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Le retour des Séfarades en Espagne

 

J’ai appris avec surprise, et plaisir, que l’Espagne proposait la nationalité espagnole aux descendants des Juifs expulsés en 1492. C’est ce qu’ont annoncé le jeudi 22 novembre 2012, à la Casa Sefarad-Israel (1), les ministres de la Justice et des Affaires étrangères, respectivement : Alberto Ruiz-Gallardón et José Manuel García-Margallo. Ce nouveau processus légal constitue une avancée substantielle par rapport à la réforme du Code Civil de 1982 qui permettait aux Séfarades d’obtenir la naturalisation espagnole après avoir résidé deux ans dans le pays. Ce temps minimum n’est plus nécessaire ; il suffit de présenter un certificat de la Federación de Comunidades Judías (2) qui atteste de l’appartenance à la communauté séfarade pour que le demandeur obtienne la nationalité espagnole, ainsi que son conjoint et ses enfants mineurs. Selon Alberto Ruiz-Gallardón, quelque 250 000 individus parlent le judéo-espagnol (3) et pourraient donc prétendre à la nationalité espagnole.

 

Selon José Manuel García-Margallo, l’un des objectifs de cette procédure est de restaurer la mémoire d’une Espagne réduite depuis longtemps au silence (‟recobrar la memoria de la España silenciada durante hace mucho tiempo”). Alberto Ruiz-Gallardón juge que cette procédure marque des retrouvailles (reencuentro), qu’elle s’adresse à ‟ceux qui ont été injustement privés de leur nationalité et qui, dans l’exil, ont recréé avec affection une Espagne qu’ils ne pouvaient se résigner à perdre et qui est à présent, d’un point de vue juridique, autant la leur que la nôtre” (‟los que han sido injustamente privados de su nacionalidad y han recreado a través del afecto una España que nunca se resignaron a perder y que a partir de ahora es tan suya como nuestra, en lo que al derecho se refiere”).

 

Palacio de CañetePalacio de Cañete (XVIe siècle), rénové en 1817. Siège de la Casa Sefarad-Israel, C./ Mayor n° 69, Madrid.

 

Au cours de la réunion du 22 novembre 2012 à la Casa Sefarad-Israel était également présent le président de la Federación de las Comunidades Judías, Isaac Querub. Il a évoqué les expulsés de 1492 (4) dont les descendants pourront obtenir, après plus de cinq siècles et où qu’ils résident, la nationalité de leurs ancêtres.

 

 

Le mercredi 19 décembre 2012, Google et Centro Sefarad-Madrid ont mis en ligne ‟Caminos de Sefarad” : www.redjuderías.org

On y propose un voyage virtuel dans les vingt-quatre villes d’Espagne qui appartiennent à la Red de Juderías de España. 

 

Alors que je m’apprêtais à poster cet article, un ami m’a fait parvenir cet article signé Soeren Kern et intitulé ‟Muslims Angry Over Spanish Citizenship for Jews” :

http://www.gatestoneinstitute.org/3509/spanish-citizenship-jews

 

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(1) Le palais de Cañete offre une superficie totale de 3 764 m2. 1 427 m2 ont été attribués à la Casa Sefarad-Israel, le reste à l’administration madrilène. La Casa Sefarad-Israel a été fondée en décembre 2006, suite à un accord entre le ministère des Affaires étrangères (Ministerio de Asuntos Exteriores y de Cooperación), la Comunidad de Madrid (l’une des régions autonomes d’Espagne, fondée en 1983) et la mairie de Madrid (Ayuntamiento de Madrid). La Casa Sefarad-Israel a pour principales missions l’étude du legs séfarade comme partie intégrante de la culture espagnole jusqu’à nos jours et l’incitation aux échanges entre la société espagnole et la société israélienne.

(2) La Federación de Comunidades Judías de España (FCJE) représente officiellement depuis 1992 les communautés juives auprès des institutions nationales. La FCJE est membre du European Jewish Congress (EJC), du World Jewish Congress (WJC) et du Congreso Judío Latinoamericano (CJL). Aujourd’hui, en Espagne, la communauté juive compte environ 40 000 membres. Les communautés juives sont essentiellement présentes dans les deux principales villes du pays, Madrid et Barcelona, mais aussi à Melilla, l’une des deux enclaves espagnoles au Maroc. On compte plus de trente synagogues dans tout le pays, certaines avec une capacité d’accueil de huit cents personnes. Les cimetières juifs y sont nombreux : Madrid, Barcelona, Sevilla, Málaga, Melilla, Ceuta (l’autre enclave espagnole au Maroc), Palma de Mallorca, Benidorm et La Línea de la Concepción (devant Gibraltar).

(3) Un très riche lien sur le judéo-espagnol rédigé par le meilleur spécialiste de la question, le professeur Haïm-Vidal Séphiha auquel j’ai consacré un petit article sur zakhor-online.com : http://michel.azaria.free.fr/Histoire.htm

(4) Les expulsés de 1492 ne constituent qu’une partie des expulsés. Le décret de l’Alhambra (30 mars 1492) a officiellement mis un point final à la présence juive en Espagne, une présence qui s’était terriblement étiolée au cours des dernières années du XIVe siècle, suite aux prêches du dominicain Vincent Ferrer (1350-1419), puis tout au long du XVe siècle. L’exode massif de 1492 a donc été précédé d’un autre exode, plus discret et sur une longue période. Et je ne parlerai pas des convertis, nombreux, et des assassinés par la populace ou les tribunaux de l’Inquisition. Ci-joint, un lien Akadem (succinct) sur l’expulsion des Juifs d’Espagne et le décret de l’Alhambra :  http://www.akadem.org/medias/documents/–expulsion-juifs-espagne-2.pdf

2 thoughts on “Le retour des Séfarades en Espagne”

  1. Je viens d’en informer mon mari dont la famille est judeo-espagnole: sa réaction a été brutale et désobligeante envers le gouvernement espagnol, il a eu la même réaction que mes enfants lorsque je leur avais annoncé que je pouvais récupérer les nationalités allemandes et italiennes dont ma famille avait été déchue!
    Dans mon enfance le mot passeport signifiait souci des grands mais je me sentais toujours reconnaissante envers un certain Nansen qui, ainsi que le croyais, leur prêtait le sien.
    Ça me rappelle une anecdote: Le père d’une amie, qui était déjà très âgé et un peu sénile, avait ressorti son vieux-faux passeport portugais (il était né à Varsovie) et l’avait présenté comme papier d’identité. L’affaire n’était pas allée bien loin vu son âge, mais il avait du rendre son passeport. Avec beaucoup de regrets il avait dit au commissaire interloqué:”C’est sûr? Je dois vous le donner? C’est que je l’ai payé très cher, à Varsovie ça coûtait très cher un passeport comme ça, mais il m’a bien servi, ça oui, il m’a bien servi, il m’a même sauvé la vie!”
    Chez nous, parmi nos “malédictions” on a adopté celle de Saltiel lorsqu’il prie pour “Monsieur Hitler” qu’il ne connaît pas bien mais dont il se méfie:”Et s’il est méchant,transforme le en Juif polonais sans passeport!”

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