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L’intuition génétique

 

Your haplogroup, or genetic branch of the human family tree, tells you about your deep ancestry often thousands of years ago and shows you the possible paths of migration taken by these ancient ancestors.  Your haplogroup also places you within a community of relatives, some distant, with whom you unmistakably share an ancestor way back when.

As many of you know around the year 2000 the analyses of Y chromosomal human lineages became a pretty big deal. The reason these lineages are important and useful is that they record the uninterrupted ancestry of males, from father to son, along the Y chromosome. Instead of the complexities of the whole genome, as with mtDNA you have a simple and elegant phylogenetic tree to interpret. The clusters along this tree are defined as broad haplogroups, united by derived states from a common ancestor.

 

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Tout d’abord, je me permets de mettre en ligne une démonstration de lecture de 23andMe et une mise en garde présentées par un client de cette société de biotechnologie basée en Californie. Il ne faut pas prendre au pied de la lettre les pourcentages affichés ; il faut envisager approximations et trous de lecture dans les séquences génétiques. Bref, il faut considérer ces résultats avec un certain détachement sans pour autant les mépriser : ils sont la trace fiable d’un passé lointain, une trace que nous portons au plus profond de nos constituants, les chromosomes. Par ailleurs, la beauté du Chromosome painting — ou fluorescence in situ hybridization (FISH) — et des cartes montrant la distribution des haplogroupes (ces grands groupes d’haplotypes) ne peut que séduire. Voir par exemple la carte ci-dessous, avec ses nappes de couleurs plus ou moins concentrées qui jouent en camaïeu :

https://www.youtube.com/watch?v=Z2QixgQ3NLE&feature=youtu.be&t=1m41s

 

Répartition du R1a. On note des foyers au Nord de l’Inde et en Asie centrale, d’autres en Europe orientale. Les foyers européens procèderaient des foyers asiatiques.

Ancient DNA testing has confirmed the presence of haplogroup R1a1a in samples from the Corded Ware culture in Germany (2600 BCE), from Tocharian mummies (2000 BCE) in Northwest China, from Kurgan burials (circa 1600 BCE) from the Andronovo culture in southern Russia and southern Siberia, as well as from a variety of iron-age sites from Russia, Siberia, Mongolia and Central Asia.

 

J’ai reçu il a deux jours les résultats de 23andMe. Je voulais vérifier certains indices, plus exactement certaines intuitions. Et le mot intuition revêt en la circonstance une importance particulière. Après tout, pourquoi celui qui ne cesse d’interroger la mémoire n’interrogerait-il pas son propre corps, ses composants les plus intimes qui portent en eux l’Antiquité et la Préhistoire, des millénaires ?

L’intuition des origines et les rêveries qui s’y rapportent… Lorsque je pars dans certaines rêveries, j’ai l’impression très précise que des ancêtres se manifestent en moi — cherchent à se manifester en moi — et qu’ils veulent que je les écoute… Des lecteurs souriront à la lecture de ces lignes, mais que m’importe puisque ce faisant je sais que j’honore les défunts que je porte en moi, dans ma mémoire, mais aussi dans mes … chromosomes qui eux aussi sont mémoire, mémoire radicalement unique et néanmoins ouverte à l’Univers. Par ailleurs, ma curiosité m’a toujours entraîné comme un chien à la recherche d’une piste entraîne son maître — et en la circonstance le chien est le maître.

J’ai donc reçu les résultats de 23andMe (23 pour les paires de chromosomes) via Internet. Qu’y ai-je appris ? Que je suis essentiellement européen (je le savais) ; et je n’entrerai pas dans des détails qui n’intéressent que moi-même et ma famille proche, et qui, une fois encore, ne doivent pas être pris au pied de la lettre ou, plus exactement, au pied du pourcentage… Rien de bien extraordinaire ou, plutôt, rien que de l’extraordinaire dans la mesure où chaque homme porte en lui une signature unique qui le rattache intimement à l’humanité, au Cosmos. Par ailleurs, la génétique c’est aussi un fabuleux lexique (surtout pour le non-spécialiste que je suis), un vecteur de rêveries comme l’est celui de l’astrophysique. Dans ce lexique, nombre de mots de l’anglais, mots qu’irrigue le grec, une fois encore. Pensons simplement à chromosome et au deux mots grecs qui le composent ou à haplotype, mot-valise élaboré à partir de la contraction d’une locution anglaise, etc.

