de lectures, parmi lesquelles : ‟The Plot to Destroy Israel”, ‟The Jewish Revolution”, ‟The Case for Israel”. Le flegmatique Max Hastings a cette réflexion :  ‟Much as I admired the country, most of this stuff seemed well off the board”. Mais qu’importe ! Il est décidé à écrire l’histoire d’un homme killed in action et qui avait le même âge que lui.

Max Hastings se rend à Tel Aviv pour une série d’interviews avec des soldats ou ex-soldats de Tsahal. Il écrit : ‟It was one of the most fascinating experience of my life”. Parcourant le pays, Galilée, Judée, Samarie, ‟listening to extraordinary stories of Israel’s wars and anti-terrorist campaings”, il rencontre des officiers et des soldats de Tsahal qui ont participé à l’opération contre le Boeing 707 de la Sabena à Lod en mai 1972, à l’attaque de l’OLP à Beyrouth en avril 1973, et à d’autres brillantes opérations.

Max Hastings rencontre Iddo, le plus abordable des frères Netanyahu, qui lui aussi a effectué son service militaire au Shayeret Matkal. Alors qu’ils sont à table, Benyamin déclare : ‟In the next war, if we do it right we’ll have a chance to get all the Arabs out. We can clear the West Bank, sort out Jerusalem”. On sourit à la lecture de cette déclaration. L’occasion de chasser les Arabes était offerte après la guerre des Six Jours, avec annexion de la Judée-Samarie et expulsion des Arabes de l’autre côté du Jourdain. La guerre du Kippour se prêtait moins à ce genre d’entreprise. Je passe sur certaines réflexions de Max Hastings concernant la famille Netanyahu : Benzion et Benyamin sont trop durs et ils contrarient sa vision du Moyen-Orient, une vision qui selon moi manque singulièrement de profondeur !

 

Yoni NetanyahuYonatan ‟Yoni” Netanyahu (1946-1976)

 

Un homme que Max Hastings admire plus qu’aucun autre n’est pas d’accord avec ce projet de biographie : Ehud Barak. Le fixant dans les yeux, celui-ci lui déclare : ‟I want to make it clear that I believe this whole project is madness. Madness. The idea of admitting a foreigner, not even a Jew, to our secrets seems to me very foolish indeed.”

Max Hastings revient en Irlande les bagages chargés de documents et se met à étudier les écrits de Yoni. Le Yoni qu’il perçoit alors n’est pas celui décrit par son père, Benzion. Yoni lui apparaît plutôt comme ‟a tragic figure” sur les épaules duquel les parents ont placé un poids bien trop lourd, ‟not least the burden of being what his father had not been”. Suivent des remarques peu aimables sur le père. Dans cet ouvrage de commande, Max Hastings prend soin toutefois de pas se laisser aller à dire tout ce qu’il éprouve à l’égard de la famille Netanyahu, ‟but private perceptions deeply coloured my prose.”

Max Hastings envoie son manuscrit à George Weidenfeld ; il attend sa réponse, inquiet. La famille Netanyahu se déclare mécontente, très mécontente même. Par ailleurs, et c’est plus grave, le gouvernement israélien ne veut en aucun cas publier un livre qui en dit trop sur certaines opérations de Tsahal et sur ses forces spéciales, le Shayeret Matkal en particulier. Or, se demande Max Hastings, que vaudra ce livre si le Shayeret Matkal n’y figure pas ? Il est d’autant plus atterré qu’il a un besoin urgent d’argent. N’est-ce pas le gouvernement israélien lui-même qui est à l’origine de ce projet ? Certes, mais Menahem Begin a remplacé Shimon Peres et Max Hastings reçoit des courriers de presque toutes les personnes qu’il a interviewées lui signalant qu’il a mal compris et sous-estimé Yoni. Max Hastings plaide sa cause auprès de George Weidenfeld qui se montre inflexible : ‟I would be paid only if and when a deal could be agreed for the book’s publication on terms acceptable to all the interested parties”. Il rencontre Ehud Barak et plaide une fois encore sa cause, mais rien n’y fait.

A New York, il expose ses démêlés aux éditeurs de ‟Command Bomber” dans l’espoir qu’ils se chargent de la publication du livre refusé en Israël. On lui fait comprendre qu’il risque de se fourrer dans un guêpier. Après des semaines de pourparlers, il finit par recevoir un chèque de George Weidenfeld. Entre temps, le manuscrit a été expurgé (bowdlerized) sous la pression de la famille et du gouvernement israélien.

Dans le présent article, je me suis contenté de rapporter les conditions particulières dans lesquelles ‟Going to the Wars” s’est élaboré, passant vite sur un certain bavardage qui ferme le chapitre intitulé ‟Yoni”. L’auteur nous avertit : ‟Looking back, I can say that my own hostility to Israel’s policy towards the Occupied Territories was born before the disaster over my book”. Admettons. Admettons son peu de sympathie pour Benzion et Benyamin Netanyahu ; je n’ai pas à me mêler de ses relations, la sympathie et l’antipathie entre individus sont des affaires généralement fort subtiles. On peut préférer tel dirigeant à tel autre. Mais que penser d’une telle appréciation : ‟Israel’s policy towards the Palestinians has cost the country many of its most devoted friends in Europe and even the United Sates. Tragically, the nation has commited itself to a future founded upon the sword rather than upon justice” ? C’est une considération simpliste qui ne prend pas en compte l’extrême complexité d’une situation. Écrirait-il la même chose, aujourd’hui, après les désastreux Accords d’Oslo ? Par ailleurs, et plus grave, je considère que son jugement concernant un prétendu manque de générosité des Israéliens relève de la diffamation. Israël, ‟its ruthlessness and absolute sense of self-interest”. Il me semble pour le moins normal qu’un pays se préoccupe d’abord de ses intérêts sous peine de disparaître. Israël n’a pourtant pas été avare en propositions qui toutes ont été rejetées par les autorités palestiniennes. Par ailleurs, Israël est très présent lors des catastrophes humanitaires. Aujourd’hui, de nombreux blessés syriens sont soignés dans des hôpitaux israéliens. Il est dommage qu’un homme qui a tant vu se laisse aller à des considérations pantouflardes.

 

Olivier Ypsilantis

2 thoughts on “En lisant « Going to the Wars » de Max Hastings”

  1. La réaction de Max Hastings est somme toute très banale. Un Juif lui déplaît donc…les Juifs ou Israel sont coupables. C’est la réaction antisémite la plus basique qui soit. Dans le livre d’Esther, Haman agit de même: Mordekhai refuse de se prosterner devant lui donc… il va voir le roi et lui dit “Il est une nation répandue, disséminée parmi les autres nations dans toutes les provinces de ton royaume; ces gens ont des lois qui diffèrent de celles de toute autre nation; quant aux lois du roi, ils ne les observent point: il n’est donc pas de l’intérêt du roi de les conserver”. Et nos idiot utiles qui en sont encore à penser que si nous étions tous conformes aux désirs des non-Juifs, ils nous accepteraient enfin!
    A propos de Yoni, son frère Iddo a publie un livre: Yoni’s last battle, the rescue at Entebbe.
    Amicalement,

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