 

La civilisation des Kourganes. Voir « l’hypothèse kourgane », introduite par Marija Gimbutas en 1956. Ci-joint, un lien intitulé : « Origines des langues européennes – L’indo-européen et l’hypothèse kourgane » :

http://www.worldwidepress.info/article-origines-des-langues-europeennes-l-indo-europeen-et-l-hypothese-kourgane-75085799.html

 

Lorsque j’ai reçu ces résultats, une conversation m’est revenue, très précise. Mon grand-père (paternel) nous avait invités à fêter son anniversaire dans un restaurant, à l’orée du Bois de Boulogne. Je revois ce grand-père, imposant, habitué à donner des ordres, peu porté à la rêverie (me semble-t-il). Il regarda ses petits-enfants (j’avais douze ans), me regarda et s’exclama (je le cite de mémoire) : « Je ne sais pas qui étaient nos lointains ancêtres, mais il y a un air slave dans la famille ». Peut-être a-t-il dit « russe » et non « slave », mais qu’importe.

A l’époque, mes rêveries me portaient résolument vers les steppes d’Asie centrale, vers les Sythes, un peuple que j’apprendrai à mieux connaître peu après, en 1975, à l’occasion d’une somptueuse exposition au Grand Palais, « Or des Sythes, trésors des musées soviétiques ». Mes rêveries avaient aussi beaucoup à voir avec les Sarmates, peuple nomade des steppes de la Russie méridionale, et, un peu plus à l’Est, avec les Kirghizes. J’étais tombé amoureux de Djamila la Kirghize en lisant le livre de Tchinguiz Aïtmatov. A ce propos, je remercie Aragon (dont la poésie et les considérations m’emmerdent généralement) pour la traduction de cette nouvelle, l’écrit le plus connu de cet écrivain kirghiz. Par ailleurs, je me souviens que j’écoutais inlassablement sur l’électrophone de mes parents le poème symphonique de Borodine, « Dans les steppes de l’Asie centrale ».

 

 

Je sentais comme un appel. Le petit Parisien que j’étais ne cessait d’interroger Alexandre le Grand, le plus grand conquérant occidental, comme il interrogeait Genghis Khan, le plus grand conquérant asiatique. La Grèce classique se présentait à lui sous un aspect intellectuel et esthétique, tandis qu’avec Alexandre le Grand quelque chose passait dans son sang. Alexandre le Grand, l’Occidental qui poussa jusqu’en Sogdiane et Bactriane, et jusqu’à l’Indus, et qui aurait poussé plus loin encore si son armée n’avait décidé de rentrer au pays. La Bactriane, au pied du Pamir, du « toit du monde », berceau supposé de l’Empire perse et du zoroastrisme. La Sogdiane et son peuple de Sythes, des nomades iranophones sédentarisés. Ces rêveries ne l’ont pas quitté ; elles se sont même aggravées ; et la découverte de l’haplogroupe de son père a fait monter sa fièvre. Dans cette partie du monde se trouve l’un des pourcentages les plus élevés de l’halogroupe R1a1a. Je vais y venir.

 

 

J’ai détaillé les résultats des analyses envoyées par 23andMe, le mtDNA (la mère) et le Y-DNA (le père). Rien de bien surprenant. J’étais européen et des deux côtés. Mais l’Européen vient d’ailleurs, d’autres continents ; et pour l’heure oublions la sortie d’Afrique, l’Ève mitochondriale (mt-Eve) et l’Adam Y-DNA. Le Y-DNA me réservait une surprise. J’étais comme un navigateur à bord d’un bateau auquel le sonar envoyait une image venue des profondeurs. Il était tard, j’étais fatigué, et je lus Haplogroup H1a1a… Après vérification, je me vis parent des Gitans dont l’étude phylogénétique confirme leurs origines indiennes et les indices que véhiculent leurs légendes et certaines particularités linguistiques. J’imaginai mon père dans une roulotte, avec de gros anneaux aux oreilles, une moustache fournie et même un petit singe sur l’épaule. Être parent des « gens du voyage » ne me déplaisait aucunement. Le lendemain, tôt le matin, dans la quiétude dominicale, je compris ma méprise : j’avais lu H, H1a1a, au lieu de R, R1a1a, un haplogroupe qui ne me faisait pas quitter l’Inde ; il me portait simplement plus vers le nord du pays, Nord de l’Inde et Nord du Pakistan, à l’époque où cette funeste création n’existait pas, à l’époque où les seules frontières étaient naturelles.

Le haplogroupe R1a (sous-groupe de l’haplogroupe R) est particulièrement présent en Inde, chez les West Bengals Brahmins ; il l’est aussi en Europe orientale ; tandis que le haplogroupe R1b est franchement plus présent en Europe occidentale, de la péninsule ibérique à l’Écosse, avec forte dilution à mesure que l’on va vers l’Europe centrale et orientale. Curieux, je voyais plutôt mon père se rattacher à l’haplogroupe R1b.

Le haplogroupe R1a1a reste un vaste sujet d’étude. Son extension géographique, considérable, interroge les chercheurs qui tentent notamment d’établir un lien entre ces concentrations maximales en Eastern Europa, Central Asia et West Asia. La plupart des informations que j’ai pu rassembler tendent à établir un lien entre l’Inde, le Caucase et l’Europe orientale. C’est une hypothèse (très) forte, je n’ose dire une certitude.

Le haplogroupe R1a1a est notamment étudié par les chercheurs qui interrogent l’origine (urheimat) des langues indo-européennes et leur évolution. Certains d’entre eux pensent qu’elle est à rechercher du côté du sous-continent indien qui affiche la plus grande diversité de STR (Short Tandem Repeat) au sein de l’haplogroupe R1a1a ; d’autres pensent qu’elle est à rechercher du côté de l’Europe orientale (Pologne, Ukraine, Russie d’Europe) et de l’Asie centrale. En l’occurrence, généticiens et archéologues travaillent main dans la main. Les archéologues prennent note de la complexité inter-culturelle dans les steppes d’Eurasie et jusqu’en Ukraine, de ces cultures associées du néolithique à l’âge du fer à la civilisation des kourganes (ces tombes à tumulus) et à la domestication du cheval, une civilisation qui semble correspondre plus ou moins à la propagation des langues indo-européennes vers l’Eurasie.

Les principaux groupes humains détenteurs du Y-DNA haplogroup R1a1a sont les Pachtounes (ethnie qui en Afghanistan dépasse légèrement les 50% de la population totale du pays) suivis des Kirghizes (50%). Un pourcentage très élevé de cet haplogroupe est présent en Inde, chez les brahmanes du Bengale-Occidental (72%) et les brahmanes du Konkanastha (48%). En Europe, l’haplogroupe R1a1a est particulièrement dense chez les Polonais, les Ukrainiens, les Russes et les Sorabes (de 50% à 65%).

 

Il faut suivre les travaux de Dr. Łukasz Lubicz Łapiński concernant le R1a Project. Subclade : sous-groupe d’un haplogroupe, qu’il soit Y-DNA ou mtDNA. Clade, du grec κλάδος soit « branche ».

 

Je vis donc mon père en manouche, sur les routes, dans une roulotte, successivement rempailleur de chaises, ferblantier et même, pour céder à une image convenue, voleur de poules. Puis, comprenant ma méprise, je le vis chevauchant les steppes, scythe ou sarmate. Je le vis brahmane, quelque part dans le Nord de l’Inde, plus précisément dans le Punjad où cet haplogroupe est particulièrement dense. Enfin, avant de m’endormir, je le vis en Rabbi Jacob, intégré à un cercle de danseurs ; Louis de Funès se rattachait peut-être à l’haplogroupe R1a1a…

Dans la génétique juive, le Y-DNA R1a1a est présent chez 12% des Ashkénazes ; et son pourcentage monte considérablement chez les lévites ashkénazes — les lévites, les auxiliaires de la classe sacerdotale des cohanim. Cette marque génétique a conduit certains chercheurs à se demander si ces lévites n’étaient pas des descendants de convertis, les fameux Khazars, un sujet hautement polémique. La recherche génétique ne cesse de proposer des hypothèses et de faire bouger la ligne de front entre certitudes (de moins en moins nombreuses) et incertitudes (de plus en plus nombreuses). Mais des idéologues qui veulent nous faire accroire que le peuple juif a été inventé (voir les fumisteries de Shlomo Sand) s’enferment dans leur bunker et ne veulent rien savoir. Personne n’ignore que Shlomo Sand est allé fureter du côté d’Arthur Koestler dont le livre « La treizième tribu » eut un impact considérable sur le public. Ce livre nourrit les présupposés de l’idéologue Shlomo Sand et de ses dévots qui espèrent ainsi fragiliser les revendications juives sur Israël et présenter les « Palestiniens » comme les propriétaires légitimes des lieux.

D’après les études les plus poussées, 4% des Ahskénazes et 52% des lévites ashkénazes se rattachent à l’halogroupe R1a1a, contre seulement 3,2% chez les lévites séfarades. A ce sujet, il faut consulter les passionnantes recherches de D. Behar (professeur de pathologie médicale, département de néphrologie et génétique moléculaire, Rambam Medical Center, Haïfa,), une référence mondiale en la matière. Les recherches du Dr. Karl Skorecki sur la question ne sont par moins passionnantes.

Père d’origine, soit le dernier homme apparenté à tous les hommes vivants à un moment donné, via une ligne ininterrompue de descendants exclusivement masculins. Ève mitochondriale, mère d’origine de tous les humains dans une lignée exclusivement maternelle. A côté d’elle, les nombreuses mères d’origine (issues de l’Ève mitochondriale) qui se trouvent à la tête d’un haplogroupe ; elles représentent donc les premières femmes qui aient porté ces mutations. Je le redis, la génétique c’est aussi un fabuleux lexique, vecteur de rêveries non moins vastes que celles que propose le lexique de l’astrophysique. Je la comprends comme ouverture au monde, ouverture intelligente, née de l’étude, de la connaissance inlassablement reconsidérée.

Ci-joint, un article synthétique intitulé « Y chromosome evidence for a founder effect in Ashkenazi Jews » :

http://bioanthropology.huji.ac.il/pdf/Nebel%20_2005.pdf

Un article très dense intitulé « A Mosaic of People: The Jewish Story and a Reassessement or the DNA Evidence » (où il est question des Lévites) :

http://www.jogg.info/pages/11/coffman.htm

Enfin, un article intitulé « Levite DNA – Background of R1a1a Ashkenazi Levites » :

https://sites.google.com/site/levitedna/background-of-r1a1a-ashkenazi-levites

 

R1a origins (Undersell 2010; R1a1a origins (Pamjav 2012); and R1a1a oldest expansion and highest frequency (Underhill 2014)

 

Olivier Ypsilantis

6 thoughts on “L’intuition génétique”

  1. Les Levi descendent de la tribu de Levi (ainsi que les Cohen qui eux sont les descendants d’Aharon, le premier cohen (prêtre en hébreu), et grand frère de Moise, donc Aharon et Moshe Levi et leur soeur Myriam Levi, des noms très banals!
    Quant aux Khazars, Arthur Koestler ne savait pas que son livre serait utilisé pour dénigrer le peuple juif. Il l’avait écrit comme un canular pseudo-historique, un peu comme les notes savantes d’historiens fictifs présentées en bas de page par Jean D’Ormesson dans son incroyable livre La gloire de l’Empire.
    Arthur Koestler disait d’ailleurs qu’il s’était amusé à donner l’exemple de la carpe farcie comme indicateur de l’origine khazare des juifs ashkenazes mais que plus sérieusement, il était impossible que ce petit peuple du Caucase ait eu un rôle important dans l’histoire du peuple juif, car la langue juive des Juifs ashkénazes n’était pas un quelconque judeo-caucasien mais le yiddish, langue formée à 30 % de mots d’hébreu et à 70 % de mots du moyen-haut allemand de la vallée rhénane. Je le regrette un peu, les Khazars chevauchants dans leur steppe, ça en jette!
    Amicalement

  2. Hannah,
    Nous sommes bien d’accord. Arthur Koestler, extraordinaire bonhomme mais très fantaisiste quant à son histoire de Khazars. Quant à Shlomo Sand, un shmock et rien qu’un shmock. Reste cette étrange découverte (disons scientifique) de lévites avec forte proportion R1a1a. Comment l’interpréter ?

  3. Bonjour,
    Je viens de vous lire et je me sens assez concerné par vos points de vue étant donné que mon haplotype est R1a1a et que je suis identifié (mes ancêtres) comme proto-balte, certifié par un éminent chercheur russe qui m’a dit que mon haplotype ne pouvait pas être d’origine sémite.
    Or, mes origines sont espagnoles et je porte un nom de famille de juif converti.
    Que penser alors ?

  4. Olivier YPSILANTIS

    Je ne suis pas généticien et ma réponse ne peut être qu’aléatoire. Mais une chose est certaine, votre Y-DNA (paternel donc) n’est qu’un filament qui s’enfonce dans le temps, soit le père de votre père de votre père et ainsi de suite sur environ un millier de générations. Par ailleurs, cet Haplogroup R1a1a est volontiers instrumentalisé par des chercheurs polonais, russes ou ukrainiens qui cherchent à donner la prééminence aux R1a1a de leur région en plaçant les R1a1a du Nord du Pakistan et de l’Inde sous leur dépendance en quelque sorte (vous verrez les détails de cette affaire sur certains sites et blogs, en anglais généralement). Pour ma part, il me semble plus logique (en regard de la sortie d’Afrique) de considérer que les R1a1a d’Europe orientale procèdent des R1a1a d’Asie (voir les Brahmanes).
    Concernant l’Espagne, les noms de famille supposément de Juifs convertis me posent problème dans la mesure où presque tous les Espagnols portent des noms qui se rattachent à ce groupe, ce que j’ai pu vérifier cours de mes vingt-cinq ans passés en Espagne. Alors ? :
    https://www.tarbutsefarad.com/apellidos-judios/lista-apellidos-judios.html

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